Dans le cadre d’un documentaire, France 2 va diffuser, ce jeudi, neuf minutes de conversations téléphoniques entre les dirigeants français et russe, avant le début de l’invasion en Ukraine.
Neuf minutes de conversations, aussi inédites que fascinantes, sont au cœur du documentaire « Un président, l'Europe et la guerre », signé Guy Lagache, selon des informations du Point. Cette enquête raconte notamment les coulisses diplomatiques des six derniers mois à l'Elysée. Le documentaire est programmé pour une diffusion sur France 2 le jeudi 30 juin en première partie de soirée.
Lors de cette conversation téléphonique relayée dans ce documentaire, Vladimir Poutine aurait notamment indiqué à Emmanuel Macron :
« Pour ne rien te cacher, je voulais aller jouer au hockey-sur-glace. Là, je te parle depuis la salle de sport ».
Cet échange téléphonique surréaliste a lieu quatre jours avant le début de l'offensive russe en Ukraine. Dimanche matin 20 février, la caméra de France 2 dévoile le travail du conseiller diplomatique du président, Emmanuel Bonne, entouré de trois collaboratrices, dans son bureau. Le président français, qui s'est rendu quelques jours plus tôt à Moscou et à Kiev, a entamé une médiation de la dernière chance pour tenter d'empêcher la guerre. Les quatre membres de la cellule diplomatique de l'Elysée suivent à distance l'échange téléphonique du président de la République avec le chef du Kremlin.
Emmanuel Macron apparaît « ferme, offensif, un brin péremptoire, voire cassant », selon Le Point. Vladimir Poutine ne lâche rien et s'agace. « Ecoute-moi bien », lui lance-t-il.
Le président français poursuit la conversation, sans détour :
« Je voudrais que tu me donnes d'abord ta lecture de la situation et peut-être de manière assez directe, comme on le fait tous les deux, me dire quelles sont tes intentions. »
Vladimir Poutine répond alors :
« Que pourrais-je dire ? Tu vois toi-même ce qu'il se passe », en référence aux accords de Minsk censés ramener la paix dans l'est de l'Ukraine.
Il accuse Volodymyr Zelensky d'avoir dit vouloir acquérir l'arme nucléaire.
« Non, n'importe quoi », commente Emmanuel Bonne.
« En fait notre cher collègue, M. Zelensky, ne fait rien [pour les appliquer]. Il vous ment », indique Vladimir Poutine, selon la traduction du documentaire, en parlant du président ukrainien.
Le dirigeant russe accuse son homologue français de vouloir « réviser les accords » et demande que les propositions de paix des séparatistes soient prises en compte.
Emmanuel Macron dénonce alors la démonstration de son interlocuteur :
« Je ne sais pas où ton juriste a appris le droit. Moi, je regarde juste les textes et j'essaie de les appliquer ! »
Vladimir Poutine revient à la charge, déplore que les séparatistes ne soient pas entendus.
« On s'en fout des propositions des séparatistes ! » riposte le président français, ajoutant qu'elles ne sont pas prévues dans l'accord.
Emmanuel Macron, lors de cette conversation avant le début du conflit, tente de jouer le rôle de médiateur dans la crise. Il propose notamment une réunion de toutes les parties :
« Je vais dans la foulée exiger cela de Zelensky. La situation sur la ligne de contact est très tendue. J'ai vraiment appelé hier Zelensky au calme. Je vais lui redire, calmer tout le monde, calmer dans les réseaux sociaux, calmer les forces armées ukrainiennes ».
Emmanuel Macron invite Vladimir Poutine à faire de même avec les forces russes prépositionnées à la frontière avec l'Ukraine :
« Ne cède pas aux provocations quelles qu'elles soient dans les heures et les jours qui viennent ».
Emmanuel Macron a tenté ensuite, au cours de cette conversation, de convaincre Vladimir Poutine d'accepter une rencontre avec Joe Biden à Genève pour tenter une désescalade au sommet. Vladimir Poutine se montre peu emballé, encore moins à l'idée de fixer une date :
« Avant toute chose, il faut préparer cette réunion en amont ».
Emmanuel Macron réussit néanmoins à obtenir un « accord de principe » de la part de Vladimir Poutine.
Dans la foulée, l'Elysée annoncera un prochain sommet Biden-Poutine, qui n'aura pas lieu.
« On reste en contact en temps réel. Dès qu'il y a quelque chose, tu m'appelles », indique Emmanuel Macron à Vladimir Poutine.
« Je vous remercie, monsieur le président », conclut le chef du Kremlin, en français.
Quatre jours plus tard, le constat est amer avec le début de l’offensive russe en Ukraine. La réalité met fin aux pistes diplomatiques.
« On ne l'a pas convaincu, il a envahi l'Ukraine », confie Emmanuel Macron, devant la caméra de Guy Lagache. « Je pensais qu'on pouvait trouver par la confiance, la discussion intellectuelle, un chemin avec Poutine », confie le président français, le 16 juin, dans le train qui le ramène d'une visite à Kiev pour rencontrer Volodymyr Zelensky.
Avec les exactions commises par l'armée russe, notamment à Boutcha, une étape « irréversible » a été franchie sur le plan moral, indique Emmanuel Macron. « Je lui ai ensuite reparlé beaucoup moins… ».
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