Hollande, la réponse à Trierweiler : le diagnostic d’un psy sur l’état d’un président qui affiche sa souffrance<!-- --> | Atlantico.fr
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François Hollande s'est confié au Nouvel Observateur.
François Hollande s'est confié au Nouvel Observateur.
©Reuters

Un coup porté à ma vie

Suite à la parution du livre de Valérie Trierweiler, François Hollande a souhaité donner sa version des faits auprès de Serge Raffy, journaliste du Nouvel Observateur. "Cette attaque sur les pauvres, les démunis, je l'ai vécue comme un coup porté à ma vie toute entière", a-t-il voulu préciser. Une interview qui dévoile de la part du président une certaine faiblesse et une volonté de revenir sur l'image qu'il souhaite renvoyer depuis le début de son mandat.

Jean-Pierre Friedman

Jean-Pierre Friedman

Jean-Pierre Friedman est psychanalyste. L'un de ses objets de recherche est la relation entre l'homme et le pouvoir. Il est l'auteur de nombreux ouvrages aux Editions Michalon, dont du Pouvoir et des Hommes.

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Atlantico : Dans un article de Serge Raffy publié dans le Nouvel Observateur jeudi 10 septembre, François Hollande réagit au livre de Valérie Trierweiler. Qu'est-ce que ces propos révèlent de son état d'esprit ?

Jean-Pierre Friedman : Alors qu'il nous avait toujours habitué à résoudre le moindre conflit par l'humour et la boutade, François Hollande sort cette fois-ci de ses gonds et nous le montre dans cette interview. Dans son ouvrage, Valérie Trierweiler insiste à plusieurs reprises sur l'inhumanité de l'homme – notamment lors du célèbre passage des "sans-dents", alors que pour François Hollande, cette attitude n'était qu'une simple distance par rapport aux évènements. Sa nature consiste à éteindre un incendie plutôt qu’à l’activer. Son ex-compagne a transformé en négatif tout ce qu'il pensait positif chez lui. Par conséquent, bien sûr qu'il est ne se sent pas à l’aise dans cette situation !

Des proches de François Hollande ont récemment estimé qu'il avait été sonné par la publication du livre de Valérie Trierweiler. Le président de la République a même estimé que ce qu'il "[vivait] en ce moment [n'était] pas agréable". Le président est-il particulièrement touché ?

Comme expliqué précédemment, il est naturellement choqué par ce qui lui tombe dessus. D’une part, parce que comme tout homme, c’est un ancien amour qui s’attaque à lui de la sorte et ce, devant la France entière. D’autre part, parce que sa propre ex-compagne remet en cause toute sa politique et sa légitimité d’être un président socialiste, et une fois encore, devant la France entière. Il aura beau avoir confiance en sa politique, croire en ses engagements et faire comme si tout allait bien, il ne supportera pas pour autant ce type de révélations publiques. Ce sera pour lui, le Président, l’homme qui porte la France, une obligation de montrer ses faiblesses.

Qu'est ce que révèle son besoin d'en faire part au plus grand nombre ?

C’est sa manière à lui d’anticiper les choses, d’éviter le pire. Il est toujours préférable de donner sa version de l’affaire que d’être réduit à la défensive et d’avoir à se défendre. On voit là l’homme qui précède les évènements. Il veut essayer de se réapproprier sa légitimité en s’expliquant par rapport à ces propos qui lui semble injuste.

Dans cette interview, François Hollande déclare notamment : "cette attaque sur les pauvres, les démunis, je l'ai vécue comme un coup porté à ma vie toute entière. J'ai construit mon existence sur le principe d'aider les autres. [...] Je n'ai jamais été du côté des puissants, même si je ne suis pas leur ennemi, mais je sais d'où je viens." Pourquoi le président se sent-il le besoin de rappeler ses origines ? A-t-il peur de les avoir trahies ? S’en sent-il coupable ?

En quelque sorte oui. S’il a besoin de rappeler ses origines, c’est dans le but de se donner une certaine légitimité en tant que président socialiste. Il cherche à rappeler ses origines modestes afin de se créer un alibi, d’autant plus que finalement son père était médecin et ce sont ses grands-parents qui venaient d’un milieu modeste. On pourrait traduire ce type de phrase par « je suis riche mais je me soigne ».

Par ailleurs, il y a quelque chose d’étonnant avec François Hollande. Il est assez représentatif de certains clichés ridicules, notamment parce qu’il illustre une psychanalyse de comptoir, à savoir le complexe d’Œdipe. Sa mère était de gauche. C’était une femme de cœur particulièrement dévouée aux autres. Quant à son père, il incarnait au contraire la rigueur, la droite presque extrême. Lui a choisi d’épouser la pensée de sa mère et s’est battu pour s’accorder une place dans le monde qu’il visait.

A travers cette déclaration : "les gens de peu... C'est une belle expression, la plus noble pour moi... Je viens de ce monde-là. Dans notre pays, on a tendance à penser que le Président de la République peut tout", peut-on ressentir un certain sentiment d'impuissance de la part du président ? Cette impuissance est-elle source de mal-être pour lui ?

Visiblement, il se sent en effet impuissant. Mais il est assez intelligent pour savoir que de toute façon, une fois élu, il aurait forcément déçu une partie de la population – d’autant plus en temps de crise. Après tout, on se fait élire sur la base de promesses, soit que l’on croit réellement, soit sur lesquelles on se fait des illusions.

Par ailleurs, François Hollande a un côté très démagogue. Comme chaque personnage politique, il s’est construit une image politique, mais à l’inverse de chaque homme politique, il n’a pas su rester sur les rails. Il s’est présenté comme étant un homme simple, normal, quelqu’un de modeste, quelqu’un proche des Français, quelqu’un ayant une certaine compassion. Mais au fil des évènements, il s’est finalement montré comme étant quelqu’un de très dur, d’impassible malgré la tempête. A travers cette interview, il essaie visiblement – tant bien que mal – de rectifier le tir.

Les maux que laissent transparaître François Hollande sont-ils courants chez les hommes et les femmes de pouvoir ?

Tout dépend de l’homme ou de la femme. Nicolas Sarkozy par exemple s’était montré sensible, sentimental lorsque Cécilia l’a quitté mais avait réussi à maintenir une certaine confiance en déclarant qu’il restait solide et qu’il résisterait à la tempête. François Hollande renvoie, lui, une image un peu floue, celle d’un homme faible, mais dans le fond pas si faible étant donné sa tendance à toujours désamorcer les situations les plus critiques par le rire et la boutade.

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