Non, le libéralisme n'est pas la putain du capitalisme !<!-- --> | Atlantico.fr
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Montrer son argent est une vraie faute de goût au pays qui a inventé les « nouveaux riches » après avoir guillotiné les vieux aristos…
Montrer son argent est une vraie faute de goût au pays qui a inventé les « nouveaux riches » après avoir guillotiné les vieux aristos…
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La galaxie libérale s'est réunie à Paris ce mercredi soir. Pourquoi le libéralisme est-il cet éternel mal aimé des Français ?

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon est présidente du Mouvement ETHIC (Entreprises de taille Humaine Indépendantes et de Croissance) et chef d’entreprise (SDME).

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Accusés de tous les maux dont souffre la civilisation, responsables de tout depuis la faim dans le monde jusqu’au trafic de drogue, les libéraux sont accusés d’exploiter l’homme et de générer la misère du monde en la détournant à leur profit.

Le libéralisme : la putain du capitalisme ! Car il est admis que le capitalisme est tout de même incontournable, n’en déplaise à notre culture égalitariste qui entretient en permanence une lutte des classes transformée en jalousie sociale. Le libéralisme, lui, heurte les convictions françaises et notre rapport à l’autre ; notre héritage Colbertiste, nos traditions républicaines (mal interprétées) et même notre savoir-vivre bourgeois ! « On ne parle pas d’argent », « on ne demande pas à quelqu’un combien il gagne ? », on regarde l’entrepreneur avec méfiance, le patron avec suspicion, l’argent (des autres) avec mépris, en gagner n’est pas très élégant, le montrer une vraie faute de goût au pays qui a inventé les « nouveaux riches » après avoir guillotiné les vieux aristos…

L’État, seul, est noble : lui seul est notre berger. Il peut nous guider, rétablir les injustices, bien gérer des entreprises, nous soigner, nous nourrir (sainement), nous loger (un droit), nous empêcher de boire et de fumer, etc. « L’Etat providence » : le mot est lâché ; un modèle français, une exception culturelle… Une histoire d’amour, seuls au monde : mon Etat et moi ! Nous avons déclaré une mauvaise guerre : se battre contre l’émancipation économique mondiale, lutter contre la « concurrence » (pas loin d’être un gros mot surtout si on « l’ouvre », on aime bien la concurrence « fermée » !). On veut bien exporter mais pas délocaliser, accueillir les pauvres étrangers mais pas leur donner du travail chez eux. Et c’est ainsi que nous avons peu à peu entravé notre dynamisme, fait perdre confiance et optimisme à chacun d’entre nous et alourdit nos structures, notre code du travail, nos voies administratives.

Et pourtant le libéralisme bien compris est un contrepoison à notre système enkysté. Redonner de la liberté aux individus, les responsabiliser donc les enthousiasmer. Arrêter de sanctifier la puissance publique c’est reprendre confiance en soi-même.

La faillite des Etats devrait quand même  nous amener à revoir nos positions ! Mais oui, l’Etat peut faire faillite, mais non, le dogme qu’adorent les extrêmes, « quand il n’y a plus d’argent, il y en a encore » est un mensonge tenace et scandaleux (on continue de promettre des emplois publics).

Alors, oui, il faut remettre à plat nos a priori français avant même de vouloir réformer car pour accepter les réformes, il faut comprendre.

C’est le moment aussi de faire un mea culpa sur l’autre extrême idéologique : l’absolue confiance dans le marché. Personne n’est infaillible ni incorruptible. Oui, la Finance, telle la grenouille qui voulait être plus grosse que le bœuf, a éclaté. Oui, « on était bien content que l’Etat soit là pour nous sauver » mais il faut accepter que l’équilibre ne soit jamais acquis, les abus toujours menaçants et les contrôles indispensables. La seule unique campagne à mener, celle qui nous donnera cette « stratégie politique » que nous réclamons à cor et à cri, c’est la définition précise, pédagogique de ce que doit être le rôle de l’Etat. Personne n’est capable aujourd’hui de le dire et c‘est là que réside notre choix de société. Pourquoi avoir peur que l’Etat se dessaisisse de certains champs d’actions qu’il gère mal ? Pourquoi avoir peur de redire que l’Etat n’ait pas de ressources sinon celles qu’il prélève sur les richesses créées par les seuls entrepreneurs ? Pourquoi ne pas faire confiance aux Français ?

Est-ce si difficile de définir avec précision les missions régaliennes de l’Etat ? Ou doit-il intervenir seul et sans état d’âme ? Qu’est-ce que le « devoir de l’Etat » ? Que peut-il confier au secteur privé tout en continuant d’assurer les mêmes services rendus au public (même cahier des charges, plus d’efficacité, moindre coûts…).

Les libéraux ne doivent pas baisser la tête, ils ne s’appellent pas tous Madoff ! Les Etats sont faillibles ; oui, ils sont mal gérés (comme certaines entreprises !). Oui, les politiques sont aussi corrompus que les autres (mais plus !). Cette déroute Européenne momentanée est l’occasion unique de faire un travail intellectuel sur notre modèle. Un idéal d’égalité et de fraternité en s’impliquant soi-même. La complexité économique et financière qui nous inquiète à juste titre ne se résoudra pas avec des œillères, il faut savoir revenir sur des mensonges confortables que personne n’ose prendre le temps d’expliquer, notre rapport au temps de travail qu’il s’agisse du temps hebdomadaire ou de l’âge des retraites en est le meilleur exemple… le « contrat » dans notre pays n’est pas valorisé car c’est un rapport direct entre une entreprise et un salarié et que le salarié est forcément victime et que seul l’Etat saurait ce qui est juste et bon…

Notre refus de la vraie liberté individuelle est inversement proportionnel à notre revendication de liberté républicaine. Nous faisons dans la foulée une confusion entre « libéralisme économique » et « libéralisme des meurs ». Tout libéral serait un libertaire sans foi ni loi.

Qui fera preuve du désintéressement et du patriotisme nécessaire pour faire confiance au peuple mais en expliquant que notre pays doit s’émanciper de lui-même pour redonner de l’élan aux forces vives ? Il ne s’agit pas de renoncer à nos valeurs mais bien de se les réapproprier, nous les avons « déléguées » à l’Etat. Le contraire du libéralisme c’est, hélas, la grande tentation actuelle : laisser juste de l’argent de poche aux Français pour qu’avec le reste prélevé, l’Etat s’occupe des choses sérieuses… C’est bien sûr le contraire qu’il faut envisager : un Etat garant mais pas un Etat gérant. Le libéralisme doit être un nouvel humanisme sans frontière et que tout soit mis en place pour éviter les dérives propres à tous les systèmes. C’est un préalable incontournable, indispensable, sans lequel jamais nous ne sortirons d’une crise de notre relation au travail, à l’argent, au pouvoir, à la vie…

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