Rendre la Justice à la place de la Justice : l’autre recul de la République que dévoile la multiplication des agressions « coco »<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Justice
Des habitants de Grande-Synthe ont rendu hommage à Philippe lors d'une marche blanche.
Des habitants de Grande-Synthe ont rendu hommage à Philippe lors d'une marche blanche.
©Denis CHARLET / AFP

Guet-apens

Le meurtre sauvage de Philippe à Grande-Synthe a mis en lumière un nouveau phénomène : les guet-apens tendus à ceux qui prennent le risque de rendez-vous galants sur des applications ou des sites que personne ne contrôle car ils sont installés et hébergés à l’étranger.

Olivier Cahn

Olivier Cahn

Olivier Cahn est Professeur de droit pénal à CY Cergy Paris Université au sein du Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (CESDIP) - UMR 8183.

Voir la bio »
Georges Fenech

Georges Fenech

Georges Fenech, ancien juge d'instruction, a présidé la commission d'enquête parlementaire consacrée aux attentats du 13 novembre 2015 et la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES). Son dernier livre est intitulé "L'ensauvagement de la France : la responsabilité des juges et des politiques" (2023) aux éditions du Rocher.

Il a déjà publié de nombreux ouvrages, parmi lesquels Gare aux gourous (2020), mais aussi "Face aux sectes : Politique, Justice, Etat" (1999) et "Criminels récidivistes : Peut-on les laisser sortir ?" (2007).

Voir la bio »

Gérald Pandelon

Avocat à la Cour d'appel de Paris et à la Cour Pénale Internationale de la Haye, Gérald Pandelon est docteur en droit pénal et docteur en sciences politiques, discipline qu'il a enseignée pendant 15 ans. Gérald Pandelon est Président de l'Association française des professionnels de la justice et du droit (AJPD). Diplômé de Sciences-Po, il est également chargé d'enseignement. Il est l'auteur de L'aveu en matière pénale ; publié aux éditions Valensin (2015), La face cachée de la justice (Editions Valensin, 2016), Que sais-je sur le métier d'avocat en France (PUF, 2017) et La France des caïds (Max Milo, 2020). 

Voir la bio »

Atlantico : L'agression et le meurtre de Philippe à Grande-Synthe illustre une récente tendance. Des guet-apens sont tendus à ceux qui participent à des rendez-vous galants sur des applications de rencontres ou sur des sites Internet comme Coco. Que savons-nous du nombre de ces agressions et de l’évolution des chiffres et des tendances à ce sujet ? Y a-t-il des chiffres ou une estimation du nombre de cas de chantage qui se font via les mêmes procédés ?

Gérald Pandelon : Permettez-moi d'abord un constat objectif : nos services de renseignements ne comptent plus en France le nombre de rendez-vous galants fixés sur les sites de rencontres qui se transforment en guet-apens où les victimes font de surcroît l'objet de violences extrêmes avant d'être dépouillées de leurs biens. L'année dernière, à Châtellerault, plusieurs personnes avaient été victimes de ce phénomène et les forces de l'ordre avaient pu mettre fin aux agissements d’une bande de "jeunes", selon l'expression désormais consacrée, qui sévissait sur les bords de Vienne. Dans ce cadre, quatre mineurs avaient été arrêtés et mis en examen pour extorsion et violences aggravées, avec armes. Plus récemment, c'est dans la Creuse que trois étudiants avaient pris l'habitude de piéger leurs victimes en passant par des sites de rencontres. La semaine dernière, Philippe Coopman, jeune homme de 22 ans, succombait à ses blessures après avoir été massacré à Grande-Synthe, dans le Nord de la France. Mais ce sont surtout les guets-apens homophobes qui viennent ensuite mettre l'accent sur leur dimension systémique car si, à ce stade, nous ne disposons pas de chiffres précis concernant le nombre de cas recensés concernant ce type assez nouveau de délinquance, force est d'admettre qu'elle tend à se développer puisque ce sont les mêmes infractions qui sont constatées au quotidien. En effet, il s'agit d'une tendance systémique dans la mesure où nous sommes en présence d’un phénomène, récurrent, avec des motivations et des modes opératoires similaires qui se répètent, sur l’ensemble du territoire. Les agresseurs agissent par homophobie, souvent parce qu’ils pensent que leurs victimes, dont certaines n’assument pas leur orientation sexuelle auprès de leurs proches, auront trop honte pour déposer une plainte. Mais ce qui surprend également c'est que cette nouvelle délinquance n'émeuve pas outre mesure la gauche française, habituellement si prompte à donner des leçons de morale et à trouver toutes les qualités aux personnes se réclamant de tendances LGBT. A regarder de près, il existe peu de collectifs spécifiquement gays se saisissant de ce type de questions en les politisant ou les réintégrant dans une grille de lecture ayant trait à une violence spécifique.

