Chronique d'un entrepreneur outre-Atlantique : août ou pas, l'économie américaine en plein bouillonnement<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Chronique d'un entrepreneur outre-Atlantique : août ou pas, l'économie américaine en plein bouillonnement
©

Les entrepreneurs parlent aux Français

En ce jour de quasi 15 août, où en France la majorité des entreprises sont fermées, sûrement pour se remettre des ponts du mois de mai, les Etats-Unis, eux, n’arrêtent pas. Et à la veille de mon départ de Los Angeles vers la Big Apple, ce constat s’impose avec plus de force par l’accumulation des preuves.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

Voir la bio »

Aller à l’inverse du soleil n’est pas forcément s’en éloigner. En ce jour de quasi 15 août, où la France atteint le point culminant de sa léthargie, sûrement pour se remettre des ponts du mois de mai, les Etats-Unis, eux, n’arrêtent pas. Et à la veille de mon départ de Los Angeles vers la Big Apple, ce constat s’impose avec plus de force par l’accumulation des preuves.

En Californie le constat est le même qu’en Floride : ça monte ! Non, pas les températures, mais les prix, l’activité, la production, les ventes - la croissance quoi. Ce mot disparu du dictionnaire français depuis quelques années et encore plus sévèrement depuis deux ans a conservé, ou plutôt retrouvé, un sens aux Etats-Unis. Pour tous ceux qui ont connu les Etats-Unis l’été, entre 2009 et 2012, le contraste est saisissant. 

Les premiers à reprendre des couleurs sont les agents immobiliers. Les affaires sont reparties à la hausse. Les transactions s’enchaînent et ils ne semblent pas avoir besoin de Duflot pour réguler leur marché. Dommage, elle cherchait un job... Peut-être pourra t-elle postuler quand il faudra un petit élément correcteur ?

Ceux qui n’en prennent pas, en revanche, ce sont les Moyen-orientaux, présents massivement à Los Angeles. En tous cas pas les femmes : voilées jusqu’aux sourcils, elles ne risquent rien avec les UV, A ou B, et si elle dévalisent les boutiques de Rodéo Drive, de façon à passer le temps qui semble bien long quand on a le droit de ne rien faire, cela reste pour leur plaisir personnel. Car, sous le niqab noir, le sigle Vuitton ressort assez mal. Le plus surprenant pour les Américains, mais aussi les touristes, c’est la vague de ces touristes "religieux" qui arrivent "tout voile dehors" à Las Vegas. 

Des Américains me demandaient si leur religion interdisait bien l’alcool, le jeu, le sexe à ciel ouvert et autres décadences occidentales. Ils ne parvenaient pas à comprendre pourquoi ces femmes devaient respecter des codes aussi intransigeants dans une ville qui, à chaque pas, les enfreint. Ils pensaient avoir trouvé un expert européen sur la question, votre serviteur. Mais votre serviteur est resté "sec" sur le sujet. 

Seul constat : les Etats-Unis deviennent ou redeviennent la destination favorite de ces touristes certainement ignifugés. En effet, avec 48° à midi, on imagine mal comment supporter cet attirail noir de jais. Néanmoins, dans les hôtels hors de prix que seul le pétrole peut acheter, le Dom Pérignon coule à flot, pour les hommes uniquement, faisant le bonheur des restaurateurs. Et quand ils arrivent, c’est accompagné d’un convoi d’une trentaine de véhicules qui les déversent dans les rues de Santa Monica, comme ce soir, contribuant certainement à 30% du chiffre d’affaires de la soirée. Les voies du Seigneur, comme celles de la croissance, ont choisi leur piste d’atterrissage : la Californie.

Ensuite, les start-up. Nombre d’entre elles ont quitté la Valley, pour la douceur de Venice Beach ou de Santa Monica, permettant ainsi à leurs salariés, volatile "marchandise" qui se vend chaque jour au plus offrant, de bénéficier de conditions de vie fantastiques, qui les tiennent à distance des concurrents si prompts à les débaucher à "Palo Alto" ou "Mountain View". En les mettant au soleil, ils les gardent à l’ombre ! Et les levées de fonds record continuent à déferler, tel un concours de tsunami permanent. Encore trois levées de plus de 100 millions, pour des valorisations au delà de 1.5 milliard pour des entreprises sans rentabilité, qui ont moins de trois ans ! A défaut de soufre, cela sent un peu la bulle, mais l’avenir le dira. Pour le moment, cela ne prouve qu’une seule chose : l’irrésistible confiance de l’Amérique dans son avenir. On aimerait que cet Ebola soit aussi contagieux en Europe.

Ce qui impressionne aussi, c’est la ré-industrialisation des Etats-Unis. Ils ont un mérite fou, eux qui n’ont pas eu la chance d’avoir un ministre dédié à cette tâche. Imaginez s'ils en avaient eu un ! Les négociations avec les syndicats pendant la crise, la baisse des salaires, la révision des avantages (jamais acquis aux Etats-Unis), permettent à certaines industries, dont l’automobile, d’avoir des écarts de salaire d’à peine 8 à 18% avec leurs homologues chinois. Copie, erreurs, temps de livraison et corruption en moins...

Le gaz de schiste change la donne de façon incroyable. Pas encore à la pompe, où le gallon est encore souvent entre 3.65 et 4.89 dollars, mais le coût de l’énergie, élément clé pour l’industrie, y compris numérique, est en train de contribuer massivement à la baisse des coûts de production et donc de favoriser encore plus le comparatif avec les pays propices à la délocalisation. Mais les Américains n’ont pas eu la chance d’avoir des parents communistes ou un gouvernement socialiste sous pression de brillants écologistes, qui ont décrété, (alors que c’est faux et prouvé comme tel), que la recherche du gaz de schiste était obligatoirement dangereuse. C’est vrai, de la façon dont le font nombre de sociétés américaines. Mais il existe des techniques qui réduisent presque tout risque de fuite et d’infiltration, dans les nappes phréatiques notamment.

Il y a des leçons à tirer de tout cela. Une classe politique issue de la société civile, du business principalement, qui a à cœur de développer l’économie et la comprend. Une fierté nationale forte, unie par un modèle culturel qu’ils ne laissent piller par personne. Ici on travaille ou on meurt. L’immigration peut faire ce qu’elle veut, tant qu’elle travaille. Elle est souhaitée, mais sélectionnée. Ils savent qu’elle est indispensable. Les talents sont partout et la croissance en a besoin. Mais ils la choisissent. L’absence d’assistanat enrobe tout un chacun dans une dynamique uniforme, imposant l’adhésion au modèle américain avant tout, modèle suffisamment fort pour que chacun puisse alors pratiquer et afficher ses croyances, sans que l’ensemble n’en pâtisse. Les communautés travaillent ensemble, vivent le même rêve de réussite, mais en revanche se mélangent peu à mon goût. Asiatiques, Latinos restent principalement entre eux. Mais sans toucher à la cohérence de l’ensemble à nouveau. Ce corpus, ce noyau fédérateur, c’est le travail, la volonté d’élévation sociale, la certitude que la réussite ne viendra pas d’un Etat dépouillant les riches au profit des pauvres, mais du travail accompli. Et les riches, sont de plus en plus nombreux, car les salariés bénéficient de stock-options, que nous avons, nous, vouées aux gémonies. Et ce ne sont pas des héritiers. Mais bien de nouveaux venus, qui hier n’avaient rien. Sur ce point le PS serait à l’aise avec les Etats-Unis : pas de rente !

Dernière chronique des Etats-Unis la semaine prochaine avec un point sur New York, la plus intense ville du monde. Indémodable et fébrile. Le bonheur de tout entrepreneur pour qui le sommeil est un temps de vie de perdu !

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !