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La relaxe de Jean-Noël Guérini, une très mauvaise nouvelle pour le PS
©Reuters

La vie en rose

Après sa relaxe dans une affaire de licenciement de complaisance, le sénateur Guérini, galvanisé par le bon score de ses candidats aux sénatoriales de septembre, se prépare pour les cantonales du printemps 2015. Sa bannière : "La Force du 13" et non plus le PS dont il a démissionné. Mais 2015 devrait être l’année de son procès. A moins d’un coup de théâtre, il affrontera le Tribunal correctionnel, en compagnie notamment de son frère Alexandre.

Gilles Gaetner

Gilles Gaetner

Journaliste à l’Express pendant 25 ans, après être passé par Les Echos et Le Point, Gilles Gaetner est un spécialiste des affaires politico-financières. Il a consacré un ouvrage remarqué au président de la République, Les 100 jours de Macron (Fauves –Editions). Il est également l’auteur d’une quinzaine de livres parmi lesquels L’Argent facile, dictionnaire de la corruption en France (Stock), Le roman d’un séducteur, les secrets de Roland Dumas (Jean-Claude Lattès), La République des imposteurs (L’Archipel), Pilleurs d’Afrique (Editions du Cerf).

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  • Le sénateur (ex-PS) des Bouches-du-Rhône depuis 1998 vient d’être relaxé dans une affaire relativement mineure. Le parquet avait requis un an d’inéligibilité ;
  • Cette victoire judiciaire lui redonne du punch pour les cantonales de mars 2015. Ses listes seront parrainées par "La Force du 13", le nouveau parti qu’il vient de lancer ;
  • Le second procès qui l’attend, sans doute, en 2015 où il devrait, à moins d’un coup de théâtre, être renvoyé pour association de malfaiteurs, trafic d’influence et détournement de fonds publics ne sera pas un long fleuve tranquille ;
  • En attendant, Jean-Noël Guérini reste incontournable à Marseille face à l’UMP et au Front National.

Il est des relaxes qui valent des victoires politiques. Celle obtenue, le 8 décembre, par Jean-Noël Guérini, sénateur et président (ex-PS) du conseil général des Bouches-du-Rhône dans cette histoire du faux licenciement qui aurait profité à Jean-David Ciot, premier secrétaire du PS des Bouches-du-Rhône, en est une (ce dernier a également été relaxé).

Le parquet de Marseille, pourtant, avait requis un an d’inéligibilité contre Guérini, 6 mois de prison avec sursis et 15 000 euros d’amende pour avoir organisé ce licenciement apparemment bidon. "Les faits ne sont pas caractérisés" a estimé le Tribunal. Exit l’abus de confiance.

Dans le climat actuel qui règne au PS local, Jean-Noël Guérini a tout lieu d’être confiant pour la suite, car une part non négligeable d’élus socialistes bénéficie de son soutien au sein du parti qu’il a lancé et a pour nom "Force du 13". Un mouvement qui ne vit que grâce à sa cotisation de 15 euros par adhérent et ne peut compter sur le moindre argent public. "Force du 13" marque des points chez les socialistes qui n’ont pas retrouvé un Gaston Defferre ou un Michel Pezet pour mener les batailles à venir. Déjà, au niveau des sénatoriales de septembre dernier, le président du conseil général des Bouches-du-Rhône qui a préféré quitter le Parti en avril dernier avant d’en être exclu, a toutes les raisons de se réjouir : la liste qu’il parrainait, "Faires gagner les Bouches-du-Rhône", a obtenu 3 sièges sur les huit du département, ce qui lui a permis non seulement de retrouver son siège, mais au maire des Pennes-Mirabeau, Michel Amiel et à celui de Meyrargues, Mireille Jouve, de faire leur entrée au Palais du Luxembourg. Quant au PS, il a failli être bredouille, seule la pugnace Samia Ghali, "La Madone de Marseille", jadis partisane de Guérini, ayant réussi in extremis à conserver son siège. 

Pour les cantonales de 2015, Jean-Noël Guérini peut voir l’avenir en… rose : d’ores et déjà, il peut compter non sur le soutien des 22 conseillers généraux (PS et Parti radical de gauche) mais aussi sur quelques élus de droite comme Jean Limousin, le maire de Tarascon. Et comme le député Patrick Mennucci qui espérait être le leader naturel du PS local a été sévèrement battu par Jean-Claude Gaudin aux municipales, les socialistes marseillais qui savent ce qu’ils doivent à Guérini continuent à se jeter dans les bras de leur mentor et bienfaiteur.

Aujourd’hui, le PS local n’est pas prêt de retrouver un leader. Exit Mennucci qui ne se présenterait pas, paraît-il, se présenter aux cantonales. Exit aussi Samia Ghali qui, malgré son énergie, ses idées iconoclastes - le recours à l’armée pour maintenir l’ordre dans les cités - ne parvient pas à séduire à l’intérieur de son propre camp. Exit Marie-Ange Carlotti, ancienne ministre de Jean-Marc Ayrault, battue aux primaires pour la candidature à la mairie de Marseille, qui vient de voir rejetés ses comptes de campagne pour les municipales.

Reste un homme, jadis héritier de Gaston Defferre : Michel Pezet, avocat talentueux, très attaché aux libertés publiques, qui croit à une certaine éthique. Un opposant farouche au système Guérini. Mais il n’est que conseiller général. Et si d’aventure, il avait quelques velléités de ressurgir sur le devant de la scène, il trouverait inévitablement sur son chemin Jean-Noël. A ceux qui en douteraient, ce dernier s’est montré d’une rare violence lors d’une récente séance du conseil général : "Me Pezet, a-t-il lancé, je tiens à vous dire : la différence entre la Force du 13 et vous, c’est que vous êtes seul et que la Force du 13 représente des milliers de femmes et d’hommes. Alors, soyez rassuré : nous n’avons pas besoin de vos conseils. Restez tout seul avec vos pathétiques et sempiternels discours." Guérini en a-t-il pas trop fait ? A-t-il mesuré que le boomerang pourrait être terrible ? Autant dire, que dans ce vide abyssal qui frappe le Parti socialiste marseillais - dirigé faut-il le rappeler par Jean-David Ciot, proche de Guérini - et la mollesse de la rue de Solférino à l’égard de la Fédération, le sénateur,- élu conseiller municipal de Marseille sur les listes Defferre en 1977 à l’âge de 26 ans - a un boulevard, comme celui de La Canebière, pour l’emporter l’année prochaine. Et rester le patron du département. Sauf que 2015 sera peut-être l’année de son procès où il devrait être présent sur les bancs du Tribunal correctionnel au côté de son frère Alexandre. Le procès n’aura rien à voir, cette fois, à celui qui a conduit le 8 décembre, à sa relaxe. Il n’aura rien d’un long fleuve tranquille. Car les deux frères ont de grandes chances d’être jugés pour association de malfaiteurs, trafic d’influence et détournements de fonds publics. Mais ils ne seront pas seuls. Tous ceux qui ont bénéficié du clientélisme mis en place par le duo, - on y trouve une figure du milieu marseillais - ou ont participé à toutes sorte de dérives présumées - marchés truqués, passe-droits - seront présents. Certains, muets ou peu bavards devant le juge d’instruction Charles Duchaine qui, malgré les tentatives d’intimidation, a conduit son enquête sans coup férir, seront sans doute prêts à se mettre table. L’un d’entre eux a comme avocat Michel Pezet. Lequel ne se privera pas à son tour d’interpeller sèchement l’ex-camarade Jean-Noël.

Pour l’heure, rasséréné par sa relaxe, ce dernier préfère penser à autre chose. Ou faire semblant. Pour répéter ce qu’il avait déjà dit en réponse à Arnaud Montebourg qui dénonçait le 7 juillet 2011 dans L’Echo républicain de Chartres le système affairiste qui régnait au sein du PS marseillais : "Il y a 57 élus socialistes, maires de grandes villes, parlementaires ou présidents de conseils généraux qui ont été mis en examen et qui continuent à occuper d’éminentes fonctions…"

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