Pourquoi manger ses crottes de nez est bon pour la santé<!-- --> | Atlantico.fr
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Manger ses crottes de nez renforce notre système immunitaire.
Manger ses crottes de nez renforce notre système immunitaire.
©Reuters

Contre-intuitif

Interdit par notre éducation, manger ses crottes de nez, c'est dégoûtant un point c'est tout. Pourtant, un scientifique canadien a récemment expliqué comment cette pratique pouvait avoir des effets positifs sur la santé, notamment en renforçant le système immunitaire.

Nicole  Delépine

Nicole Delépine

Nicole Delépine ancienne responsable de l'unité de cancérologie pédiatrique de l'hôpital universitaire Raymond Poincaré à Garches( APHP ). Fille de l'un des fondateurs de la Sécurité Sociale, elle a récemment publié La face cachée des médicaments, Le cancer, un fléau qui rapporte et Neuf petits lits sur le trottoir, qui relate la fermeture musclée du dernier service indépendant de cancérologie pédiatrique. Retraitée, elle poursuit son combat pour la liberté de soigner et d’être soigné, le respect du serment d’Hippocrate et du code de Nuremberg en défendant le caractère absolu du consentement éclairé du patient.

Elle publiera le 4 mai 2016  un ouvrage coécrit avec le DR Gérard Delépine chirurgien oncologue et statisticien « Cancer, les bonnes questions à poser à mon médecin » chez Michalon Ed. Egalement publié en 2016, "Soigner ou guérir" paru chez Fauves Editions.

 

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Atlantico : Comment expliquer que manger ses crottes de nez soit effectivement bon pour la santé ?

Nicole Delépine : Au-delà du caractère amusant de cette question, l’hypothèse du Professeur Scott Napper dont les publications scientifiques attestent de son sérieux, parait logique. Si on ne parle plus de crottes de nez, de gestes disgracieux et impolis en public et d’idées reçues, mais de mucus nasal plus ou moins asséché, on peut aborder le problème sans susciter l’hilarité.

Le mucus nasal s'agglomère avec les particules inhalées contenant  bactéries, virus, poussières  et  devient, une fois séchée, les fameuses "crottes de nez". Le mucus filtre les bactéries et poussières inhalées. Le reste du mucus s'écoule dans la gorge pour être digéré par l'estomac et en l’occurrence conservé dans l’organisme. Ce mucus va maintenir humide la muqueuse olfactive qui tapisse la cavité nasale et nous permet de sentir (plus ou moins bien !). A nous les plaisirs des parfums variés, des fleurs ou des aliments.

Notre système nasal, "climatisatiseur privé" naturel  humidifie l’air. Plus l’environnement est pollué, plus votre mucus nasal sera épais, noirâtre et important, en résumé plus vous fabriquerez de crottes de nez. En cas de grippe ou d’infection respiratoire haute, le mucus  deviendra jaune ou blanc, témoignant de la présence importante de  globules blancs visant à vous défendre.

Dans quelle mesure cela peut-il améliorer nos défenses ?

1 - Par filtration

Le mucus nasal est un fluide protecteur secrété par les membranes du nez. Il en fabriquerait  chez l’adulte un volume évalué une  tasse chaque jour (bien plus en cas de rhume) et contribuerait à  protéger les poumons des risques d’infections. Aidé des poils des narines, le mucus constitue  un excellent système de filtration. 

2 - Auto-vaccination  et production d’anticorps

Plus notre organisme est en contact avec les germes,et tous organismes composant notre univers et singulièrement notre environnement proche, plus il est capable de "se vacciner " lui-même en produisant des anticorps capables de neutraliser les antigènes des bactéries ou virus rencontrés.

C’est une des raisons pour lesquels de nombreux chercheurs se battent pour éviter les vaccinations chez les nouveau nés et  petits enfants pour leur laisser le temps de fabriquer eux –mêmes leurs propres défenses et singulièrement anticorps. 

Que contiennent concrètement les crottes de nez ? Quel type de saleté y trouve-t-on ?

Le mucus normal contient 95 à 97 %d’eau associée à des protéines (1 %de glycoprotéines), des lipides (1 %) et des ions. Il va s’enrichir des poussières et tous agents étrangers qu’il rencontre.

Le mucus nasal qui sera  absorbé ou bien rejeté sous forme de crottes de nez semblent bien avoir une fonction  importante  qui contribue à l’immunité  naturelle et à protéger les poumons. Les glandes fabriquant le mucus nasal  contiendraient comme toutes les glandes sous muqueuses des voies aériennes supérieures des protéines anti-oxydantes, anti –inflammatoires anti microbiennes etc (1).

Parmi les principaux composants du mucus, figurent les glycoprotéines, ou mucines, de très haut poids moléculaire  très riches en sucres, très complexes. En microscopie électronique, les mucines purifiées se présentent comme de longues chaînes flexibles, de longueur très variable.

Une telle hétérogénéité des structures  pourrait, selon Roussel, constituer une mosaïque de sites récepteurs permettant de piéger les micro-organismes ensuite éliminés par le jeu de l’activité mucociliaire.

Ces protéines du mucus bronchique  interviennent  ainsi dans la défense de la muqueuse bronchique, en association avec l’épuration mécanique des voies aériennes assurée par les cils.

Parmi les protéines antibactériennes,  les immunoglobulines (Ig A) sont largement présentes et importantes ainsi que d’autres  le lysozyme, la peroxydase, la transferrine et l’inhibiteur bronchique, principal inhibiteur de protéase synthétisé par la muqueuse bronchique.

D’autres molécules à activité enzymatique, des peptides et des phospholipides présents, peuvent intervenir directement dans la fonction antibactérienne et antioxydante du mucus.

Le glutathion (GSH) est un composant antioxydant majeur  bien connu et est présent dans le mucus.

Ce mucus respiratoire est mobilisé en permanence par le mouvement ciliaire des cellules ciliées, à une vitesse qui croît depuis les bronchioles jusqu’à la trachée.

En conclusion, comme la muqueuse respiratoire est en permanence  soumise à de multiples agents agresseurs (gaz et particules toxiques, bactéries, virus, allergènes...) inhalés au cours de la respiration, le mucus nasal  est essentiel à la première barrière tant mécanique que biologique contre tous ces agents extérieurs contaminants.

Il n’est donc pas physiologiquement nécessaire d’empêcher les enfants de manger leurs crottes de nez, sucrées de surcroit, ce qui nécessite néanmoins de leur demander de rester corrects et d’éviter ce jeu en public pour des raisons évidentes de politesse mais pas pour des raisons médicales.   Comme pour  l’excès de mesures d'hygiène remise en cause par  l'augmentation de la prévalence des allergies et de l'asthme, un juste milieu est sûrement à trouver et surtout à adapter aux conditions de vie des enfants. L'excès d'hygiène, la prise trop fréquente d'antibiotiques et les vaccinations favoriseraient la survenue de maladies allergiques, auto-immunes et inflammatoires en diminuant les contacts avec les microbes pendant l'enfance. On peut supputer que les discussions  dures ne font que commencer  et que c’est un autre sujet de débats…

(1) PLoS One. 2015 Feb 23;10(2):e0116756. doi: 10.1371/journal.pone.0116756. eCollection 2015.

Proteomic analysis of pure human airway gland mucus reveals a large component of protective proteins.

Joo NS1, Evans IA2, Cho HJ1, Park IH1, Engelhardt JF2, Wine JJ1.

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