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Lutte contre le racisme et l'antisémitisme : quand les bonnes intentions gouvernementales laissent soigneusement de côté les points de crispation qu'il faudrait pourtant dénouer pour avancer
©Reuters

SOS racisme

Si le Gouvernement fait sans doute preuve de bonnes intentions avec la semaine contre le racisme et l'antisémitisme, il semble malgré tout passer à côté des points de crispation qui caractérisent la société française aujourd'hui.

Guylain Chevrier

Guylain Chevrier

Guylain Chevrier est docteur en histoire, enseignant, formateur et consultant. Ancien membre du groupe de réflexion sur la laïcité auprès du Haut conseil à l’intégration. Dernier ouvrage : Laïcité, émancipation et travail social, L’Harmattan, sous la direction de Guylain Chevrier, juillet 2017, 270 pages.  

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Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Atlantico : Alors que le Gouvernement a lancé ce lundi la semaine de lutte contre le racisme et l'antisémitisme, ces combats ne sont-ils pas desservis pas une approche trop peu nuancée ? Ne fait-on pas souvent une confusion entre un racisme bien réel et l'expression d'une inquiétude socio-économique ou identitaire ?

Guylain Chevrier : S’il est question, avec cette nouvelle semaine antiraciste, de réagir à la banalisation de la parole raciste et antisémite, on se trompe de plus en plus de combat, par confusion.

Le terme "islamophobie" ou "négrophobie" plus récent, sont autant de détournement du combat antiraciste en victimisation, visant à rejeter toute critique des revendications communautaires et du multiculturalisme. La lutte antiraciste est une cause prenant pour référence un homme universel, au regard de droits interchangeables qui font des hommes avant tout des égaux, alors que le combat de ceux qui défendent les affirmations identitaires sont pour la reconnaissance des différences qui figent la société dans des groupes concurrents selon l’origine, la couleur ou la religion, levant des murs entre les individus. Une utilisation du combat antiraciste détourné de son sens, qui ne poursuit qu’un seul but, imposer le communautarisme.

Vendredi dans l'émission "Ce soir (ou jamais !)", le politologue Thomas Guénolé a lancé à la porte-parole du Parti des Indigènes de la République : "Vous êtes raciste, misogyne, homophobe" en réaction à son livre Les Blancs, les Juifs et nous, tout en dénonçant le fait qu’une partie de l’antiracisme est devenue raciste. Il ne date pas d’hier que des pseudos antiracistes utilisent la démocratie pour défendre des idées qui veulent la mettre au bûcher avec la République.

Faut-il rappeler que Nelson Mandela et l’ANC, son parti politique, n’ont cessé de mener ce combat antiraciste égalitaire en Afrique du Sud où les noirs étaient considérés comme inférieurs aux blancs, et exclus par le régime de l’apartheid des droits les plus élémentaires. Ils réclamaient l’égalité des droits, "one man, one vote !", et pas la séparation communautaire, qu’ils connaissent trop bien avec les townships, les bidonvilles où sont relégués les populations noires, relégation d’abord économique qui trouve sa justification dans le racisme. Pourtant, et il est terrible de le constater, il y a en France une complicité permanente des grands médias avec cette tendance à croire que la reconnaissance de la diversité culturelle serait la nouvelle grande cause à défendre, devant nous mener à une nouvelle étape de la démocratie. En réalité, comme l’explique Dominique Schnapper (Qu’est-ce que la citoyenneté ?, Gallimard), ancienne membre du Conseil constitutionnel, cela reviendrait à enfermer les individus dans leur particularisme, de les assigner à un groupe, à l’encontre de leur liberté personnelle et de leur possibilité d’échange, de mélange, avec les autres. Quelle impasse pour les droits humains !

L’historien Pierre Rosanvallon mettait en garde, dans son ouvrage sur La nouvelle question sociale dès 1995, sur le risque que la crise de notre cohésion sociale n’entraîne, avec la victimisation de certaines populations, une demande de réparations généralisées. Nous y sommes ! C’est la confusion totale autour de la lutte antiraciste mise au service de cette logique.