Georges Fenech : Il n'y a aucune estimation, aucun sondage, aucune statistique sur ces procédés de règlements de comptes ou de volonté de se comporter en justicier. Ce phénomène est en train de prospérer malheureusement, notamment par les réseaux sociaux. Des guet-apens sont tendus par des jeunes qui se croient investis d'une mission rédemptrice. Ces pratiques sont absolument intolérables et contraires à toute notion de justice. Il ne s'agit pas de défaillance de la Justice. En l'espèce, il s'agit d'un comportement chez de jeunes individus, hors-la-loi et sans aucune légitimité, sans aucune morale, sans aucune empathie, qui agissent avec une violence inouïe. Ces actes sont dignes du film « Orange Mécanique ».

Olivier Cahn : Il n’y a pas à ma connaissance de chiffres précis et fiables sur ce phénomène, ce qui ne peut surprendre puisque, d’une part, ce mode opératoire est récent, et d’autre part, compte tenu de la situation des personnes visées, il est vraisemblable que le « chiffre noir » - c’est-à-dire les infractions qui ne sont pas portées à la connaissance des autorités par les victimes - est important.

À ce stade, il faut donc se garder de la « fait-diversification » de certaines réactions politiques. 

Cependant, il faut se féliciter de la réaction forte des autorités répressives face à des comportements odieux, qui permettra - je l’espère -, d’entraver le risque d’imitation et de mettre en garde les victimes potentielles. 

Comment expliquer que certains se prennent pour des justiciers à la place de la Justice ? Est-ce parce qu’à leurs yeux la Justice est trop laxiste et ne fait pas son travail sur certains dossiers comme la pédophilie ?

Olivier Cahn : Je ne crois pas qu’il soit possible d’affirmer que la justice ne fait pas son travail en matière de lutte contre la pédocriminalité et les peines prononcées en cette matière montrent qu’elle n’est pas laxiste. En revanche, les moyens policiers et judiciaires sont probablement sous-dimensionnés pour lutter contre des formes de criminalités qui impliquent des enquêtes complexes. 

S’agissant des comportements de justice privée, ils sont récurrents en matière de pédocriminalité mais demeurent marginaux. Reste qu’il faut s’alarmer chaque fois que des individus se croient autorisés à se faire justice eux-mêmes. N’oublions pas que la concession à l’État du monopole de la force légitime et du droit de rendre la justice sont au fondement de notre Contrat social et que chacun doit s’y soumettre si nous voulons continuer à faire société. 

Georges Fenech : Ces agresseurs et ces délinquants ne sont pas des individus qui ont une réflexion aussi élaborée. Or, s’ils estiment que la Justice est laxiste, dans les faits cela est faux. Sur les actes de pédophilie, il y a notamment une jurisprudence très stricte des tribunaux. Il y a des services hautement spécialisés, à la gendarmerie ou à la police judiciaire, qui font un travail remarquable, à partir notamment de l'intelligence artificielle pour repérer sur les réseaux sociaux les pédophiles et tenter de les identifier et les interpeller. Il y a même la plateforme en ligne Pharos sur laquelle il est possible de déposer des signalements. Il y a même, au sein du parquet de Paris, des magistrats du parquet qui sont spécialisés dans toutes les infractions commises à partir des réseaux sociaux. Et lorsqu'il y a un passage à l'acte, ces services sont parfaitement outillés pour identifier les agresseurs, pour les interpeller et les juger.

