"Sarkozy accumule les coups de chance, quel sera le prochain?"<!-- --> | Atlantico.fr
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Sarkozy accumule les coups de chance.
Sarkozy accumule les coups de chance.
©Reuters

Ça balance à Neuilly

Christian Combaz croit que la chance est sous-estimée en politique. Par conséquent, ceux qu'elle favorise le sont aussi.

Christian Combaz

Christian Combaz

Christian Combaz, romancier, longtemps éditorialiste au Figaro, présente un billet vidéo quotidien sur TVLibertés sous le titre "La France de Campagnol" en écho à la publication en 2012 de Gens de campagnol (Flammarion)Il est aussi l'auteur de nombreux ouvrages dont Eloge de l'âge (4 éditions). En avril 2017 au moment de signer le service de presse de son dernier livre "Portrait de Marianne avec un poignard dans le dos", son éditeur lui rend les droits, lui laisse l'à-valoir, et le livre se retrouve meilleure vente pendant trois semaines sur Amazon en édition numérique. Il reparaît en version papier, augmentée de plusieurs chapitres, en juin aux Editions Le Retour aux Sources.

Retrouvez les écrits de Christian Combaz sur son site: http://christiancombaz.com

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A une époque où chacun est obsédé par lui-même, ceux qui arrivent à museler leur amour-propre jusqu'à reporter leur curiosité sur leur entourage finissent par avoir accès à une autre dimension de la réalité qui est celle du destin. Le destin est une sorte de boson de Higgs de la politique. Il donne une masse à tout ce qu'il rencontre sauf que tout le monde ne le rencontre pas. Par exemple, cette recherche d'une force élémentaire dans la carrière des personnages publics donne de très bons résultats quand on l'applique à Nicolas Sarkozy . Il possède  une caractéristique indiscutable : il a de la chance.

Je n'ai pas l' intention d'essayer d'en convaincre le lecteur. Si quelqu'un n'est pas persuadé que l'ancien président a de la chance, qu'il change de colonne. Je m'adresse à ceux qui ont décelé, depuis des années, dans le parcours de ce personnage curieux, dont les qualités ne sont pas le sujet de mon article, une tendance à susciter les conjonctions favorables pour en tirer parti (d'où son extrême sensibilité aux influences puisqu'il est toujours en train de demander aux autres ce qu'il doit faire et qu'il écouterait n'importe qui, y compris BHL, sur le ton "Et toi ? Tu vois ça comment ?").

Dès l'incident de l'école maternelle de Neuilly, on devine qu'il ne craint pas grand chose parce qu'il est persuadé de n'avoir rien à craindre. Il tourne le dos à un type armé avec un enfant dans les bras.C'est à peine si la Providence l'a vu entrer mais elle l'attend à la sortie. Quand il choisit de soutenir le mauvais candidat à la présidentielle il rebondit en deux mois. Quand un rival essaie de le tuer, c'est le rival qui tombe sur son épée. Quand son concurrent socialiste apparaît livide et menotté à la télévision américaine, la loi semble encore se vérifier. On se dit: "Tout de même, ce Sarkozy est drôlement verni!"

Certes, l'élection de Calimero a paru mettre, ensuite, un terme à cette série gagnante. Elle a semblé signifier un retournement complet du sort à son égard . Et pourtant il suffisait, dès les quinze jours qui ont suivi, de mesurer l'étroitesse de vues, la niaiserie et le désordre qui régnaient dans le camp du vainqueur, pour comprendre que les circonstances n'étaient pas entièrement défavorables au vaincu.

Au milieu des "affaires" , en plein concert de critiques, face à l'opiniâtreté des juges, ses chances paraissent désormais compromises. Or c'est là qu'il redevient intéressant de l'observer avec les lunettes à infrarouge qui permettent de suivre sa ligne de chance. Il est tentant d'imaginer en quoi les circonstances peuvent encore le remettre en selle.

Un premier indice nous est fourni par le complot contre lui, réel ou supposé, que l'on vient d'éventer. Faire l'objet d'un complot c'est déjà la preuve qu'on n'est pas inoffensif. Ensuite il y aura bientôt le fameux congrès où il est probable que la base aura raison des doutes de l'élite (comme ce sera le cas dans le pays entier et dans tous les partis).

Mais la suite risque d'être passionnante. D'où que l'on examine la situation dans laquelle s'est fourré le président actuel, la conclusion la plus fréquente est qu'il ne pourra jamais tenir jusqu'au bout. Si l'on applique à la conjonction des événements cette espèce de logique invisible qui oblige à se dire après coup "j'aurais dû m'en douter", si l'on consent à croire que l'Histoire a bel et bien son boson de Higgs, on devine que deux courbes vont se croiser : la peur du vide après un désordre institutionnel et des mouvements de rue rarement observés depuis Georges Bidault, et le désir d'un recours qui ne s'embarrasse pas de précautions pour donner des ordres à la foule.

Manuel Valls semble à première vue le mieux placé pour adopter ce ton-là puisque c'est lui qui fera donner la troupe. Hélas pour lui, historiquement, celui qui envoie les gardes mobiles est toujours le plus mal perçu par l'opinion. Valls, c'est Kerensky . Il est déjà trop tard pour lui, il ne passera jamais pour solidaire du peuple, à moins qu'il ne démissionne après avoir lâché le président au Conseil des ministres. Depuis des mois, il se prépare à défendre les institutions contre l'insurrection générale mais les seuls insurgés qu'il a trouvé à se mettre sous la dent sont des bourgeoises de Versailles et un humoriste à la sauce Nantua. En outre comment pourrait-il prendre la tête d'un mouvement de révolte contre les injustices, le chômage et l'impudence des privilégiés puisqu'il les incarne ? Le procédé qui consiste à se retourner vers le Président en essayant de plaider la cause des manifestants puis de dire à la foule "je vous ai compris" a déjà trop servi. Venant de lui, personne n'y croira. En revanche, si l'on a bien suivi le début de mon raisonnement, il suffirait que quelqu'un d'autre, un soir de rassemblement à la Concorde, monte sur un camion-benne pour haranguer le pays, relayé au nom du "direct non-stop" par BFMTV ou I-télévision. Le pays peut éprouver soudain une sorte de soulagement de savoir où il va , et de reconnaître instinctivement celui qu'il voudra suivre. Il suffit d'une seule soirée et de dix caméras bien placées.

"Celui", ou "celle" , bien entendu. Parce que le boson de Higgs de la politique est en train d'attribuer une masse équivalente à deux figures à la fois, un homme et une femme, qui toutes les deux peuvent se flatter d'avoir la chance de leur côté et peuvent nous faire passer en quinze jours du hasard à la nécessité. A la faveur d'une élection naturellement car le coup d'Etat, dans nos vieilles nations, est un fantasme socialiste auquel personne ne croit plus.

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