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Orange, EDF, Air France, Renault, PSA : les  dossiers industriels sur lesquels le gouvernement n’a désormais ni stratégie, ni ambition cohérente, s’accumulent. Quel gâchis !
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Atlantico Business

Pendant que l’exécutif perd toute autorité, les dossiers industriels s'accumulent à Bercy et Matignon sans aucune stratégie cohérente.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Cette semaine après avoir, une fois de plus, assisté avec impuissance au délitement des valeurs de la gauche, le gouvernement va quand même être obligé de revenir à des dossiers industriels sérieux qui ont été complètement négligés et pire, mal traités compte tenu d’un manque de cohérence, de stratégie et d’ambition. Et la responsabilité en incombe aux têtes du pouvoir exécutif qui sont obsédées par des intérêts personnels.

François Hollande, n ‘a plus aucune autre stratégie que de sauver sa candidature aux prochaines élections présidentielles alors que tout indique qu’il en a gaspillé la possibilité et qu’il est rejeté non seulement par le pays mais par sa famille.

Manuel Valls n’a plus d’autorité. Il est fatigué et surtout fatiguant. Lui aussi s’est fixé comme objectif de ne rien faire qui puisse insulter son avenir personnel.

Quand à Emmanuel Macron, il a découvert qu’il pouvait lui aussi avoir un avenir et il a cru comprendre que les Français attendaient un peu plus d’expertise et de sérieux ; il pense donc être capable d’apporter le sérieux et le renouveau dont on aurait besoin.

Mais tout cela, ce sont des postures, des intentions qui, dans la forme, répondent peut-être à certaines demandes mais qui, dans le fond, tombent complètement à côté de la plaque.

Ce qui est extraordinaire parce que, ce mois-ci, sur quatre dossiers industriels qui engagent l’avenir de ce pays, on est en attente de décisions qui n’arrivent pas ou alors complètement biaisées.

1er dossier : L’avenir d’Orange et du secteur de la téléphonie mobile. La France est dotée d’un potentiel industriel extrêmement puissant et sophistiqué. Compte tenu de l’évolution technologique et de la concurrence mondiale, ce secteur aurait besoin de moyens d‘investissement très importants pour renouveler les équipements et partir à la conquête de nouveaux marchés. Ce secteur est partagé entre quatre opérateurs (Orange, SFR, Free, et Bouygues) qui se sont livrés une lutte très violente pour séduire un maximum de clients. Ils ont réussi, mais cette concurrence a aussi laminé leurs marges et handicapé leur développement. Comme sur tous les marchés matures du monde, il faudrait consolider les opérateurs pour regrouper certains moyens.

Il y avait en France un projet, pour rapprocher l’opérateur historique Orange avec Bouygues Télécom. Ce projet était cohérent, il aurait abouti à la naissance d’un champion du monde français, dans le respect des contraintes sociales et de l’équilibre de la concurrence sur le marché français. Ça n’était pas rien. Ce projet a avorté. Il a avorté pourquoi ? Tout simplement parce qu’il entrainait un recul de l’Etat dans le capital d’Orange au profit d’un acteur privé, en l’occurrence Martin Bouygues, et que le gouvernement (ou plutôt Bercy) ne l’a pas supporté. Accessoirement, cet échec ne déplait pas à Free de Xavier Niels qui a une autre idée de la consolidation et qui doit se frotter les mains, mais passons. Le résultat, c’est que nous sommes revenus à la case départ et qu’on va peut-être perdre une occasion de faire naitre un champion du monde. Et qui n’est pas champion du monde ajourd’hui sera sans doute très affaibli demain.

2ème dossier : EDF. Très urgent parce qu'EDF est une entreprise quasi publique, que la production d’électricité est la plus stratégique, et qu'EDF doit participer à la restructuration d’Areva et poursuivre son développement international. Parce ce que, là encore, EDF a la technologie et l'expertise pour s’installer comme le leader mondial de l'énergie nucléaire. Or, EDF n'en a pas forcément les moyens, ni le soutien de son actionnaire.

