Insécurité
Sécurité, etc. quand une politique part en vrille
Le gouvernement est complètement dépassé par l'insécurité en France.
Xavier Raufer
Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date: La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers.
Mensonges, fraudes statistiques... M. Darmanin fait désormais dans l'outrance politique et dépassera bientôt la droite nationale... sur sa droite. Le voilà pour la "double peine" ! Attendons : bientôt, ce sera le bagne de Cayenne et le pilori au parvis de Notre-Dame.
Ne tremblons pas : cela n'affecte que le cyber-firmament de la com', tweets et communiqués n'atteignant que par exception la vie réelle des vraies gens, leur quotidien concret. Un exemple avant d'aborder le vif du sujet : la tonitruante "évacuation" des zombies-crackeux des confins de Paris et du Neuf-trois. Sur place, les habitants ricanent que les dealers africains - prévenus par qui ? - ont décampé la veille du fictif blitzkrieg, comme d'ailleurs une partie des toxicomanes du lieu, toute l'opération n'étant montée que pour la télé.
De tout cela bien sûr, "la vraie vie est absente", comme disait Rimbaud.
Parlons donc de la vraie vie ; d'abord du vélo, que la population est toujours plus poussée à pratiquer - santé, sobriété énergétique, etc. Or ce vélo si vanté, rien n'est fait pour empêcher qu'on le vole, et par quantités astronomiques, encore.
Voyons plutôt ces chiffres comparatifs officiels (an 2021) :
PAYS | QUANTITÉ | PROPORTION / 100 000 hab. |
France | 327 707 * | 483/100 000 |
Belgique | 10 542 | 91/100 000 |
Suisse | 3 100 | 29/100 000 À Lire AussiInsécurité : et s’il ne s’agissait que d’une question de volonté politique (ou la preuve par l’exemple du Salvador) ? |
* vols signalés, plus bien sûr, le "chiffre noir", écart entre infraction subie et infraction connue.
En comptant (petit minimum) 10% de vélos volés non-signalés, on en est, pendant que M. Darmanin "pilonne", à environ mille vélos volés par jour en France. La police, débordée, renvoie désormais les volés aux "dépôts de plainte en ligne" (effet, zéro).
Ce pillage systématique de la France, par des bandes le plus souvent allogènes, affecte bien d'autres secteurs.
• À la campagne et hors des métropoles :
- vols de moutons et autres ovins, caprins, volailles, etc. ; parfois par dizaines d'un coup,
- Pillage de récoltes, melons, fraises, tomates, asperges, courgettes, aubergines, ail, etc.
- Pillage des fermes (carburant des tracteurs, outils agricoles, métaux non-ferreux),
- pillage de cimetières, ornements en métal (cuivre, laiton, etc.) - Dans la Meuse, même, vol de deux corbillards d'une société de pompes funèbres !
- Vols massifs des câbles de cuivre de transport de données ; les habitants de villages ; aussi, des hôpitaux, commerces, entreprises, étant longtemps parfois, privés d'Internet et de téléphone.
• Plutôt dans les villes
- Cambriolages : il y en a tant désormais qu'on doit faire des "palmarès des villes les plus cambriolées". En tête - surprise ! - La Seine Saint-Denis. Les Français craignant de partir en vacances du fait des effractions étaient 4 sur 10 en 2012, ils sont 7 sur 10 en 2021. Pour les seuls logements (là aussi, faits signalés), 1 cambriolage en France toutes les 2 minutes en 2021,
- Pillage des chantiers, outils, matériaux, par des bandes organisées,
- Vols de carburants, stations-services, camions-citernes, parkings de camions, fermes et entreprises,
- Vols par centaines, partout en France, de pots catalytiques contenant des métaux dix fois plus précieux que l'or. Tout véhicule ainsi dépouillé est immobilisé, sa réparation dure et coûte des centaines d'euros.
- Marseille surtout (pour le moment) : désossage de véhicules en pleine rue ou dans des parkings soi-disant "sécurisés" : roues, portières, tableaux de bord, phares, etc. démontés, les carcasses abandonnées sur place.
Point commun de toutes ces exactions, leurs victimes : toujours des gens simples, cyclistes, automobilistes, artisans et commerçants, employés, habitants de la France profonde ou de la campagne, gens âgés. Nul de ces petites gens ne dispose d'un puissant lobby les protégeant et assiégeant les médias dits "d'information", seul moyen d'inquiéter tant soit peu M. Darmanin & co, tout là-haut, dans leur cyber-empyrée.
En outre, toutes ces catégories sociales modestes souffrent de l'implacable mépris de classe des domestiques de l'oligarchie - politiciens, journalistes, etc. - payés pour présenter l'insécurité comme un banal "sentiment" et de tous ces petits drames du quotidien, d'anodins "faits-divers".
Tout ce pillage devrait et pourrait bien sûr être prévenu ou réprimé. Ces pillards ne tombent pas du ciel, on connaît pour l'essentiel leurs repaires ; leurs us et coutumes. Mais pourquoi alors ne pas mettre fin à leurs exactions ? Il y a le mépris ci-dessus évoqué, bien sûr, mais surtout le fait qu'agir, dans notre monde où tout va vite, exige d'anticiper, de prévoir.
M. Darmanin et son équipe pourraient-ils agir vraiment ? Ramener tous ces pillages au-dessous du seuil de l'insupportable, ? Au-delà d'incantations creuses sur l'anticipation, sauraient-ils investir le crucial domaine-du-"pré" (pré-voir, pré-venir, pré-parer, pré-dire, etc.) ?
Voilà vingt-cinq siècles l'immense philosophe que fut Platon (Le Politique) a déjà, un peu cruellement, répondu à la question : "Il n'est pas donné à tout le monde d'apercevoir le mal dans son commencement. C'est le privilège des profonds politiques".
Tout à coup, on comprend mieux.
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