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Chevènement candidat : le souverainisme, nouveau trotskisme
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Zone franche

La France se distinguait autrefois par une profusion de mouvements trotskistes concurrents. Désormais, la mode est à la sous-segmentation souverainiste. Et Pasqua, il attend quoi ?

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Il ne manquait plus que lui ! Jean-Pierre Chevènement, souverainiste historique du parti socialiste devenu patron de sa propre petite boutique aux horreurs, est donc candidat à la présidentielle

A soixante-douze printemps, l’inventeur (et contempteur) du concept de « gauche américaine » ― dont François Hollande serait probablement un représentant très honorable ―, fait au pays le don de sa personne et vient se ranger au côté des Mélenchon, Dupont-Aignan et Le Pen pour défendre la France d’antan contre les assauts de l’européo-libéralo-mondialisme.

Quoi qu’on pense du personnage, qui n’a certainement pas dit que des bêtises tout au long de sa carrière mais dont on voit mal ce qu’il peut nous raconter que ne hurle pas déjà le reste du gang depuis des mois (on n’entend plus Montebourg, c’est toujours ça), on hésite entre félicitations bienveillantes et embarras poli.

Félicitations bienveillantes parce qu’entrer dans une danse pareille à son âge, lorsqu’on est un ancien ressuscité de l’empoisonnement au curare et que l’on n’a strictement rien de spécifique ou de nouveau à apporter au débat, c’est courageux. L’embarras poli, hum, eh bien c’est exactement pour les mêmes raisons...

Notez que la dernière fois qu’il a tenté sa chance, c’était en 2002 et les historiens se tâtent encore pour déterminer qui, de lui ou de Christiane Taubira, a le plus contribué à renvoyer Lionel Jospin dans ses foyers. Moi j’ai toujours penché pour la seconde, mais c’est vraiment une affaire de point de vue.

Mais qu’importe, l’ancien ministre spécialiste de l’évasion fracassante (« Un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne ») ressent le besoin de proposer son propre scénario de la fin de la monnaie unique et du retour à la souveraineté budgétaire de la France ― qu’il subodore apparemment distinguable de celle des collègues...

25 façons différentes de prononcer Maastricht

Loin de moi, pour autant, l’idée de m’offusquer de l’existence d’un discours aussi autiste à l’égard de la façon dont le monde s’est transformé depuis de Gaulle et le Conseil National de la Résistance (les deux top-références des souverainistes, à gauche comme à droite).

Si des gens ont envie de se bagarrer pour ces idées, qu’ils le fassent. C’est la démocratie telle qu’on l’aime.

Non, ce qui surprend, c’est qu’ils soient si nombreux à proposer exactement la même vision à un ou deux détails près mais chacun dans son coin. OK, je veux bien extraire la Marine de cette flotte-là, puisqu’elle est la seule à pouvoir être véritablement rangée à l’extrême tribord, mais pour le reste…

Finalement, c’est un peu comme lorsque la France comptait 25 mouvements trotskistes différents, tous partisans de la doctrine du barbichu mais amateurs d’exégèse différentes. Aujourd’hui, la LCR s’est muée en un NPA sans projet ni leader, à LO ; Nathalie Arthaud fait comme la Florence homonyme et attend d’être sauvée de la noyade par la providence ; l’ancien candidat du parti des travailleurs (PT, rebrandé en POI), instaure des « couvre-feux pour lutter contre la délinquance immigrée ».  

Pour ne rien dire de la myriade de groupuscules moins médiatisés mais tout aussi convaincus de détenir « la vérité » et distribuant le journal du même nom aux sorties du métro parisien.

Chevènement candidat, de fait, c’est au moins la promesse de débats animés et de petites phrases bien chantournées en cascade. La question que l’on se pose tout de même, forcément, c’est combien de temps il faudra attendre pour que Charles Pasqua fasse lui aussi son grand retour et promeuve sa différence  : je crois qu’il ne prononce pas Maastricht exactement de la même manière.

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