EDF doit sauver Areva de la faillite, et surtout confirmer son engagement dans l'équipement nucléaire de la Grande-Bretagne. Alors, tout cela demande des moyens financiers considérables, mais ça n’est pas le problème. Il y a de l'argent partout pour financer les investissements. Pour financer le projet d’EPR en Grande-Bretagne (24 milliards d'euros) et sauver Areva (5 milliards d'euros). Il y a de l'argent sur le marché international et EDF appartient encore à plus de 80% à l’Etat. A quoi ça sert sinon à faire plaisir à la CGT ? On pourrait donc privatiser ou ajuster les prix de l’électricité. Bref, le problème n’est pas un problème de financement. Le problème est principalement politique. Le président de la République et le gouvernement n’ont pas vraiment statué sur l’avenir du nucléaire, et sur le rôle d'EDF dans l'économie française.

3ème dossier : Air France. La démission brutale du PDG, Alexandre de Jugnac, la semaine dernière a rappelé à tout le monde que la compagnie aérienne était encore gérée comme au Moyen Age. Le président a démissionné parce qu’il était épuisé par les difficultés qu’il a rencontrées pour moderniser cette entreprise indispensable à la France. Air France est toujours aussi difficile à mettre en position d’affronter la concurrence internationale, et notamment celle des pays du golfe. Alors les résultats se sont améliorés. Air France est même une entreprise en bonne sante dira-t-on. Cette bonne sante est essentiellement due à la légère reprise du transport mondial, mais elle est surtout imputable principalement à l’écroulement des prix du pétrole. En passant de 70 dollars le baril à 30 dollars, le pétrole a permis à Air France de renouer avec les bénéfices… `

Conséquences : l’amélioration n’est donc pas due à la gestion interne. Alexandre du Jugnac est resté très discret sur les vraies raisons de son départ. Mais la réalité est que la direction a échoué dans sa réforme des personnels, et en particulier, du statut des pilotes qui sont agrippés à leurs salaires importants et leurs conditions de vie beaucoup plus favorables que dans n'importe quelle autre compagnie.

Pour couronner le tout, la direction d’Air France supporte mal d’être sous la pression permanente de l’Etat. Un Etat qui, là encore, n‘a jamais su définir une stratégie cohérente. Un Etat complètement partagé entre l'affrontement nécessaire du personnel et la prise en compte des contraintes à long terme. Air France est une entreprise mondiale, concurrencée dans le monde entier, mais qui, trop souvent est encore gérée comme un service publique d’autrefois.

4ème dossier : l'automobile française. Renault-Nissan d’un côté et PSA Peugeot-Citroën de l'autre. L'industrie automobile française se porte bien, mais l'Etat toujours présent dans les deux groupes veille en permanence à ce que des pseudo-contraintes de service public ou de protection des intérêts français soient respectées. En réalité, l’Etat français n’a pas de stratégie autre que l’exercice d'un pouvoir sans objectif très précis. La logique voudrait, comme chez EDF et Orange, que l’Etat s’éloigne des entreprises qui sont en situation de concurrence pour les laisser affronter le marché en toute liberté.

Aujourd’hui, il ne se passe pas un mois où une administration de l’Etat ne trouve pas quelque chose à dire pour gêner la gestion des groupes automobiles. L’Etat pourrait se contenter de jouer son rôle d’actionnaire, c’est-à-dire, d ‘assister au conseil d’administration ou aux assemblées générales, mais ça ne suffit pas aux fonctionnaires.

Du coup, on assiste à des scènes surréalistes et inimaginables dans une entreprise normale, à savoir qu’un ministre en mal de publicité peut faire n'importe quelle remarque sur la façon dont telle ou telle entreprise est gérée.  Parfois, il prend même l’envie au ministre de l'Economie de critiquer publiquement le salaire des PDG… Il y a six mois, c’est Carlos Ghosn, le président de Renault, qui a en pris plein la tète. La semaine dernière, c’est Carlos Tavares, le patron de PSA, qui a été secoué.

L'autre solution pour l’Etat serait de se libérer de ses participations ; et sans donner de conseils à ceux qui gèrent le patrimoine de l’Etat, l’idéal pour le contribuable serait quand même que l’Etat vende les titres quand ils sont au plus haut. Les valeurs boursières des participations de l’Etat sont chères aujourd’hui. Mais sur le papier seulement. 

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