Gérald Pandelon : La recrudescence du phénomène de justice privée est moins la résultante d'un laxisme judiciaire que de l'opinion croissante selon laquelle, même en cas de condamnation sévère, l’auteur des faits réitèrera son forfait. Condamner uniquement à une peine inférieure de 20 années de détention un "jeune" ayant volontairement ôté la vie à une victime qui ne demandait qu'à vivre paisiblement, est considéré par les familles comme insuffisant même si, en-soi, on ne saurait en conclure que la justice serait laxiste. Au-delà, la tendance qui se profile soulève à nouveau la question du rétablissement de la peine de mort car ce sont les mêmes qui expliquent être opposés au châtiment suprême qui considèrent de façon paradoxale qu'ils doivent se faire justice en infligeant à titre privé la mort. En réalité, ces justiciers ne sont pas à proprement parler opposés à la peine de mort mais plus précisément à ce que ce soit un État qui s'arroge le privilège suprême d'infliger une sanction capitale en en monopolisant la décision. Autrement dit, ils ne voudraient pas que cette décision leur échappent, qu'ils en soient dépossédés... Au surplus, les arguments des abolitionnistes, très souvent, n'en sont pas. Les abolitionnistes font reposer leur argumentaire sur des généralités concernant le « droit à la vie » ou « la dignité humaine » sans jamais interroger ces notions ou encore arguent-ils que l'idée de châtiment suprême ne serait plus dans "l'air du temps ». Si nous examinons ces arguments nous nous rendons compte qu'ils sont en réalité très fragiles et reposent presque tous sur une forme de chantage compassionnel. En effet, les abolitionnistes seraient des humanistes intégraux tandis que ceux qui n’excluent pas un rétablissement de la peine de mort seraient sans cœur. Pourtant, il est fort aisé de renverser l'argument en soutenant que les abolitionnistes ne se penchent pas assez sur la souffrance des victimes, eux qui ont tendance à absolutiser la souffrance des condamnés à mort. En réalité, loin d’être inspiré par un grand humanisme, il y a surtout de l’orgueil et de l’égoïsme chez ceux qui ont été à l’origine de l’abolition ; il fallait que, sous ce septennat, le châtiment suprême fut aboli afin que ces deux instigateurs, M.M. François Mitterrand et Robert Badinter devinssent immortels. Or, que disent les abolitionnistes quand ils sont confrontés à la réalité concrète d'un enfant ou d’un adolescent qui, après avoir été enlevé, torturé puis violé, a été sauvagement assassiné ? Peu de chose en réalité ou des banalités convenues sur l'horreur du crime en général. Silence sidérant venant de gens qui nous ont pourtant accoutumé à un tel déluge de mots sur la souffrance inhumaine que la loi infligerait aux criminels dans les prisons et les prétoires. Mais c'est un silence qui, malgré tout, en dit long. Tout se passe comme si nos grandes consciences cessaient d'être inspirées quand il n'y a plus rien à reprocher aux institutions ou à "la société" comme ils disent. Autrement dit, la « société" : voilà l'ennemi...

S’agit-il par ailleurs de l’expression d’une mentalité clanique avec l’émergence de catégories de la population qui ne reconnaissent pas l’autorité de la République et de ses lois mais se réfèrent seulement à leurs règles personnelles et aux codes moraux de leur milieu, qu’ils soient d’inspiration religieuse ou simplement communautaire ?

Olivier Cahn : C’est une question très délicate, qui appelle une réponse nuancée. Rappelons que - par définition - les délinquants ne respectent pas l’autorité de la République et se réfèrent à leurs règles et codes moraux. 

Néanmoins, si l’on considère les infractions qui nous intéressent en l’espèce, c’est-à-dire des infractions dirigées contre des personnes gays, il est indéniable qu’elles ont parfois une motivation religieuse ou communautaire. Il faut toutefois se garder de stigmatiser une communauté religieuse particulière puisqu’en pratique, ce sont bien des fanatiques de toutes les religions qui se livrent à de telles exactions. N’oublions pas que si des affaires récentes ont impliqués des musulmans, durant la discussion de la loi sur le mariage pour tous, les agressions contre des gays ont largement été le fait de catholiques. Enfin, les statistiques judiciaires établissent aussi l’implication de militants d’extrême-droite dans ce type de violences. 

