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Angela Merkel, gestionnaire rigoureuse ou naine politique sans vision ?
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Manque de chance(lière)

Au vu de sa puissance et de son dynamisme économique, l'Allemagne devrait être en première ligne pour gérer la crise de la zone euro. Pourtant, sa chancelière Angela Merkel apparaît souvent en retrait et à contre-courant. Que cache donc cette étrange attitude ?

Jean-Marc Daniel

Jean-Marc Daniel

Jean-Marc Daniel est professeur à l'ESCP-Europe, et responsable de l’enseignement de l'économie aux élèves-ingénieurs du Corps des mines. Il est également directeur de la revue Sociétal, la revue de l’Institut de l’entreprise, et auteur de plusieurs ouvrages sur l'économie, en particulier américaine.

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Depuis le début de la crise grecque, la question est récurrente : que veut la chancelière allemande ? Est-elle à la hauteur ?

La question est cruciale car la santé économique apparente de son pays lui donne une place privilégiée. Elle peut ainsi s’appuyer sur une croissance retrouvée qui a été en 2010 de 3,5% contre 1,7% en France et 1,2% en Italie, tout en sachant néanmoins que la récession de 2009 avait été plus sévère en Allemagne qu’en France.

Or, le moins que l’on puisse dire est que Mme Merkel a du mal à s’affirmer. A chaque étape de la crise grecque, elle a été en retrait, subissant les événements et acceptant du bout des lèvres les décisions prises. Enfourchant des poncifs délétères sur la « paresse méditerranéenne », elle a répété que les pays du sud ne travaillaient pas assez  par rapport à ceux du nord, bien que les statistiques de l’OCDE montrent l’inverse.

En  visite à Madrid en février 2011, alors que son ministre des affaires étrangères avait déclaré que la chancelière n’était pas « une maîtresse d’école », elle a fait une prestation à la télévision dont le ton cassant a convaincu les spectateurs du contraire. Et aujourd’hui, tandis que les dirigeants européens réclament qu’un sommet entérine une fois pour toutes les décisions prises dans le cadre de l’accord du 9 mai 2010, elle proclame depuis le Nigéria qu’il serait inutile de se réunir car rien n’est prêt.

Cette attitude a deux interprétations.

Au revoir Paris, bonjour Moscou

La première est celle selon laquelle Mme Merkel mène habilement une réorientation de la politique allemande. Elle préparerait un nouveau système d’alliances économique et politique tourné vers la Russie au détriment de ses partenaires occidentaux, notamment la France.

La France, qui n’a pas d’énergie, compte sur le nucléaire ; l’Allemagne qui préfère ne pas regarder le problème énergétique en face, compte sur le pétrole et le gaz russes. La France qui vieillit s’est remise à avoir des enfants et joue sur l’immigration ; l’Allemagne qui vieillit dégage des excédents extérieurs, c'est-à-dire une épargne qu’elle emploie à acheter en Russie, en Ukraine, en Pologne, les usines où elle trouvera le travail qui va lui manquer. La France rêve de Méditerranée et s’engage en Libye ; l’Allemagne, qui se veut plus pacifiste que jamais, évite d’en être, ce qui lui permet de ne pas froisser Moscou.

Repli nationaliste

La seconde est plus prosaïque. C’est celle notamment d’Helmut Kohl. Selon cette interprétation, dépassée par les événements, perdant avec une incroyable régularité chaque élection locale, Mme Merkel se réfugie dans un certain provincialisme, celui historique de la classe politique allemande qui indignait déjà Bismarck, lorsqu’il dénonçait les nostalgiques des principautés du XVIIIème siècle vivant repliées sur elles-mêmes dans l’amour de la musique et de la philosophie.

Il y aurait ainsi un repli allemand mal assumé que traduirait une défense de principe de l’euro accompagnée en fait d’un appel à réduire la zone. Comme si une union monétaire était un hall de gare que l’on quitte ou que l’on rejoint au gré des humeurs du moment ; comme si l’Allemagne, qui a souffert des dévaluations compétitives au sein du SME [Système Monétaire Européen] en 1992, n’avait pas intérêt à conserver un maximum de pays en change fixe par rapport à elle ; comme si l’économie allemande, dont la partie orientale devrait connaître une expansion de pays émergent, ne souffrait pas en réalité d’une croissance atone due à une étrange faiblesse de l’investissement (l’investissement en Allemagne représente 18% du PIB contre 21% en France).

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