"Assises du produire en France" : un nécessaire retour en arrière pour un bond en avant ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Le député-maire UDI Yves Jégo et l'ancien ministre de l'Économie Arnaud Montebourg organiseront, le 10 et 11 septembre prochain à Reims, les premières "Assises du produire en France".
Le député-maire UDI Yves Jégo et l'ancien ministre de l'Économie Arnaud Montebourg organiseront, le 10 et 11 septembre prochain à Reims, les premières "Assises du produire en France".
©Reuters

Les entrepreneurs parlent aux Français

Le député-maire UDI Yves Jégo et l'ancien ministre de l'Économie Arnaud Montebourg organiseront, le 10 et 11 septembre prochain à Reims, les premières "Assises du produire en France". Mais relocaliser en France n'a absolument rien d'évident.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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Avant la France avait des couleurs. Trois exactement. Aujourd’hui, de colère, elle tend vers le rouge. La France est en ébullition et cela ne tue même plus les microbes. Le lait monte, se déverse sur tout ce qui l’entoure sans distinction, ni intelligence. La panique est mauvaise conseillère et fait paraître le premier charlatan venu comme un saint homme ou un saint esprit. Il est temps de revenir à l’équilibre. Trois couleurs, avec pourquoi pas, un bleu un peu prédominant. Comment ?

Avant de répondre sur le "comment ?", il faut toujours répondre au "pourquoi ?". Un bon ami Thierry Marx, le répète sans cesse, pour donner un destin à une équipe, une cohérence à un projet, il faut que chacun sache pourquoi il le ferait et le fait.

Pourquoi la France a t-elle besoin d’entreprises qui produisent en France ? La réponse pourrait sembler triviale, mais elle ne l’est pas. La production en France entraîne en amont et en aval une série d’effets vertueux, qui permettent de mettre la chair et les muscles sur le squelette, qui, autrement, est destiné à retourner à la poussière de sa création. Un exemple. Moins d’industrie en France entraîne une plus faible demande pour des écoles d’ingénieurs, pour des chercheurs, pour des fournisseurs, pour des salariés qualifiés, de l’ouvrier au cadre.

Enlevez cela et vos propres enfants n’auront plus, malgré leurs brillantes études et leur prépa réussie haut la main, aucun avenir dans notre pays. Les talents quittent alors le pays, vont alimenter la croissance des autres et progressivement votre pays, passe de la 5ème à la 6ème place mondiale, pour disparaître en moins de 20 ans, au niveau du Bengladesh aujourd’hui.

Moins d’entreprises, ce sont moins de taxes, locales, régionales et nationales, puisque les mailles du filet fiscal se sont abattues sans pitié sur nos boîtes depuis 20 ans pour combler les trous béants causés par l’incapacité de gestion des politiques. Moins de taxe, c’est moins d’Etat, ce qui sur le principe serait une bonne chose si c’était organisé dans un univers en croissance. Mais dans ce cas, c’est la dégradation des services publics, la fin des investissements, la fin de la solidarité, de nos infrastructures et au final, la dégradation de tout le système éducatif, du développement… Bref le chaos ! Le plus petit emploi perdu dans l’industrie, selon le principe de l’effet papillon, finit par entraîner la fin de notre modèle social et économique.

Relocaliser en France est d’ailleurs un problème, un enjeu peu évident. Pour les entreprises textiles par exemple. En effet, le départ du textile vers les terres où les enfants de moins de 12 ans offrent des perspectives de compétitivité accrues, aux grands groupes du secteur…(no comment) a entraîné la fin des formations à la couture, à l’assemblage. Le dirigeant de Smuggler, dernier fabricant de costumes français, nous confiait qu’il ne trouvait plus d’ouvriers qualifiés. Dès lors, relocaliser en France est un très joli concept mais vide de sens, quand on a perdu les hommes, les formations, les structures qui sont nécessaires, en amont et en aval à la réussite du projet.

Il n’y a plus de fabricant de tissus en France à titre d’exemple ! L’Italie a su les préserver, elle. L’Italie ce n’est pas que la camorra et les pizzas au feu de bois. C’est un tissu de PME familiales qui ont su préserver un savoir-faire comme on préserve l’oxygène pour respirer.

Arnaud Montebourg a souvent provoqué des comas traumatiques, chez tous les entrepreneurs français, par ses déclarations à l’emporte pièce, ses lubies de nationalisation ou son déni de réalité dans l’affaire Dailymotion. Ses promesses faites à grand renfort de discours proches de celle de l’oncle aviné en fin de mariage ont fait bondir les moins éduqués d’entre nous. Mais on doit le lui reconnaître, il porte bien la marinière ! Il a brandi la fierté de produire française comme un étendard et tous les producteurs gaulois le portent dans leur cœur. Il a depuis fait un stage de méditation managériale dans un temple du management, ce qui l’a conduit à voguer vers le privé à la vitesse "des lumières", soudain inspiré par le renouveau du pays par ses entreprises.

Yves Jégo a lui aussi senti le bon filon. Il a suivi une formation textile accélérée et tissé rapidement une organisation dédiée au made in France pour lutter contre ce que Dutronc appelait le "merde in France". Il porte lui aussi le sujet sur le côté droit de l’assemblée nationale, ce qui équilibre le jeu politique.

Chacun ayant réalisé qu’il voguait sur le même fleuve, les deux rameurs ont décidé de ramer dans le même sens et ont lancé le concept des Assises du produire en France. Définition, explication de texte, exemples concrets, échange d’expérience, témoignages d’entreprises françaises ou étrangères qui produisent en France. Bref le 10 et 11 septembre à Reims, nous fêterons le made in France au champagne et espérons sortir euphorique pour des raisons qui ne soient pas viticoles…

Trajectoire différente mais tout aussi louable, utile et surtout très impactante, pour la renommée du made in France, nous avons à 8000km de chez nous, sur Times Square, rien que cela, le Best of France, voulu par Paul Bensabat, le président des CCE (*Conseillers du commerce extérieur) aux USA, entrepreneurs et fervent défenseur de la France qu’il n’oublie jamais du haut de ses 30 ans passés aux USA. Exposer en plein centre de Manhattan, à l’air libre, avec l’aide de son complice Rod, entrepreneur français aux USA depuis 20 ans, le meilleur de la France à 500 000 visiteurs, est une Ode à notre pays, et pour une fois nous n’attacherons pas les Druides, nous les décorerons ! Le 25, 26 et 27 septembre à New York.

Tout cela signifie que nous devons tous détricoter le mauvais gilet que nous avons conçu en poussant à la perte du rôle du marché, en épousant une bien mauvaise fille nommée pouvoir d’achat, qui s’est longtemps prostituée pour offrir les charmes de prix toujours plus bas, poussant à la délocalisation de nos emplois dans des pays lointains. Deux minutes de plaisir et une éternité de regret. Nous avons tout fait pour privilégier la grande distribution, créatrice d’emploi, garant de réélection pour les politiques et ainsi tué les petits, les gueux, les PME, artisans, producteurs, éleveurs, industriels, qui sous pression de prix toujours plus bas, ont renoncé à investir, faute de moyens, signant ainsi leur mort à terme, et faisant perdre à notre pays sa capacité industrielle. Mal payés et payés en retard. Jetés comme des moins que rien, à la moindre humeur de son donneur d’ordre ou unique client, ces PME n’ont pu nous donner le ETI dont nous avons besoin pour muscler notre pays maigrelet, alors que nous aurions dû être les champions français de la création d’entreprises rayonnantes.

Il faut tout refaire. Différemment. Retour vers le passé en tenant compte du présent et des enjeux d’avenir. Redonner goût à la recherche de l’excellence et de la valeur ajoutée. Donner aux consommateurs, le goût au fait de payer pour recevoir la qualité en partage. Accepter de traiter mieux l’étranger qui enrichit notre pays que le Français qui le maltraite. En clair, la nationalité de la création de valeur dans notre pays n’a pas d’importance. Mieux vaut acheter une Toyota fabriquée en France qu’une Dacia faite en Roumanie. Produire et consommer de la qualité, de la haute technologie, à forte valeur ajoutée, qui contribue au rayonnement de la France dans le monde et mette de l’huile sur le redressement de la courbe de notre commerce extérieur.

Ces initiatives sont la preuve d’un monde qui se réveille enfin d’un long sommeil. Espérons que plus de princes charmants viendront embrasser les belles endormies. Nous en avons plein les placards et ne voulons pas finir au placard !

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