Georges Fenech : Il est possible que cela soit lié à des influences de groupes claniques. Ces bandes organisées, et notamment dans le trafic de stupéfiants, exercent leur propre justice à coups de kalachnikovs pour occuper le terrain. Ces actions relèvent du grand banditisme. Ces individus sans foi ni loi s'exonèrent totalement des lois de la République. Pour préserver leurs activités criminelles et leurs affaires, ils n'hésitent pas à utiliser des jeunes, qui sont d'ailleurs de plus en plus jeunes, pour passer des contrats et éliminer la concurrence de manière violente.

Gérald Pandelon : Quand il existe une défiance vis-à-vis de l’institution judiciaire, c'est le code moral, la coutume ou l'identité clanique qui l'emporte sur la loi. Pour un nombre croissant de citoyens, la tyrannie judiciaire exercée par une minorité de magistrats risque d’aboutir à l’effet inverse de celui qui est recherché par le juge : la désobéissance civile face aux abus. La résistance à l'oppression figure d’ailleurs parmi les droits de l'homme reconnus par les déclarations de 1789 et de 1948, elle a été intégrée à la constitution française. Selon Henry David Thoreau, il est nécessaire d'être humain avant d'être sujet et son raisonnement s'appuie sur une distinction entre le juste et le bien. Le juste, entendu au sens du respect de la loi, ne mérite pas qu'on lui sacrifie le bien. De son côté, John Rawls, dans sa Théorie de la justice (1971), propose une justification de la désobéissance civile. Il la définit comme un acte public, non violent, contraire à la loi, mais perpétrée dans le but d'aboutir à une évolution de la loi. Il s'agit d'une action qui tend à dénoncer le non-respect des principes de la coopération sociale. La légitimité de cette désobéissance est conditionnée, selon lui, par le fait que les recours aient été épuisés en dépit de l’injustice persistante. Or, notre société est désormais marquée par un fort scepticisme envers la clairvoyance du juge, un nombre croissant de citoyens estimant même que des magistrats sont devenus dangereux car leurs pouvoirs sont bien souvent illimités alors que leurs compétences le sont parfois moins. Il faudrait donc avoir le courage de résister face à cette dérive. Dans certains cas la désobéissance a pu être pensée comme un devoir. C'est le cri d'Antigone dans la tragédie de Sophocle. Le respect suscité par les résistants n'est-il pas directement lié à leur capacité à désobéir à un pouvoir illégitime ? Peut-on pour autant institutionnaliser un tel droit au nom de la légitimité qu'on lui reconnaît sur le plan moral ? L'institutionnalisation n'est-elle pas contradictoire avec la notion même de désobéissance qui suppose une réaction imprévisible, spontanée, souvent émotionnelle ? 

A travers les agressions concernant les guet-apens et les pièges sur les sites Internet, qu’est-ce que traduit cette volonté des agresseurs de se faire justice eux-mêmes ? Qu’est-ce cela révèle sur la jeunesse, sur la délinquance et par rapport au respect des institutions de notre pays ?

Georges Fenech : Cette réalité traduit une crise de l'autorité, une crise des institutions. Ces jeunes n'ont plus peur, ni de la police ni de la Justice. Ils considèrent qu’ils détiennent un droit immanent à se faire justice eux-mêmes, ce qui est évidemment le contraire des règles de vie en société. Au sens institutionnel, l'Etat prend naissance le jour où la vengeance privée est abandonnée au profit d'un tiers, la Justice, pour réparer une infraction. C'est à partir de là, dans les sociétés antiques, qu'il y a une apparition de l'Etat et que la vengeance ne s’exerce plus. On confie ce soin à la société qui appliquera la Justice et réparera les préjudices. Se faire justice soi-même ou exercer une vengeance privée est un archaïsme et constitue un retour à l'état sauvage dans lequel les institutions ne sont plus respectées. Il y a une menace réelle pour la paix publique. Il faut évidemment traiter ce sujet de différents points de vue, notamment par une répression sans merci, mais surtout aussi à travers l’éducation de ces jeunes, la transmission de ce qu'est la démocratie, de ce que sont les institutions. Il n’est pas possible de se faire justice soi-même. La vengeance privée ne devrait pas exister. Il est important de dénoncer des délinquants si des infractions sont commises et de doit protéger les personnes et les biens, non pas en s'attaquant à des délinquants soi-même, mais en les dénonçant auprès de la Justice.

