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Un fichier pour enregistrer les acheteurs de drones ? Les solutions préconisées pour prévenir les usages malveillants de ces engins sont encore loin du compte (mais personne n’a vraiment la réponse)
©Reuters

Prendre de la hauteur

Un rapport du Secrétariat Général de la Défense et de la Sécurité Nationale paru le 20 octobre entend combler les lacunes juridiques concernant l'utilisation civile de drones. Le rapport propose de ficher les acheteurs de drones et de responsabiliser les utilisateurs de drones notamment imposant aux futurs acquéreurs d'être informés par les constructeurs de bonnes règles de conduite.

Michel Nesterenko

Michel Nesterenko

Directeur de recherche au Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R).

Spécialiste du cyberterrorisme et de la sécurité aérienne. Après une carrière passée dans plusieurs grandes entreprises du transport aérien, il devient consultant et expert dans le domaine des infrastructures et de la sécurité.

 

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Ces mesures sont-elles à la hauteur des enjeux en matière de sécurité ? Quels sont les principaux risques de l'usage civil des drones qui ont guidé ces mesures ?

Michel Nesterenko : Les enjeux sécuritaires des drones sont multiples et diverses en fonction des utilisateurs et de la taille du Drone. Tout d'abords les utilisateurs. Il y a les institutionnels tels que Amazon, Google et autres. Ces acteurs sont par définition responsables et ils respecterons les règles de bonne conduite réglementaires ou non. Puis il y a les aero-modélistes pour eux aussi la discipline sera respectée. Ensuite viennent les utilisateurs qui conçoivent le drone comme un jeu. Ceux-là ne connaitront pas vraiment l'existence des règles. Donc il continueront les comportements à risque règlement ou pas. Puis viennent les Fous du Drone qui déjà aujourd'hui organisent des compétitions sauvages à très grande vitesse dans les garages en sous-sol. C'est aussi eux qui approchent régulièrement les avions de ligne. Violer la Loi et ne pas se faire prendre rajoutera du piment. Enfin il y les criminels et les terroristes contre ceux là la Loi sera inefficace. La taille du Drone est aussi importante car pour certains il faut un camion et pour d'autre un sac à dos suffit. Dans ce marché complexe le drone peut être acheté n'importe où en Europe ou ailleurs et transporté en France facilement et sans que personne ne le sache. Donc toute Loi qui sera imposée aux constructeurs devra être Européenne au minimum. Les risques d'accidents sont réels et bien réels. Tout d'abords un drone percute un piéton ou un autobus ou bien un avion de ligne avec 300 passagers voire plus. Il y a déjà eu plusieurs accidents évités de justesse. Certains pensent aussi que les drones pourraient transporter des explosifs bien que pour cela il devra s'agir de drones de grande taille donc plus repérables. Pour les personnalités du spectacle ou du monde politique le harcèlement des paparazi ne connaitra plus de limites ni de murs. C'est sans doute là ce qui fait réagir nos élus dans l'urgence. 

Le rapport propose également de mettre des radars sur chaque drone et de les immatriculer pour avoir un contrôle sur ceux-ci. Ces solutions seront-elles aussi efficaces que pour l'aviation ?

Mettre un radar sur caque drone est utopique en particulier pour les micro-drones. L'immatriculation sera elle aussi ingérable à supposer que nous puissions établir une règle européenne applicable au grand publique dans des délais raisonnables. La problématique pour l'aviation est tout autre. D'abords les constructeurs et leurs usines sont réglementés. Puis les utilisateurs sont eux aussi réglementés et les pilotes ont chacun une licence renouvelée régulièrement. Les réglementations sont harmonisée sur le plan Européen et Américain. L'avion, même les petits avions privés, ne sont pas des objets que l'on peut mettre dans le coffre de la voiture. Dans ce contexte la réglementation de l'aviation est efficace. 

Existe-t-il une solution idéale pour répondre à cet enjeu ? Qu'ont fait les autres Etats en la matière ? Ont-ils trouvé des solutions ?

Il est concevable de créer des zones protégées de manière électronique autour des sites stratégiques. En effet certains industriels parlent déjà de mettre en place des barrières électroniques ou de repérer les émissions radio qui permettent de contrôler le drone et peut être d'en prendre le contrôle. Ce sont là des solutions possibles qui pourraient voire le jour dans les mois ou années à venir. Mais si nous ne prenons garde la solution risque d'être aussi dangereuse que le drone. Pour éviter tout accident et interférence avec des avions de ligne, avions privés, ou bien les hélicoptères médicaux et même ceux de la Gendarmerie il faudra faire des tests très longs et coûteux sinon les interférences produites pour contrer les drones pourraient être la cause de perte de contrôle des avions modernes qui sont pratiquement tous bourrés d'électronique. Tous ceux qui ont pris un avion connaissent bien les limitations imposées aux téléphones portables.

Urgence il y a. Pour les fêtes de Noel de cette année les ventes de drones pourraient déjà se chiffrer par millions. Si l'achat est interdit en France il se fera en Grande Bretagne, Belgique, Luxembourg, Italie, Espagne ou autres pays au sein de l'Europe. Bref il faudra vivre avec ce nouveau risque dans les années qui viennent.

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