Pourquoi les vacances ne risquent pas d’effacer les lignes de fractures qui travaillent la majorité<!-- --> | Atlantico.fr
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Le parlement est en vacances.
Le parlement est en vacances.
©Reuters

Rien de nouveau sous le soleil

Depuis mercredi 23 juillet, le parlement est en vacances : jusqu'au 8 septembre pour les députés et jusqu'au début du mois d'octobre pour le Sénat.

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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Ouf ! Avant de décrocher pendant une quinzaine de jours au mois d'août, François Hollande et le gouvernement vont connaître un peu de répit. Depuis mercredi soir le Parlement est en vacances : jusqu'au 8 septembre pour les députés et jusqu'à début du d'octobre pour le Sénat ( élections sénatoriales obligent ). Avant cette interruption salvatrice, députés et sénateurs ont bouclé l'année dans une atmosphère tendue à cause, cette fois, de la controverse autour de l'autorisation ou l'interdiction des manifestations de protestation contre l'offensive israélienne à Gaza. Ce conflit a fait naître une nouvelle fracture au sein du PS, puisqu'on on a vu quelques députés socialistes ( la plupart élus des banlieues ) participer à la manifestation parisienne autorisée en dépit des "conseils" de retenue de leurs responsables. Ces députés  avaient pour la plupart battu des sortants communistes en 2012. Le PC ayant adopté une position totalement pro-palestinienne, il n'est pas interdit d'imaginer que quelques pensées électoralistes ont guidé leur geste. Il n'empêche : d'autres députés des banlieues n'ont pas pour autant rejoint les cortèges.

Cette actualité internationale a quelque peu estompé l'autre dissension qui s'est faite jour, à savoir la nouvelle carte des régions françaises. Certes, l'Assemblée a adopté la loi fixant la délimitation des futures régions ainsi que le report des élections régionales à décembre 2015. Mais, comme il ne s'agissait pas d'un texte au caractère "fondateur" comme le budget, huit députés socialistes ont voté contre, tout comme une partie des radicaux de gauche, et vingt-sept PS se sont abstenus. On retrouve là l'étiage des votes frondeurs ; l'ennui c'est que ne sont pas toujours les mêmes qui s'opposent ou s'abstiennent : pour le scrutin régional l'appartenance géographique a pris le pas sur la contestation de la politique économique et sociale du gouvernement. Aux "frondeurs" qui contestent les choix économiques sont venus s'ajouter les "vexés" de la réforme régionale.

Parmi ces derniers des députés généralement sans histoires : des élus "nordistes", du Sud-Ouest et de l'Est, ainsi que des proches de Martine Aubry, qui tenaient à manifester leur mauvaise humeur contre ce que l'un d'eux qualifie de "tractations d'arrière cour" menées à l'Elysée. Rien d'étonnant après la charge de la Maire de Lille sortie de sa réserve pour s'en prendre à l'union forcée du Nord Pas-de-Calais avec la Picardie ("deux régions en crise") alors qu'elle préconisait de réunir ces deux entités avec la future Normandie pour former une grande région du Nord, mais dans un deuxième temps seulement. Philippe Germain, le député des Hauts de Seine qui fut le plus proche collaborateur de Martine Aubry à Lille et rue de Solférino a relayé le courroux de son ex-patronne dans les couloirs de l'Assemblée, en déclarant que "la manière dont on a redessiné la carte des régions est significative de la manière dont on gouverne depuis trois ans"... "On" se reconnaîtra !

C'est en effet juste avant le week-end du 14 juillet que les dernières modifications ( mariage de la Picardie avec le Nord-Pas-de-Calais, de la Champagne-Ardenne avec l'Alsace-Lorraine et rattachement de Poitou-Charente à l'Aquitaine  ) ont été décidées "au Chateau" entre le Président de la république, le ministre de l'Intérieur et des barons du groupe socialiste. Ces derniers les avaient tues pendant quelques jours avant de les présenter sans tambour ni trompette à la réunion de groupe du mardi afin que les députés PS entérinent ce choix qui devait ensuite s'imposer à l'ensemble du groupe, toujours détenteur de la majorité absolue. Il y avait peu de monde ce mardi 15 juillet à la réunion et comme les absents ont toujours tort... l'amendement est passé comme une lettre à la poste.

Les élus concernés partent en vacances avec leur rancoeur en bandoulière sans pouvoir se dire " ça ira mieux demain"! Car à l'automne resurgiront les querelles autour du budget 2015 et les économies qu'il va falloir continuer de faire pour tenter de rester dans les clous alors que la croissance est atone. François Hollande a lancé un message en affirmant qu'il n'irait pas au delà des 50 milliards d'économies en dépit des admonestations de Bruxelles. C'est à la fois un signal d'apaisement envoyé aux frondeurs mais aussi l'expression de son inquiétude face à une courbe du chômage qui continue de progresser et une reprise qui n'arrive pas. Il ne peut pas compter sur les grands travaux européens censés redonner vigueur à l 'économie promis par Jean-Claude Juncker : les projets sont encore enfouis dans les cartons. A l'automne toujours, le débat de la loi sur la transition énergétique va relancer la querelle autour du nucléaire et de l'exploitation des gaz de schistes. Or, à l'automne précisément, on sera entré dans la deuxième phase du quinquennat, avec l'échéance de 2017 qui commencera à se profiler à l'horizon et toutes les interrogations qui en découlent. Pour beaucoup de députés socialistes élus "sur la vague" en 2012, cela signifie incertitude pour l'avenir, et par conséquent nervosité à cause de la montée du Front national et la perspective de triangulaires meurtrières.

Manuel Valls qui a fait un sans faute depuis son arrivée à Matignon a tout intérêt à continuer de multiplier les rencontres avec les élus PS autour de sa table à Matignon afin de les dissuader de constituer une nouvelle force politique avec les Verts ou le Front de Gauche ou encore de les persuader de voter contre le budget. Un vote négatif entrainerait leur exclusion du PS et pourrait même provoquer une dissolution de l'Assemblée avec une issue des plus incertaines. Le chiffon rouge de la dissolution est régulièrement agité sous leur nez ! Avec la préparation du congrès du PS, dont la date n'est pas encore arrêtée, voilà de quoi méditer pour élus au bord de la crise de nerfs.

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