Ces agressions prennent souvent pour cible des pédophiles supposés ou des homosexuels. Qu’est-ce que cela révèle de la mentalité de ceux qui se livrent à ces agressions, notamment dans la confusion, qu’ils établissent entre pédophilie et homosexualité ?

Olivier Cahn : Il est probable, et déplorable, que cette confusion archaïque existe encore chez certains agresseurs, mais elle ne dit alors que les carences éducatives et/ou la bêtise qui les affectent…

En revanche, il est certain que la haine des homosexuels est encore prégnante dans de nombreuses cultures, y compris européennes - n’oublions pas les législations anti-LGBTQI adoptées en Russie ou en Hongrie - et qu’elle anime les fanatiques religieux et certains extrémistes politiques. Enfin, elle est aussi régulièrement exprimée par des adolescents, dans ce mélange de provocation et de fragilité qui caractérise cette époque de l’existence, comme un moyen de défier l’autorité et les institutions, ou - et cela est plus inquiétant - comme le symptôme du basculement d’une minorité d’entre eux dans l’adhésion à des préceptes incompatibles avec les valeurs de la République. 

Gérald Pandelon : Ce sont bien souvent les personnes qui revendiquent de la façon la plus radicale une tolérance qui serait absolue et sans entraves qui en réalité sont celles qui font montre de la plus grande intolérance. On connaît tous la phrase de Montesquieu : "J'aime l’humanité ce qui me permet de haïr mon voisin". D'ailleurs, sans rentrer ici dans le débat philosophique, aimer l'humanité est-ce vraiment un sentiment naturel ? Articulé à votre question, il convient d'admettre que de plus en plus de personnes considèrent que la pédophilie constituerait à juste titre le crime le plus grand et le plus grave de l’humanité. C'est un euphémisme que de constater que les militants pédophiles peinent à faire admettre la légitimité de leur attrait. Certains psychiatres affirment même qu’il est toujours surprenant d’entendre en psychothérapie les pédophiles se justifier et surtout essayer de convertir le thérapeute à leur conception. Ils sont, en raison de leur perversion, hautement manipulateurs. Tous leurs mots prouvent qu’ils ont tort. Qu’ils admettent un trouble ? Alors cela prouve qu’ils sont bien atteints. Qu’ils le nient ? Alors cela prouve qu’ils le sont encore plus car ils sont dans le déni. Leur position est donc intenable. C'est la raison pour laquelle nous assistons à une recrudescence d'agressions à l'encontre de personnes homosexuelles dont les propos ne sont suffisamment clairs pour se différencier de la perversion pédophile. D'ailleurs, des hommes politiques et écrivains de premier plan n'ont-ils pas effectués les louanges d'une telle orientation de nature criminelle sans encourir jamais les moindres sanctions pénales ?

Que faire pour endiguer ce phénomène, ces agressions et ces guet-apens qui se multiplient sur Internet au nom d'une forme de justice qui n'en est pas une ? Est-ce que l'État a les moyens de lutter contre cette dérive et notamment sur Internet ?

Olivier Cahn : Il n’existe aucune solution miraculeuse mais la combinaison de la surveillance des auteurs potentiels, de la répression inflexible de toutes ses manifestations, de l’intransigeance sur les valeurs de la République et de l’éducation obstinée à ces dernières pourrait être efficace.

