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Un plan autisme encourageant mais qui devra s’imposer aux résistances dans l’éducation nationale ou dans la sphère médicale
©Reuters

Plan autisme

Le gouvernement a présenté son plan autisme, ce vendredi, répondant ainsi à une promesse de campagne du président de la République. Mais outre les avancées qu'il permet, le projet semble toujours accuser quelques retards.

Olivia Cattan

Olivia Cattan est écrivaine, journaliste, présidente de Paroles de Femmes et de SOS autisme.
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Atlantico : Le gouvernement a présenté le quatrième plan autisme ce vendredi. Pensez-vous que ce plan va dans le bon sens ? Pourquoi ?

Olivia Cattan : Déjà, j'ai reçu une lettre de l'Élysée nous disant que nos propositions (celles de l'association SOS Autisme France, ndlr) ont été étudiées par Emmanuel Macron. Le gouvernement a rajouté, dans son plan autisme, la formation des médecins et le forfait pour la prise en charge en médecine libérale. Donc j'étais plutôt satisfaite de notre action ; de l'écoute, quand même, parce qu'on n'est pas toujours entendues, les associations. Mais là, apparemment, on a été entendus sur ce point. En tout cas, on va dire que le gouvernement va dans le bon sens en matière, d'abord, de reconnaissance des propositions de la Haute autorité de Santé. Parce que, pour une fois, on a quand même un président qui demande à la sphère médicale et scientifique de reconnaître les recommandations. Il travaille avec l'Éducation nationale, et Monsieur Blanquer, à l'intégration des personnes autistes à l'école. Donc cela aussi, c'est une amélioration. Tout cela faisait partie de nos recommandations lorsque j'ai rencontré Brigitte Macron, juste avant l'élection présidentielle. Donc on est satisfaits. On se dit : "Ils ont compris des choses". Maintenant, est-ce que les choses vont se faire ? Avec cette réforme, il va falloir affronter l'Éducation nationale et une sphère médicale qui ne reconnaît pas obligatoirement ces recommandations. Et puis, nous sommes attentifs à la somme qui va être allouée à l'autisme pendant cinq ans, puisqu'apparemment, une bonne partie ira à la recherche. Nous serons attentifs à ce que cet argent soit donné aux familles d'enfants autistes afin qu'elles puissent payer les prises en charge et donner un parcours de soins correct à leurs enfants. Il faut que tout ne soit pas mis dans la recherche, même si c'est un volet important. Aujourd'hui, il est temps de changer le quotidien aussi, des familles de personnes autistes. C'est quand même lamentable depuis des dizaines et des dizaines d'années.

Au regard des éléments présentés, que manque-t-il surtout à ce quatrième plan ?

La meilleure chose à faire pour que les enfants puissent vraiment bénéficier d'une prise en charge adaptée, comme en Italie, au Canada, aux États-Unis ou en Israël, c'est que les soins dispensés en médecine libérale soient vraiment remboursés par la Sécurité sociale. Il parait que le gouvernement va instaurer des plateformes - ce qu'avait déjà proposé la Secrétaire d'État chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre l'exclusion, Ségolène Neuville, sous le quinquennat Hollande. Et j'ai peur que ce soit assez compliqué, après, pour aller se faire rembourser quand on a une psychologue, une psychomotricienne. Je pense que ça va être complexe, car cela va dépendre encore des départements. Donc je pense qu'il aurait été très simple de faire une loi en agrégeant plusieurs professionnels - qu'il s'agisse de psychologues ou de psychomotriciens - et obtenir que la Sécurité sociale rembourse ces soins, qui sont nécessaires. Ça aurait facilité les choses pour les familles et surtout, ça aurait uniformisé les choses. Parce que là, département par département, on a des maisons départementales qui agissent d'une certaine façon, qui donnent des allocations, qui remboursent certains soins et qui n'en remboursent pas d'autres. Donc, cela dépend de la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées, ndlr) de votre département. Et l'école, c'est pareil : tout dépend du lieu où vous habitez. Il y a une loi qui a été faite en 2005 pour intégrer les personnes autistes à l'école. Mais aujourd'hui, les directeurs d'établissement n'accueillent pas les enfants autistes à bras ouverts. Et puis, on n'a pas toujours les accompagnants en nombre suffisant et suffisamment formés. Donc les parents sont obligés de passer par des auxiliaires de vie scolaire privés, ce qui coûte extrêmement cher. Je pense que le gouvernement va avoir du mal, tout de suite, avec les réformes qu'il a décidé, à mettre les choses en place. Donc ça va prendre encore un peu de temps.

Si le gouvernement souhaite la mise en place de ce quatrième plan, peut-on dire que les trois précédents ont été des échecs, et pourquoi ?

Parfois, beaucoup d'argent est alloué à la cause de l'autisme, mais il n'est pas toujours distribué de la bonne façon. Par exemple, un précédent plan autisme a donné beaucoup d'argent à des centres médico-sociaux qui ne répondaient pas aux recommandations de la Haute Autorité de Santé. Donc, c'est un peu de l'argent gaspillé, finalement, parce qu'il aurait dû être redistribué correctement à des centres pluridisciplinaires qui répondaient à ces recommandations. Et puis, c'est pareil pour l'école : aujourd'hui, on est à 20% de personnes autistes qui ont accès à l'école primaire. Et pourtant, il y a une loi depuis 2005 et des plans autisme qui se sont succédé. Donc, il y a quand même une chose qui ne fonctionne pas en France : c'est que l'Éducation nationale fait quand même barrage à cette loi et à ces enfants autistes. Donc j'espère que Monsieur Blanquer, qui est ministre de l'Éducation nationale, va trouver les mots et les moyens d'intégrer vraiment nos enfants à l'école. Je souhaite qu'il réussisse, mais je pense qu'il va y avoir quand même une grande résistance : il y a beaucoup de syndicats de professeurs qui refusent l'application de cette loi, qui veulent la remettre en cause, qui se plaignent de la violence qu'auraient les enfants autistes vis-à-vis d'eux, qui se plaignent du manque de personnel à l'école... En France, on n'a pas la culture de la différence, ce qui n'est pas le cas d'autres pays. Dès lors, pour installer ça, il va falloir changer les mentalités dans beaucoup de domaines.

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