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Retraite à 60 ans : 
travailler moins pour gagner moins ?
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Le changement

Le Conseil des ministres se réunit ce mercredi. A l'ordre du jour : le décret rétablissant la retraite à 60 ans pour les personnes ayant commencé à travailler tôt. Tour d'horizon des tenants et aboutissants de la réforme...

Sandrine Gorreri

Sandrine Gorreri

Sandrine Gorreri est directrice de la Rédaction du mensuel de la Fondation iFRAP, Société Civile.

Ses domaines de compétences sont la création d'entreprises et d'emploi, les retraites et les politiques du logement.

Sandrine Gorreri vient de signer avec Philippe François une étude pour la Fondation iFRAP : Logement, programme pour un quinquennat (mai 2012).

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Atlantico : Le Conseil des ministres se réunit ce mercredi. A l'ordre du jour : le décret rétablissant la retraite à 60 ans pour les personnes ayant commencé à travailler tôt. La réforme devrait notamment permettre aux salariés ayant commencé à travailler à 18 ou 19 ans et ayant cotisé 41 annuités de prendre leur retraite à 60 ans, et non 62 ans. Combien de personnes sont concernées par cette proposition ? Quel est le coût de cette mesure ?

Sandrine Gorreri : Il s'agit d'étendre le dispositif carrière longue qui existe depuis 2003. Dans le dispositif carrières longues certains trimestres validés sont pris en compte comme des trimestres cotisés. Ainsi les périodes de service national et les périodes de maladie ou de maternité peuvent être comptées comme cotisées dans la limite de 4 trimestres pour le service national, et 4 trimestres au titre de la maladie ou de la maternité, soit un maximum de 8 trimestres. En revanche, le chômage indemnisé n'est pas considéré comme un trimestre cotisé ni les bonifications pour enfant.

Au départ, François Hollande avait parlé de trimestres cotisés, donc réellement travaillés. Mais depuis son élection, les déclarations se sont multipliées sur ce sujet. Ce serait le cas des congés maladie et maternité ainsi que du service militaire. Reste la question des bonifications pour enfant et des périodes de chômage indemnisé que certains syndicats veulent inclure. Il y a également le cas de congés pathologiques, des longues maladies. Ce qui est sûr ce sont les congés parentaux et les personnes ayant travaillé à 20 ans qui ne seront pas concernés. Problème : si on étend le dispositif faudra-t-il revenir sur le cas des travailleurs ayant commencé à travailler à 17 ans et avant et qui ont déjà bénéficié du dispositif dans le cadre de la la réforme Fillion/Woerth ?

Le PS a parlé de 130 000 à 150 000 personnes par an pendant la campagne alors qu'à peine nommé le Premier Ministre annonce le chiffre de 100 000 bénéficiaires. D'où vient la différence ? Même les syndicats semblent dire qu'ils ne savent pas exactement ce qui est pris en compte.

Au 31 décembre 2011, pour le régime général (Cnav), 38 810 personnes ont bénéficié du dispositif carrières longues sur 600 000 personnes qui partent à la retraite chaque année en moyenne. Pour Philippe Pihet, nouveau président de l'Arrco (FO), 57 000 carrières longues étaient « en stock » à cette date, c'est-à-dire 57 000 personnes pouvaient bénéficier du dispositif actuel. Il est donc possible que le chiffre initialement annoncé les ait inclus. En revanche, on ne sait pas si les fonctionnaires sont comptés ou non dans les chiffres du gouvernement. Les syndicats souhaitent que le dispositif leur soit étendu mais ils sont moins concernés par les carrières longues.

S'agissant des départs anticipés, depuis sa mise en place en 2004 le dispositif a bénéficié à 645 000 personnes mais le nombre est en chute ces dernières années sous l'effet du resserrement des conditions : 39000 personnes en 2011, 45 000 personnes en 2010.

Si l'on regarde le coût pour la CNAV du dispositif tel qu'il fonctionne actuellement on voit que pour 2009, les départs anticipés ont touché 25 000 personnes pour 139 millions d'euros, en 2010, 45 000 personnes pour 89 millions d'euros.

Si selon Les Echos le coût ne serait que de 2 milliards par an à l'issue du quinquennat et 800 millions la première année au lieu de 1 milliard, le Premier Ministre semble s'accorder à trouver des solutions dans le cadre de l'enveloppe de 5 milliards : «Nous avons évalué un plafond de dépenses de un milliard d'euros la première année, de 5 milliards au bout de cinq ans. Ces sommes sont financées par une augmentation de cotisations de 0,1% de la part salariale et de la part patronale. Nous partons du dispositif adopté pour les carrières longues» «La concertation permettra d'affiner les périodes prises en compte...» mais cette réforme devait obligatoirement rentrer dans les clous de l'enveloppe financière des 5 milliards.

Autres pistes : inclure certaines périodes de chômage dans les semestres «cotisés», et non plus simplement «validés». Quelles seraient les conséquences de l'application d'une telle mesure ?

C'est un point évoqué par certains membres du gouvernement et qui est aussi largement réclamé par la CGT et FO : Jean-Claude Mailly a déclaré qu'il ne comprendrait pas pourquoi les périodes de chômage ne seraient pas prises en compte. Mais Jean-Louis Malys, le Monsieur Retraites de la CFDT a lui déclaré "On n'imagine pas une telle extension du dispositif. On percute deux logiques, celle des carrières longues et celle des périodes de précarité et des carrières féminines. Ce sont deux sujets bien différents, deux problématiques à traiter séparément." Car la CFDT milite de façon assez solitaire actuellement pour la mise en place d'une réforme systémique : régime par points / régime par points notionnels et l'extension aux périodes de chômage perdrait de vue l'intérêt de la réforme systémique. Mais pourtant, François Chérèque se déclare satisfait par les annonces du gouvernement. Les autres syndicats sont plus partagés. Il faut dire qu'ils veulent aussi que l'avenir des retraites soit soutenable pour les retraites complémentaires. C'est l'autre enjeu du débat.

La réforme va couter 9 milliards d'euros d'ici 2017 à l'Arrco et l'Agirc et là le patronat ne veut pas entendre parler d'augmenter les cotisations et les syndicats ne veulent pas entendre d'une déconnection des conditions de départ entre les retraites de base et les retraites complémentaires : la seule solution est alors la baisse des pensions… Est-ce vraiment ce que souhaitait le gouvernement ?

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