Georges Fenech : Les services spécialisés disposent d’outils pour repérer ce genre de dérives et ces projets criminels. Des outils technologiques très performants existent, notamment à partir de la recherche sémantique et de l'intelligence artificielle sur les réseaux. Ces techniques sont assez similaires aux méthodes déployées dans le cadre de la lutte contre le phénomène de radicalisation et du terrorisme. Très en amont, les services de renseignement travaillent sur ce type de délinquance via le darknet, scrutent les échanges privés sur des messageries comme Telegram. Des moyens de lutte existent. La solution passe aussi évidemment par l'éducation, la prévention, la responsabilité parentale.

Gérald Pandelon : S'agissant de votre question précédente, il conviendrait que le juge sanctionne très sévèrement les actes pédophiles afin que l'homosexuel non pédophile ne puisse être apparenté à ce type de criminels. C'est par son action que l'institution judiciaire pourra faire cesser l'amalgame entre pédophilie et homosexualité donc le rejet homophobe. D'ailleurs, où placer la frontière, pour un enfant adopté, entre l’homosexualité et la pédophilie ? Si le tabou immémorial du mariage hétérosexuel vient à sauter, qui s’opposera désormais à ce que d’autres tabous le concernant, bien moins anciens et universels, ne tombent à leur tour ? Comment s’opposer demain à la polygamie en France, principe qui n’est tabou que dans la civilisation occidentale ? Pourquoi l’âge légal des mariés serait-il maintenu ?

Le rapport Sauvé (5 octobre 2021) a bien montré trois choses : la massivité du phénomène des abus sexuels sur mineurs dans la société, sa prévalence dans l’Église et le fait que, dans cette dernière, 80 % des victimes sont des garçons, souvent âgés de 10 à 13 ans, alors que c’est l’inverse dans le reste de la société (70 % de filles, plutôt de 15 à 17). Or, autant on a commenté abondamment les deux premiers faits, autant le troisième est resté jusqu’à présent dans l’ombre. Ce qui ressort pourtant bien du rapport, c’est la prévalence dans l’Église, parmi les abuseurs, d’une forme d’homosexualité pédophile et éphébophile, qu’on appelait jadis « pédérastie ». Elle était déjà bien repérée, dans les années 1950-1960, par les psychiatres ou les spécialistes du problème dans l’Église. Le rapport vient confirmer le phénomène, mais on a l’impression qu’il hésite un peu à le penser. Le problème est sensible parce qu’il attire l’attention sur deux autres faits embarrassants : la prévalence du recrutement homosexuel dans le clergé, d’une part, et la surreprésentation des rapports de même sexe parmi les abus recensés, y compris en population générale, de l’autre. Le rapport ne calcule pas ce dernier taux, mais on peut le faire à sa place : il tourne probablement autour de 30 %. On voit la disproportion par rapport à la part probable additionnée de l’homosexualité et la bisexualité dans la société globale.

Est-ce que le fait de réformer la Justice ou de donner toujours plus de moyens à l’institution judiciaire pourraient-ils endiguer cette volonté de recourir à des formes de vengeances personnelles ?

Georges Fenech : La seule manière pour des particuliers privés d'aider la Justice est sous forme associative. De nombreuses familles se sont regroupées en associations pour alerter les pouvoirs publics, pour accompagner les victimes dans leurs démarches, je pense notamment à des associations fondées par des pères de famille qui ont perdu leurs enfants, assassinés par des tueurs en série. Jean-Pierre Escarfail a fondé l'Association pour la Protection contre les Agressions et Crimes Sexuels (APACS). Un autre exemple concerne l’APEV, l’Aide aux Parents d'Enfants Victimes. Ces associations font d'ailleurs appel à d’anciens gendarmes, à d’anciens policiers qui les aident dans la recherche de la vérité, dans l'aide aussi auprès d’enquêteurs et de la justice. Il y a aussi l’UNADFI, l’Union nationale des associations de défense des familles et de l'individu victimes de sectes, qui protège beaucoup les victimes des escrocs et des sectes et qui est reconnue d'utilité publique, qui peut saisir la justice elle-même. Il y a des associations, des groupes ou des familles qui aident la Justice. Cela est bien différent des projets criminels et des tentations de se faire justice soi-même.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !