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Énièmes hausses de tarifs : les syndics de copropriété continuent de contourner la loi là-dessus comme sur le reste
©Reuters

Chers syndics

L'observatoire des syndics a dénoncé mercredi 14 mai la "persistance des mauvaises pratiques" de la part des syndicats de copropriété avec des résultats "encore plus affligeants" qu'en 2013...

Pierre Olivier

Pierre Olivier

Pierre Olivier est Directeur Général de Copro+, société de conseils et d’assistance pour améliorer la gestion de la copropriété.

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Atlantico : Concrètement, quels sont les points sur lesquels les syndicats de copropriété continuent d'avoir des pratiques abusives ?

Pierre Olivier : Les frais qui sont imputés à la copropriété ne sont pas toujours justifiés. Certains frais devraient être dans la gestion courante et sont facturés en supplément. Des tenues  d'Assemblées générales après 17h00 ou systématiquement des réunions, etc. En somme, des prestations complémentaires qui ne sont pas justifiées.

Ce que l'on appelle la garantie financière est particulièrement abusif.  Ainsi dès lors que l'on veut faire des travaux, les syndics n'hésitent pas à demander 0,5% ou 1% du montant des travaux au titre de la garantie financière. Et ce alors que l'on est désormais sur des comptes bancaires séparés, il n'y a pas de risques d'évasion ou de faillite du syndic. Les Syndics estimeront qu'il ne s'agit pas d'une pratique abusive car elle est prévue par la loi Hoguet. Néanmoins,ces frais ne sont pas en rapport avec la réalité. Pas de risque de faillite du syndic. On continue à demander des garanties. On compte également dans les pratiques abusives, les frais de recouvrement. Une simple lettre pour un rappel peut coûter entre 40 et 50 euros.  Il n'y aucun lien entre la charge et le coût. Cela est vrai également pour l'état daté, lorsqu'il y a une mutation chez un notaire, il faut renvoyer l'état des dettes du vendeur  pour la copropriété et cela pouvait être facturé 400 à 500 euros. En général c'est un travail qui demande un temps très court car il s'agit d'un automatisme.

Par ailleurs, les factures d'honoraires complémentaires du syndic ne transparaissent pas dans la présentation des comptes. Lorsque le syndic facture un copropriétaire pour un recouvrement, cela n'apparaît pas toujours dans la comptabilité du syndicat. Par exemple, on aura l'impression que le syndic touche 10 000 euros alors qu'il en touchera en réalité 14 000  ou 15 000. Les copropriétaires devraient être au courant, c'est un problème d'information. D'autre part les syndics ne tiennent pas tous leurs obligations en matière de carnet d'entretien. La comptabilité d'engagement est plus ou moins bien respectée selon les cas.

Selon les conclusions de l'observatoire des syndics, les syndicats de copropriété violeraient dans de nombreux cas les "nouvelles obligations de la loi Alur". L'étude épingle notamment "les vrais faux forfaits tout compris", incluant des prestations particulières, alors que ces dernières sont en réalité des services obligatoires.  Comment les syndics peuvent-ils continuer de se jouer des lois ?

En copropriété, c'est la seule organisation que je connaisse dans laquelle les gens qui contrôlent sont moins compétents que les gens qui doivent être contrôlés. Les pratiques des syndics sont contrôlées par des copropriétaires qui sont des bénévoles et qui ne sont pas toujours compétents. Donc les syndics arrivent à abuser de la naïveté des copropriétaires. Nous faisons beaucoup de contrôles en copropriété avec des examens de vraisemblance et il est rare que tout soit en ordre. Le syndic est un professionnel, ce qu'on appelle "un sachant" et dit "c'est comme ça !". Les copropriétaires qui sont des personnes dévouées et qui veulent bien donner un coup de main, sont complètement dépassés. La loi Alur est compliquée et donne de nouvelles obligations. Le seul moyen de s'en sortir est de mettre en concurrence les syndics pour que les prix baissent.  

Par ailleurs, les décrets sur les nouveaux contrats de syndic ne sont pas sortis, et nous ne savons pas quand ils sortiront.

Certaines obligations sont déjà prévues, comme le compte bancaire séparé, pour lequel l'application se fera à partir du mois de mars 2015. Les syndics ont donc un an pour se mettre en règle. Mais de toutes façons, il y a des syndics qui ouvrent un compte bancaire séparé et rapatrient tout l'argent sur leur compte pour payer les fournisseurs à partir de leur compte à eux. Ils mettent en avant des raisons informatiques à cela. Une fois l'argent sur le compte du syndic, ils peuvent continuer à le gérer comme bon leur semble. Le fond de ce problème, est que le fournisseur de la copropriété considère qu'elle a pour client le syndic, car c'est le syndic qui paie. Un compte bancaire séparé permet à la copropriété de payer l'artisan directement. Si l'artisan est payé à trente jours, il pourra être compétitif et baisser ses prix, alors que les syndics les payent généralement à 90 jours. Ainsi, l'artisan augmente ses prix lorsqu'il travaille pour un syndic.

A partir de 2015 (2018 pour les copropriétés ayant des comptes triennaux), la loi interdira aux syndics de facturer l'ouverture d'un compte séparé. Or, en attendant, la majorité des grands syndics facturent toujours un surcoût "abusif" pour ouvrir un compte séparé. Comment les copropriétés peuvent-elles se prémunir de ce genre de pratiques ?

Le seul moyen de se prémunir de cela est de mettre en concurrence les syndics. Désormais une règle est définie par la loi Alur et qui doit être applicable de suite : l'ordre du jour doit être défini avec le conseil syndical. A ce moment-là, le conseiller syndical peut demander, et cela est encouragé par la loi Alur, à ce qu'il y ait mise en concurrence. Et cette mise en concurrence permettra une baisse des prix.  Car actuellement les syndics sont très rarement mis en concurrence. Ils parvenaient jusqu'alors à conserver leur contrat en envoyant des convocations aux AG sans en avertir les conseils syndicaux et il était alors trop tard pour demander une mise en concurrence, l'offre étant envoyée avec la convocation.

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