Alors que la France républicaine est l'un des rares pays qui a su dépasser ses contradictions internes en passant du colonialisme à l’égalité des droits pour tous, dans un mouvement vers l’avant constituant un progrès considérable qui a fait reculer en France, ce que l’on ignore trop souvent, massivement le racisme selon tous les observateurs dans ce domaine depuis trente ans, on ne cesse de monter des procès. Le film "Chocolat", qui prend pour thème le destin du clown Chocolat, premier artiste noir de la scène française, de Roschdy Zem, a donné lieu de ce côté à une surenchère totalement artificielle, le réalisateur parlant d’une volonté de réparer une injustice... Ce à quoi Omar Sy s’est malheureusement prêté, l'acteur expliquant que le racisme était toujours une réalité en France et que les acteurs noirs y étaient trop peu visibles. Il n’y a pourtant jamais eu autant d’acteurs "noirs" dans les films et spécialement dans les programmes télévisuels. Le CSA en 2008 a publié une enquête concernant les "minorités visibles" qui montrait déjà que, dans tous les genres de programmes, la représentation des personnes "vues comme Noires" atteignait 10%, la population non blanche atteignant 20% dans le divertissement, 19% dans l'information, 16% dans la fiction et 11% dans la fiction française, des scores importants supérieurs à la proportion des populations en référence en France. On voit que les propos victimaires tenus ici mériteraient de la part d’Omar Sy quelques nuances… On relève, dans la même enquête, que les classes populaires sont délaissées par la télé, les ouvriers ne représentant que 2% de la population observée alors qu'ils sont 23% dans la population française. Les employés : 16% alors qu’ils sont 30% dans la population.

Ce comédien se trouve être la seconde personnalité la plus aimée des Français, selon le baromètre qui l’évalue, alors qu’il affirme qu’il serait là bien le seul. On trouve pourtant parmi ces personnalités bien des noms reflétant les "minorités visibles" comme on dit aujourd’hui. Yannick Noah en fait partie, capitaine de l’équipe de France de tennis qui a été à plusieurs reprises avant Omar Sy personnalité préférée des Français. Quelle bévue ! Rappelons au passage que les plaintes pour discrimination se situent autour de 1500 par an, un chiffre relativement mesuré au regard d’une population de près de 67 millions d’habitants. Même en multipliant par dix ce chiffre, si on veut considérer que les discriminations ne sont pas toujours faciles à caractériser, on reste encore dans des proportions qui doivent amener à faire réfléchir, sur cette généralisation d’un racisme français par Omar Sy. Si aucune discrimination n’est tolérable, cette exagération est tout aussi insupportable.

Voilà ce que la semaine antiraciste sur le thème de "Tous unis contre la haine" ne questionnera pas. Rien d’étonnant à ce que certains se sentent pousser des ailes sous ces auspices pour transformer cette semaine antiraciste, sans retenue, en "semaine anticoloniale" !

Eric Verhaeghe : Les spots de propagande qui sont proposés aux spectateurs manient en tout cas les clichés et les stéréotypes. On y voit des musulmans attaqués par des jeunes Européens musclés habillés en noir. On y voit des Juifs attaqués par des jeunes banlieusards encapuchonnés. Les coupables sont clairement désignés. D'un côté, il y a de méchants Européens qui attaquent des musulmans sans défense. De l'autre, il y a de méchants Maghrébins qui attaquent des Juifs sans défense. Ces films expriment bien les grands fantasmes stéréotypés des quartiers bobo sur ce qu'est le racisme ou l'antisémitisme. Après une année marquée par des attentats qui visaient clairement les valeurs occidentales, et après une année marquée par une radicalisation inquiétante dans les banlieues, on se demande quelle mouche a piqué les concepteurs de ces films. S'il existe une menace raciste ou antisémite aujourd'hui, elle émane des communautés musulmanes qui véhiculent des préjugés inquiétants face auxquels les pouvoirs publics devraient réagir. En particulier, beaucoup de jeunes Musulmans ordinaires et non violents diffusent aujourd'hui l'idée simple selon laquelle la France est contrôlée par les Juifs, et que les Français sont dressés pour tuer des enfants musulmans sans défense au Moyen-Orient. Ce préjugé-là me paraît beaucoup plus inquiétant que les autres, parce qu'au-delà d'un racisme épidermique, il témoigne de la pénétration forte de doctrines nauséabondes, qui sont des "storytellings" lourds de sens. Face à l'émergence de ces croyances, la passivité des pouvoirs publics pose question. Manifestement, la campagne contre le racisme vise plus à rassurer ses concepteurs sur le fait que la France n'a pas changé depuis trente ans, qu'à lutter contre la forme contemporaine du racisme et de l'antisémitisme.

Est-il possible aujourd'hui de parler d'un type de délinquance qui serait le fait de populations de certaines origines ? Cette association n'est-elle pas nécessaire pour analyser des événements comme ceux survenus à Cologne, par exemple ?

Guylain Chevrier : On se rappelle du programme écrit par Christophe Nick et Gilles Cayatte, et présenté par le journaliste John Paul Lepers, diffusé le 25 novembre 2014 sur France 2, qui entendait prouver qu’il n’y avait aucun lien entre "immigration et délinquance", avec une campagne de sensibilisation aux allures de propagande. L’objectif de ce documentaire était de faire accepter l’idée que le lien entre immigration et délinquance n’existait pas, et que donc penser qu’il y en avait un correspondait à un racisme qui s’ignorait. Enorme manipulation !  

Il se trouve que les étrangers représentaient alors près de 18% des détenus en milieu carcéral tels que les chiffres du ministère de l’Intérieur le montrent, y étant donc surreprésentés. Les chiffres d'une enquête relayée par la revue Sciences humaines (Sciences Humaines -Les Grands Dossiers n°18 France 2010, les grands défis Mars-avril-mai 2010) prenant en compte les détenus français selon la nationalité du père montrent que dans "51% des cas, le père d’un détenu est né hors de France", et souvent est d’origine extra-européenne, ce qui ramène une certaine réalité crue.

Ce n’est pas en niant les problèmes qu’on peut y apporter des solutions. Selon un rapport Eurostat de 2013, être immigré en France signifierait avoir plus d'une chance sur deux d'être pauvre. Faut-il oublier dans ce constat que plus de la majorité des sans domicile fixe sont des étrangers, chose que l’on ne comprendrait pas si l'on ne se référait pas au fait que les deux tiers des demandeurs d’asile sont déboutés chaque année pour ne pas répondre aux exigences de ce statut, et se retrouvent en situation irrégulière, environ 40 000 personnes par an. Une situation qui ne favorise pas l’intégration sociale et professionnelle, évidemment ! Les 230 000 personnes qui arrivent de façon régulière par an sur notre territoire aujourd’hui, dont environ la moitié viennent de pays non-européens, doivent s’adapter, et on sait que la cause principale du chômage élevé des immigrés, deux fois plus que le reste de la population, est d’abord lié à un problème d’adéquation entre leur formation et le marché du travail, sans parler du manque de maîtrise de la langue française.

On voit bien que sans distinguer les causes de certaines difficultés, il est bien difficile de comprendre le moindre état des lieux, ce qui conduit par absence de compréhension des causes et des effets à systématiser la suspicion de racisme dès que l’immigration se trouve l’objet de critique, de façon totalement contre-productive.

A propos des événements survenus à Cologne, qui ont dévoilé une face cachée de l’immigration qui pouvait ne pas coller à l’idéal qu’entendait en donner Mme Merkel et les promoteurs d’une immigration sans frontière, on a vu s’enflammer certains esprits contre ceux qui osaient le dénoncer. L’écrivain et journaliste Kamel Daoud, suite aux agressions sexuelles de Cologne du 31 décembre expliquait dans une tribune que "Le sexe est la plus grande misère du monde d’Allah", laissant entendre que cette misère serait le terreau des agressions commises par des jeunes de culture arabo-musulmane. Connu pour son combat contre l’islam radical, cible déjà d’une fatwa, il s’est retrouvé traité d’islamophobe ! A front renversé, depuis les attentats de 2015 à Paris, le débat s’est terriblement crispé, avec une quasi-impossibilité d’aborder le sujet de l’islam ou de la laïcité sans se faire taxer d’islamophobe ou de laïciste. Dans le cas précis des événements de Cologne, on ne peut pas comprendre les agressions massives qui ont eu lieu sans se référer à une vision religieuse de l’inégalité hommes-femmes partagée par une partie des migrants, ces dernières n'étant considérées comme pures que lorsqu’elles se soumettent aux prescriptions religieuses, à la domination masculine, les autres étant impures, considérées comme sans moralité, et donc exposées à des agressions de ce type. Evidemment, cela ne concerne pas tous les immigrés qui à ce moment résidaient à Cologne, ni tous les musulmans, mais le fait a été assez massif pour qu’il soit nécessaire d’en dégager une analyse qui permette de comprendre ce qu'il s’est passé là et ne puisse se reproduire.

Eric Verhaeghe : Personne ne dispose aujourd'hui d'éléments susceptibles de donner du sens ou du corps à cette idée. Elle mérite donc d'être traitée avec prudence. Toutefois, il est évident que les quartiers à dominante musulmane sont aujourd'hui organisés autour de principes où se mélangent les revendications communautaires, les actes de délinquance et la conscience politique. C'est l'exemple bien connu des guet-apens tendus aux pompiers dans les quartiers, ou des attaques contre des voitures de police. D'une manière générale, les forces de l'ordre interviennent dans ces quartiers pour endiguer l'action de réseaux criminels ou délictueux, comme les trafics de drogue. L'intervention des forces de police suscitent des réactions violentes qui relèvent de la délinquance. Toute résistance des forces de police fait immédiatement l'objet d'une accusation d'islamophobie. L'étroite imbrication de la délinquance, de la violence et de l'islam dans les quartiers modifie fortement la donne communautaire. Les attentats du 13 novembre l'ont clairement montré : ils sont d'abord le fait de petits délinquants qui se radicalisent, et qui voient dans l'islam l'expression politique d'un rejet de la société occidentale que le basculement de la délinquance avait exprimé. Et c'est bien notre problème aujourd'hui : les stéréotypes officiels n'ont plus cours. La réalité du terrain est d'une nature beaucoup plus anxiogène : elle mêle le salafisme et la drogue, l'islam et la violence au quotidien. Le parcours d'un Salah Abdeslam l'illustre. Petit dealer, petit consommateur, grand frère de Molenbeek, Abdeslam finit terroriste, parce qu'entre gagner sa vie en revendant de la drogue et prendre les armes pour combattre l'Occident, la logique politique est la même. 

Comment évoquer le quotidien et la réalité vécue par les populations vivant près de certains quartiers à forte population immigrée sans être accusé de renforcer les préjugés racistes ? 

Guylain Chevrier : Il ne faut pas se taire, bien au contraire, il faut dénoncer les faits qui le justifient, c’est encore la meilleure des façons de lutter contre le racisme, le pire étant le silence, dans l’ombre duquel tout peut se faire. On voit que les choses commencent à changer dans cet état d’esprit avec la Brigade des mères (Nadia Remadna) ou le Collectif des Femmes sans voiles d’Aubervilliers, les positions courageuses de l’Observatoire de la laïcité de Saint-Denis, qui dénoncent le communautarisme local et les complicités de trop d’élus qui jouent avec le feu. Le communautarisme qui s’affirme dans certaines banlieues, sous l’encouragement d’un clientélisme politico-religieux mortifère, en arrive parfois à rendre invisible les autres populations qui, elles, entrent dans un anonymat forcé, déménagent lorsqu’elles le peuvent où restent tout en étant dans une rancœur sinon une colère qui ne peut que générer du rejet de l’autre, jusqu’au risque du racisme. Il faut pouvoir nommer les choses, pour ne pas laisser penser que l’on abandonne l’individu à une logique du droit à la différence qui conduit à la différence des droits, à ne plus penser qu’en termes de minorités. Ceux des populations des quartiers populaires qui ne se réclament de rien en tant que groupe identitaire, se retrouvent en situation de relégation encore plus que les autres, disqualifiés socialement et symboliquement désaffiliés.

On a ainsi abandonné la laïcité et favorisé la généralisation de l’idée que l’on pouvait faire passer ses valeurs religieuses avant les valeurs de la société, celles de la citoyenneté, de la République. Ce qui a été un séisme pour notre vivre-ensemble.

Le voile intégral qui heurte les consciences, à enterrer des êtres humains vivants au nom de la religion, n’aurait pas dû pouvoir être toléré un instant dans notre pays, qui n’est interdit que depuis octobre 2010. On se rappelle peut-être qu’à plusieurs reprises, des contrôles de femmes intégralement voilées ont tourné à l’émeute, comme à Marseille ou à Trappes, une partie de la population locale prenant la défense de ces femmes, en se mettant hors-la-loi. Un phénomène que l’on a laissé des années sans réponse, pourtant étroitement lié au salafisme qui a fait tant de mal dans nos banlieues, voie d’un endoctrinement qui conduit à la haine de la République et est l’antichambre de la radicalisation. Il faut dire stop ! C’est en rejetant cette logique de la primauté du droit à la différence sur le bien commun et l’intérêt général, sur les droits et libertés des individus, en faisant passer devant la reconnaissance des minorités visibles, la défense de l’égalité des droits, que l’on mènera au mieux le combat antiraciste.

Eric Verhaeghe : La pire façon de renforcer les préjugés racistes consiste à imposer des tabous et à interdire aux habitants des quartiers de décrire ce qu'ils vivent. Le silence imposé par les bobos sur la réalité des quartiers pauvres est le premier ferment de l'extrémisme. Seule la parole libère et permet d'endiguer la radicalité. De ce point de vue, l'accusation de racisme à tous bouts de champ fait le jeu des extrémismes, parce qu'elle oblige les victimes de comportements indésirables à se taire et à se tourner vers des aventuriers pour se faire entendre. Les victimes de ces comportements sont autant des immigrés que des Français autochtones. Il serait intéressant d'ailleurs d'enquêter auprès de la classe moyenne, lorsqu'elle est issue de l'immigration, pour comprendre ses comportements vis-à-vis des quartiers sensibles. Les stratégies de fuite ou d'évitement sont au moins aussi fortes chez les populations d'origine immigrée que chez les populations françaises. C'est pour cette raison que beaucoup d'écoles catholiques accueillent des musulmans : elles sont souvent la façon la plus sûre d'échapper au ghetto face au naufrage de l'Education nationale. Si la parole était donnée à ces immigrés qui font le choix de l'ambition et de la réussite sociale, on entendrait de leur part des discours identiques à ceux des "Français d'origine" sur la nécessité de garantir l'ordre et le respect, de promouvoir le travail, pour permettre à chacun de s'élever. Autrement dit, les populations immigrées tiennent souvent des discours très durs sur le désordre qui règne dans les quartiers et sur la complicité coupable des pouvoirs publics vis-à-vis des fauteurs de trouble. Cela me semble la meilleure façon de rappeler que la libre évocation de la souffrance quotidienne subie dans les quartiers est la seule voie pour l'enrayer et la combattre. Toute attitude de déni nourrit les préjugés racistes au lieu de les combattre.

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