Gel des salaires et cie : pourquoi les réformes de structure voulues par Emmanuel Macron sont malheureusement surtout des recettes déflationnistes<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Les réformes de structure voulues par Emmanuel Macron sont surtout des recettes déflationnistes.
Les réformes de structure voulues par Emmanuel Macron sont surtout des recettes déflationnistes.
©Reuters

Dans l’enfer des bonnes intentions

Selon les informations de l'hebdomadaire allemand "Der Spiegel", le rapport commandé par les gouvernements français et allemand, qui sera dévoilé ce jeudi 27 novembre, devrait accoucher de propositions chocs : remise en cause des 35 heures, flexibilisation du marché du travail, et gel des salaires pendant 3 ans.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

Voir la bio »

Si ces propositions ne sont pas exhaustives, elles constituent le volet « français » du rapport, c’est-à-dire les mesures considérées comme nécessaires pour le redressement de l’économie du pays. En contrepartie, le volet « allemand » des propositions concernerait la mise en place d’investissements supplémentaires par le gouvernement d’Angela Merkel.

Si une seule idée doit émerger des trois propositions faites, il s’agit bien entendu de celle du coût du travail. En effet, l’idée de réformer les 35 heures a pour objectif d’allonger la durée du travail pour le même prix, ce qui revient à baisser le coût horaire du travail.La « Flexibilité » procède du même objectif puisqu’il s’agit, en l’espèce, de faire peser une plus grande part du risque conjoncturel sur les épaules du salarié. Puis, le gel des salaires pendant trois ans qui a l’avantage d’être clair, ici on ne cherche pas à noyer le poisson : l’idée est de baisser le coût du travail sur la durée.

En résumé, ce sont trois mesures différentes ayant cet objectif commun qui est la baisse du coût du travail. Pour juger de l’opportunité de telles mesures, il est alors tout naturel d’évaluer la problématique du coût du travail en France. Est-ce réellement le problème ?

Il est possible de répondre à cette question en trois points. Le cout du travail français est-il un problème vis-à-vis des pays extérieurs à la zone euro ? Le fait que la balance commerciale française hors zone euro soit proche de l’équilibre ne plaide pas en ce sens. Il est souvent ignoré que si la balance des biens est très déficitaire, celle des services est excédentaire.

Par rapport aux autres pays de la zone euro ? Ici, la balance commerciale est déficitaire, mais elle l’est principalement vis-à-vis de l’Allemagne, c’est-à-dire le pays le plus proche de la France en termes de coût du travail. Pour être plus précis l’institut COE-REXECODE est même parvenu à la conclusion que le coût du travail de l’industrie française est inférieur au coût allemand. (Coût horaire de 38.5 euros en Allemagne contre 36.8 en France). L’argumentaire devient alors rapidement défaillant.

Mais plus largement, si la question du coût du travail se pose principalement à l’export, il est nécessaire de rappeler que la part des exportations ne représente que 28% du PIB en France. Dans de telles conditions, que penser des 72% du reste de l’économie ? Y aurait-il ici aussi un problème de coût du travail pour le marché intérieur ? Une telle affirmation suppose que le travail est « trop cher », mais il reste à déterminer un élément fondamental, c’est-à-dire « trop cher » mais par rapport à quoi ? La réponse est évidente, le travail est trop cher par rapport aux ventes réalisées par les entreprises.

Et lorsque la question est posée de cette manière, la réponse devient plus simple car deux stratégies peuvent être proposées pour résoudre le problème. La première, on réduit le coût du travail en espérant que cela n’aura pas de conséquences sur les ventes futures (Et là il faut laisser le soin au gouvernement de méditer sur cette question), et on parvient à réduire le ratio coût du travail  par rapport aux ventes. Cela s’appelle une politique de déflation salariale, ou de déflation tout court, qui est précisément celle qui est menée en Europe depuis 6 ans et qui est « dénoncée » par le gouvernement à l’heure actuelle avec une belle ironie. Pourtant, et il est nécessaire de le rappeler, les propositions de réformes faites ici ne sont rien d’autre que l’application de cette politique de déflation qui échoue misérablement depuis 6 ans.

Puis, la seconde solution qui consiste à faire le nécessaire pour que les ventes se redressent et que mécaniquement, le rapport coût / ventes devienne plus favorable. Il s’agit d’une politique de relance de la demande, celle qui a été menée aux Etats Unis par la Réserve Fédérale par exemple.

A lire également, le nouveau livre de Nicolas Goetzmann :Sortir l'Europe de la crise : le modèle japonais, (Atlantico éditions), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

Le sujet vous intéresse ?

À Lire Aussi

Et l’INSEE révéla à l’insu de son plein gré que nous sommes entrés officiellement en déflationMario Draghi : "il n'y a pas de risque de déflation sur la zone euro"Les marchés bousculés par la déflation qui s'approche ; la France et l'Allemagne condamnées à s'entendre

Mots-Clés

Thématiques

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !