CADES : l'idée absurde de boucher le trou de la Sécu en en creusant un autre<!-- --> | Atlantico.fr
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La France bouche des trous avec des trous, mais les trous nous coûtent de plus en plus cher.
La France bouche des trous avec des trous, mais les trous nous coûtent de plus en plus cher.
©Reuters

Bricolage mathématique

En mettant sous surveillance l’État français, Standard & Poor’s menace également la notation triple A de la CADES. Une mauvaise nouvelle pour cette institution financière supposée boucher le trou de la Sécu, et déjà endettée jusqu'au cou.

Simone Wapler

Simone Wapler

Simone Wapler est rédactrice en Chef des Publications Agora (analyses et conseils financiers).

Elle est l'auteur de "Comment l'Etat va faire main basse sur votre argent: ... et ce que vous devez faire pour vous en sortir !", paru chez Ixelles Editions en mars 2013.

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Savez-vous combien demandent actuellement certains prêteurs au  " triple A" français ? 7,5 %. Ça fait rêver, non, si vous comparez au taux de votre livret A ou au rendement de votre assurance vie en euros ?

Plus sérieusement, 7,5%, c’est le taux que les débiteurs jugés faibles et douteux se voient demander sur les marchés internationaux.

Le marché obligataire reste opaque pour les investisseurs particuliers. Les adjudications (processus de vente des obligations) se font entre les grandes banques, qui placent les obligations émises par les États ou les entreprises auprès des investisseurs institutionnels : autres banques, compagnies d’assurances, fonds. Les investisseurs particuliers que nous sommes ont rarement accès à ce marché en direct.

Si vous avez un broker (courtier en bourse)en ligne, vous constaterez que l’onglet "bond" ou "obligation" ne figure pas chez la majorité d’entre eux. Vous avez accès à quelques cotations, notamment sur le site du quotidien Les Échos.Mais il ne s’agit pas d’une cotation exhaustive.

Intéressons-nous aux obligations de la CADES (Caisse d'amortissement de la dette sociale). Au cas où vous l’auriez oublié, la CADES est une "structure poussière sous le tapis". J’entends par là un de ces nombreux organismes publics qui nous cache de la dette. Je laisse le soin à Philippe Herlin [1] de vous présenter cette merveille :

"Fruit de l’étonnante inventivité fiscale de nos hauts fonctionnaires, la CADES a été créée pour reprendre la dette de la Sécurité sociale en contrepartie d’un impôt spécifique : la contribution au remboursement de la dette sociale ou CRDS (0,5 % sur la quasi-totalité des revenus : travail, retraite, patrimoine) ; et quand la dette aura été apurée, cet impôt disparaîtra. (…) La CADES avait alors repris la dette de la "Sécu" (21 milliards d’euros, 137 milliards de francs à l’époque) qui avec les revenus de la CRDS aurait dû s’éteindre en janvier 2009 … On a dû manquer quelque chose. (…) Aux dernières nouvelles ce serait pour 2021 ».

Mais comment donc se fait-il que la CADES emprunte, vous demandez-vous, songeur ? Je n'en sais fichtre rien. Simplement, je note que la CADES est notée AAA, comme l’État français, et apparaît en tant que government agency sur les listings des grandes banques.

En allant sur le site des Échos, à la lettre " C", vous constatez que la CADES emprunte au maximum à 5,25 %. C’est déjà bien cher pour un triple A français.

Plus surprenant encore, en accédant aux listings des grandes banques étrangères (UBS et Crédit Suisse), vous vous apercevez que la CADES emprunte à 7,5 % (échéance février 2013, code 3831675).

Résumons-nous :

  • Une structure française censée résorber le trou de la Sécu emprunte. C’est déjà suspect.
  • Cette même structure, notée triple A puisque "comme l’État", paie 7,5 % d’intérêt. C’est encore plus louche.
  • 7,5 % c’est un taux bon pour le Portugal, l’Espagne ou l’Italie... Ce n’est pas officiellement un taux de triple A.


La France bouche des trous avec des trous, mais les trous nous coûtent de plus en plus cher.

Rien n’a changé. Déjà en 2008, les agences de notations étaient en retard. N’oubliez pas qu’elles notaient Lehman Brothers, Fannie Mae, Freddie Mac et AIG comme sains juste avant leurs faillites.

En 2011, les agences de notation sont moins en retard. C’est tout.

Mais dans les chiffres, la France a déjà perdu son triple A. Ce graphique publié par L’Agefile 22 novembre est éloquent :

Nous avons divergé de l’Allemagne début novembre.

Les taux vont continuer à monter. Peu importe qu’il n’y ait plus aucun triple A et que les agences de notation rabaissent tout le monde d’un cran. Les prêteurs vont se montrer de plus en plus exigeants avec les plus faibles. La France en fait partie.



[1] Philippe Herlin " France, la faillite" éditions Eyrolles


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