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"Le pire des mensonges serait de multiplier le nombre de policiers en sachant que, finalement, la réponse pénale ne suivra pas."
"Le pire des mensonges serait de multiplier le nombre de policiers en sachant que, finalement, la réponse pénale ne suivra pas."
©Reuters

Insécurité

Martine Aubry est venue "défier" Claude Guéant à Marseille sur le thème de la sécurité. C'était certainement utile pour sa campagne électorale mais, en proposant d'augmenter le nombre de policiers, la candidate à la primaire socialiste oublie que la réponse pénale ne pourra pas suivre.

Bruno Beschizza

Bruno Beschizza

Bruno Beschizza est conseiller régional d'Île-de-France, élu en mars 2010 en Seine-Saint-Denis et Secrétaire National de l'UMP à l'emploi des forces de sécurité.

Avant 2010, il était commandant fonctionnel de Police, secrétaire général du syndicat Synergie-Officiers.

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Atlantico : Comment expliquer que le thème de l’insécurité s’invite si tôt au cœur des débats ?

Bruno Beschizza : Pourquoi faire un bilan maintenant ? Nous ne sommes pas encore dans la campagne présidentielle. Ce qui force l’UMP aujourd’hui à faire un bilan prématuré, (on dit d’ailleurs très souvent qu’elle utilise l’insécurité pour ramener à elle des électeurs) c’est la décision de Martine Aubry de « défier » Claude Guéant à Marseille. Je pourrais comprendre ce « défi » si le but était de lancer le débat dans le cadre de la campagne présidentielle. Or, la cible de Martine Aubry n’est ni Nicolas Sarkozy, ni Claude Guéant. Son but était visiblement de « défier » François Hollande après un weekend à La Rochelle qui a été mauvais pour elle. Nous ne sommes pas encore à l’heure des bilans.

Cette opération de communication m’étonne doublement car la semaine dernière, dans le quotidien Libération, plusieurs grands juristes déclaraient que, demain, Martine Aubry serait la présidente du droit. Avant d’être candidate au primaire, elle était présidente du parti socialiste. Elle a démontré, dans l’affaire Guérini, un principe d’irresponsabilité et de non crédibilité. Irresponsabilité car elle n’a jamais pris les mesures conservatoires qu’elle aurait dû prendre pour le bon fonctionnement de sa fédération. Non crédibilité, quand elle dit que M. Guérini devra démissionner s'il est jugé coupable. C’est mal connaitre le procès pénal ou c’est mentir à nos concitoyens.

L’intervention de Claude Guéant à Marseille semble avoir été dictée par la médiatisation des faits divers de cet été. N’est-ce pas aussi un grand plan de communication ?

Claude Guéant s’occupe de sécurité pour nos concitoyens, Martine Aubry s’occupe de sécurité pour son électorat socialiste. Claude Guéant, ayant fait le constat que la situation à Marseille n’était pas satisfaisante, a décidé de reformater la réponse de l’état sur place et donc de changer de préfet. Martine Aubry, dans son rôle de responsable politique, aurait dû faire la même chose dans sa fédération au sujet de l’affaire Guérini. Claude Guéant ne fait pas de la communication, on est dans une prise de responsabilité du Ministre de l’intérieur qui ne raconte pas de sornettes aux Marseillais en disant que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Entre le bilan chiffré et le ressenti de nos concitoyens, il y a un décalage. Claude Guéant l’a senti et a pris des mesures dans ce sens.

Que pensez-vous de la proposition de Martine Aubry de « rétablir les 10700 policiers perdus » ?

On sait qu’aujourd’hui en France, le vrai problème est l’impunité. Le pire des mensonges serait de multiplier le nombre de policiers en sachant que, finalement, la réponse pénale ne suivra pas. A Marseille, on a globalement les effectifs qu’il faut. Marseille n’est pas une ville qui intrinsèquement est plus criminogène qu’une autre, il faut arrêter de stigmatiser Marseille. Il faut adapter l’outil sécuritaire, c’est pourquoi Claude Guéant a choisi de mettre en place Alain Gardère qui est un spécialiste pour essayer de changer le dispositif. C’est une preuve de maturité politique, très loin de la position socialiste.

La police et la sécurité, cela ne s’apprend pas dans les livres. Ce n’est pas parce que l’on met trois policiers de plus dans un quartier que la sécurité reviendra. C’est beaucoup plus complexe qu’un simple problème arithmétique. Il faut arrêter de mentir à nos concitoyens, c’est un jeu dangereux. Jean-Jacques Urvoas (Député PS, auteur de « 11 propositions chocs pour rétablir la sécurité »), qui pourtant est un grand théoricien, compare l’incomparable. Il faut quand même se rappeler que l’on comptabilisait les fonctionnaires en 2002 d’une manière différente d’aujourd’hui. Il compare des pommes et des poires, c’est un vrai non-sens.

Cela lui évite de parler de mesures concrètes. Quelle est la position de la gauche aujourd’hui ? Il y a tellement de courants différents, c’est une vraie cacophonie. Toutes ces idées sont sur l’outil et jamais sur la matière. La droite peut avoir la tête haute en matière de sécurité. Elle n'a peut-être pas été bonne partout, tout le temps, mais elle a le mérite d’être responsable, crédible, lucide et courageuse.

La politique de rigueur est-elle compatible avec une politique sécuritaire efficace ?

La rigueur est compatible avec une politique sécuritaire efficace. La bonne réponse, c’est la réponse pénale. Encore une fois, le vrai problème est celui de l’impunité. Quand le voyou d’un quartier sera sûr d’arriver à la case prison s’il commet une faute, non seulement on restaurera un lien de confiance avec la population mais on réinstaurera aussi une peur chez le délinquant. Dans ce cas-là, le coût budgétaire n’est pas énorme.

La politique sécuritaire socialiste vous parait-elle naïve ?

Elle n’est absolument pas naïve. Le parti socialiste pratique un double discours bien calculé. C’est toute l’ambiguïté des propositions de Jean-Jacques Urvoas . On dit « on va supprimer cent commissariats, on va supprimer les CRS » mais on ne s’attaque jamais aux vraies valeurs. Est-ce que l’on va retomber dans la politique des « grands frères » ? Est-ce que l’on va vers une légalisation des stupéfiants ? Cela n’a rien de naïf, c’est un double discours savamment étudié.

A-t-on toujours les moyens d’implémenter une politique stricte de sécurité, notamment en termes de remplissage des prisons ?

On peut certes se demander combien coûte le crime dans l’immédiat mais il faudrait aussi se poser la question : Combien va coûter le crime dans l’absolu ? Un délinquant dans la rue, combien coûte-t-il à la société, en termes d’assurance, de nuisance pour les victimes ? L’UMP a déjà proposé des mesures pour améliorer l’application des peines, notamment le fait d’ajouter 20000 places de prison supplémentaires, supprimer les réductions de peines automatiques et supprimer la procédure d’aménagement systématique des peines de moins de 2 ans.

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