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Emmanuel Macron s'entretient avec des employés lors d'une visite dans un supermarché pour discuter du partenariat avec les producteurs locaux Saint-Paul-de-Léon, le 22 avril 2020.
Emmanuel Macron s'entretient avec des employés lors d'une visite dans un supermarché pour discuter du partenariat avec les producteurs locaux Saint-Paul-de-Léon, le 22 avril 2020.
©STEPHANE MAHE / PISCINE / AFP

Bilan économique

67 millions d’habitants, 2300 milliards d’euros de PIB, 65,2 milliards d’euros de déficit commercial… La France est un grand pays, tellement grand que les chiffres que l’on évoque à son égard paraissent souvent démesurés. Ramenée à l’échelle d’un commerce de proximité, la perception est toute autre. 

Eugène Daronnat

Eugène Daronnat est membre du comité Exécutif d'Objectif France.

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C’est l’histoire d’un commerce de proximité, comme il y en a plus de 600 000 en France. Cette épicerie située dans le centre-ville d’une bourgade de 10 000 habitants est implantée depuis maintenant près de 50 ans. Pendant toutes ces années, elle a tout connu. Des périodes fastes avec un développement exponentiel dans les années 1970, une crise majeure qui affecta le pouvoir d’achat en 2008, l’implantation de nombreux concurrents dans les alentours, une épidémie et des fermetures administratives en 2020, mais malgré tout une certaine pérennité avec un attachement de la part des riverains. 

Oui mais voilà, derrière la vitrine, l’arrière-boutique est moins reluisante : cette épicerie est en effet à peine parvenue à dégager 260 000€ de chiffre d’affaires sur l’année 2020. Certes, c’est plus qu’il y a 5 ans, puisque le chiffre d’affaires dégagé était alors de 250 000€, mais à quel prix ? Ces années durant, tous les coûts ont explosé : salaires généreux, mauvaise gestion des ressources humaines, achats peu opportuns, diversification avec l’installation onéreuse d’un rayon de matériel de bricolage. En tout, les dépenses de ce commerce de proximité s’élevaient à plus de 380 000€ en 2020… 

Quand on le questionne sur cette situation, le gérant répond que «les finances sont saines», il en veut pour preuve que la situation financière est meilleure qu’au moment de la dernière crise économique qui avait vu son commerce fermer pendant plusieurs mois. 

En réalité, c’est grâce à un endettement important auprès de la banque du village et avec la caution solidaire d’un généreux voisin, dont l’entreprise industrielle fonctionne à merveille (principalement à l’export) que notre gérant peut se permettre de ne pas fermer boutique. 

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Au fond, cette situation n’a rien de surprenante ! A force de ne pas voir en face ses problèmes structurels, de « penser printemps » et de toujours remettre à demain les ajustements qui s’imposaient, notre gérant voit la survie de son commerce de proximité menacée. Les riverains pourraient être les premières victimes de cette situation, si d’aventure l’épicerie venait à fermer. 

La solution est pourtant simple : il faut remettre de l’ordre ! L’urgence est de tendre vers un équilibre des comptes, et ceci à la fois en générant plus de revenus, et en limitant les coûts. Générer plus de revenus ? Notamment par un assortiment de produits resserré, en se concentrant sur les références qui fonctionnent bien, avec l’achat de terminaux de paiement électroniques pour faciliter la fluidité des clients dans le magasin. Réduire les coûts ? Par exemple avec des salaires maitrisés et un intéressement pour les salariés en cas de bonnes performances de l’épicerie, avec la fermeture du rayon bricolage ultra-déficitaire. 

Cette histoire pourrait paraitre grotesque, ou sans intérêt car banale. Pourtant, elle décrit précisément la situation économique dans laquelle se trouve la France. L’État Français dépensera l’année prochaine 454 milliards d’euros, pour seulement 310 milliards de recettes, soit 46% de plus ! La situation s’est évidemment améliorée depuis l’année dernière, marquée par la crise économique la plus grave depuis plusieurs décennies. Seulement, elle s’est détériorée par rapport à la dernière année de référence, en 2019, année d’avant crise, avec en prime un endettement croissant financé grâce à des taux d’intérêt faibles qui ont permis de mettre la poussière sous le tapis. Pendant ce temps, nous achetons du temps à crédit. 

Pire, les dysfonctionnements de fond de l’État Français n’ont pas été résorbés depuis cinq ans, pas plus qu’ils ne l’avaient été durant les trente années précédentes. A l’image de notre commerce de proximité, l’État Français doit urgemment se concentrer sur l’essentiel, abandonner toutes les missions qui le parasitent, l’empêchent de créer de la valeur, du service public de qualité. A force d’être de partout, l’État est nulle part, mais laisse une addition salée aux générations futures. L’urgence est d’augmenter les ressources, tout en réduisant les dépenses et donc le périmètre d’action, plutôt que d’augmenter les dépenses en augmentant l’endettement, faute de ressources suffisantes. 

Les Français sont prêts à l’entendre, dès lors que ce diagnostic leur sera clairement et honnêtement présenté. Ils attendent un Président visionnaire, mais aussi un Président bon gestionnaire. Une vision sans moyen reste une incantation. Passons enfin à l’action. 

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