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Souffrez-vous de la « masquéite » ? Cette inflammation cutanée provoquée par le port du masque et qu’il faut traiter rapidement avant qu’elle ne dégénère
©FRANCK FIFE / AFP

Effets indésirables

Un dermatologue a tenu à alerter sur des éruptions cutanées et des irritations de la peau liées au port du masque. Cela peut-il être grave ?

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet est médecin des hôpitaux au CHU (Hôpitaux universitaires) de Strasbourg, chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg et conférencier.

 

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Atlantico.fr : Le dermatologue Dennis Gross met en garde contre une éruption cutanée qu’il nomme « maskitis » qu’on pourrait traduire par « masquéite ». En quoi le masque pourrait-il être responsable de ce type d’irritation ? Cela peut-il être grave ?

Stéphane Gayet : Le journal britannique « The Daily mail » relaie les constatations de ce dermatologue, le Dr Dennis Gross, spécialiste qui du reste commercialise tout une gamme de produits cosmétiques portant son nom.

Dans sa clientèle, il a constaté deux types de complications cutanées liées au port prolongé et répété du masque facial dans le cadre des mesures préventives vis-à-vis de la CoVid-19. Il distingue en effet la « mascné »et la « masquéite ».

La masquéite menace plus particulièrement les personnes à la peau sensible et plutôt sèche qui ont tendance à avoir des dermatoses du visage de type dermatite ou eczéma. Cette complication du masque concerne la zone du visage qui est frottée par le masque lors de ses mouvements (nez, menton, pourtour de la bouche, pommettes, tempes…). La cause en est la répétition de frottements sur une peau sensible aux irritations. La masquéite se traduit par des lésions qui évoquent de l’eczéma ou une dermatite, c’est-à-dire des rougeurs sèches et squameuses (on voit des sortes de petites croûtes fines à la surface) qui peuvent démanger.

La peau du visage est relativement vulnérable : elle est sensible à la chaleur, à l’humidité et aux frottements. Ces lésions apparaissent chez des personnes non professionnelles de la santé qui n’avaient pas l’habitude de porter un masque. De plus, les masques en cause sont fréquemment des masques de basse qualité et conséquemment souvent irritants en raison de leurs matériaux constitutifs et de leur texture.

Les lésions sèches et squameuses ne sont en principe pas graves, mais peuvent être fort gênantes, déjà sur le plan esthétique. Les lésions potentiellement graves sont celles qui sont infectées par des bactéries pyogènes (bactéries qui provoquent une formation de pus, comme les staphylocoques dorés et les streptocoques A et B).

Y a-t-il de bonnes pratiques à adopter pour ne pas voir sa peau abîmée par le port du masque ?

Les erreurs sont en effet fréquentes et les messages véhiculés par les uns et les autres, de bouche à oreille et surtout sur les réseaux sociaux, sont bien souvent en cause.

Il faut parler de la fabrication du masque, de son type, de son usage et des soins du visage. Les deux premiers points seront abordés dans la quatrième partie.

On utilise son masque comme on vit. Certaines personnes sont soigneuses et méticuleuses, d’autres obsessionnelles qui ont tendance à l’excès, d’autres un peu négligentes ou insouciantes.

Le fait de mettre son masque sous son nez l’expose à être souillé par les sécrétions nasales, ce qui lui est préjudiciable (mucosités, humidité). Le fait d’éternuer sous un masque comporte le même type d’inconvénient, en plus fort. Un masque que l’on utilise pendant de longues heures doit être préservé des souillures : le manipuler le moins possible et avec soin (mains propres).

On a énormément exagéré quant au danger que constituait un masque qui serait « contaminé par des bactéries ou des virus ». La probabilité pour qu’un masque recueille des virus SARS-CoV-2 d’une autre personne et que l’on se contamine ensuite à partir de cette charge virale ayant imprégné le masque est infime ; il faut simplement éviter de toucher la partie centrale d’un masque qui vient d’être porté en présence de plusieurs personnes à courte distance ; il faut rappeler que les coronavirus s’inactivent d’eux-mêmes sur une surface sèche exposée à l’air et aux rayons solaires, en six à huit heures au maximum. Pour ces raisons, cette idée reçue selon laquelle il faudrait laver son masque (à usage multiple) est un non-sens ; le lavage d’un masque ne se justifie que s’il est visiblement souillé (maquillage, nourriture…) et pour une raison surtout esthétique. Au contraire, le lavage d’un masque fait courir deux risques : l’altération de son pouvoir filtrant et son imprégnation par des produits lessiviels irritants et même toxiques. Récemment, nous apprenions que certaines personnes entretenaient leur masque à usage multiple avec de l’alcool, un produit hydroalcoolique pour les mains ou un produit chimique d’un autre type : c’est la pire des choses, c’est une pratique à bannir radicalement.

En ce qui concerne les soins de peau, il faut se laver le visage matin et soir avec une solution lavante douce à pH neutre ou légèrement acide. Les cosmétiques pour le visage doivent être utilisés avec parcimonie chez une personne portant un masque pendant de longues heures et il faut employer des produits simples, sûrs et de qualité.

Y a-t-il une différence entre la « maskitis » décrite par ce médecin et la « mascné » (l’acné provoquée par le masque) ?

Ce sont là deux types de lésions cutanées qui s’opposent un peu point par point. Il est essentiel de bien les distinguer, car les traitements à appliquer sont bien sûr fort différents.

La mascné menace plus particulièrement les personnes à la peau grasse qui ont tendance à avoir de l’acné, c’est-à-dire de l’inflammation congestive des follicules pilo-sébacés consécutive à un excès de production de sébum (hyperséborrhée). Cette complication du masque concerne la zone du visage qui est recouverte et déborde sur les zones découvertes. La cause en est la macération de la peau sous le masque favorisée par l’occlusion (chaleur, humidité) dont l’effet est majoré par les cosmétiques pas toujours bénéfiques que mettent fréquemment les personnes acnéiques. Le « masquené » se traduit ainsi par des lésions qui évoquent de l’acné, mais typiquement surtout dans la zone couverte.

Certains types de masques sont-ils plus irritants pour la peau ?

Ce n’est pas tant leur forme qui compte, que leur matériau constitutif et leur texture. Dans le domaine de la santé et singulièrement dans les hôpitaux et les cliniques (blocs opératoires, salles de soins post-interventionnels, réanimations…), il y a très peu de professionnels de santé qui souffrent de complications cutanées liées au port de masque. Cela s’explique en grande partie par la qualité de leur fabrication.

Les fibres synthétiques comme le polyester, le polyamide, le polypropylène… sont irritantes pour la peau. Les fibres naturelles végétales (coton, lin…) sont plus douces et moins irritantes. Parfois, ce sont les coutures, les élastiques et autres liens qui sont susceptibles d’irriter la peau.

Aujourd’hui, il existe une large variété de masques à usage « grand public » qui peuvent être utilisés dans le cadre des mesures préventives vis-à-vis de la CoVid-19. À part le type de fibre constitutif et la qualité de fabrication (vente en pharmacie, label, norme…), on ne peut que conseiller de faire des essais. Car autant de types de peau, autant de types d’activité professionnelle ou non (parole fréquente, transpiration ou pas…), et autant de besoins particuliers sur le plan du type et de la forme du masque. De la même façon qu’il faut trouver chaussure à son pied, il faut trouver masque à son visage, mais avec le souci constant de son efficacité filtrante.

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