Conférence
Qui sait faire de l’anticipation stratégique ?
Une importante conférence se tiendra le 30 novembre au Cnam Paris.
Xavier Raufer
Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date: La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers.
Réalité première : Dans un monde où l'État-nation doit toujours plus se défier du choc stratégique inopiné (11 Septembre... Gaza...) ; monde où, moins que jamais, l'ennemi ne va de soi, nulle surprise n'est bonne. Et ça ne date pas d'hier : premier ministre à Londres (1957-1963) Harold Macmillan se voit demander ce qu'il craint le plus. Sa célèbre réponse : "Events, dear boy, events". Les événements à venir, bien sûr.
D'où, la nécessité de prévoir, d'anticiper et plus encore dans l'actuel désordre mondial - mais est-ce simple ? Non : même une superpuissance risque l'aveuglement. En juillet, l'un des Think Tanks majeurs des États-Unis (Aspen Institute) organise, en mode What Next, la grande conférence stratégique de 2023. Sur quatre jours, le gratin politique, académique, militaire et médiatique des États-Unis (des ministres et sénateurs, la CIA...) phosphore sur la prospective, le high-tech, la diplomatie. Mais RIEN sur ce deuxième pôle mondial (BRICS, Organisation de la coopération de Shanghai, etc.) émergeant dans l'immense Eurasie. Rien surtout, sur l'imminent cataclysme au Moyen-Orient, dont le drame de Gaza n'est peut-être qu'un prélude - qui anéantit en tout cas, sans rémission, dix ans de diplomatie de Washington.
L'aveuglement est-il fatal ? Faut-il renoncer à prévoir ? Non : une voie existe vers la prospective stratégique et la recherche criminologique y joue un rôle moteur. Bien sûr, tous ses sujets d'étude, criminels, terroristes, vivent cachés, sont clandestins ; pour eux tous, être vu, c'est être prévisible ; et là, élimination par d'autres bandits ou arrestation par la police. D'où le besoin des criminologues d'en savoir plus et plus vite. Nous progressons dans cette voie, en équipe avec des concepteurs d'une intelligence artificielle originale, dont l'ambition n'est pas d'envoyer l'humain à la casse, mais, bien au contraire, de potentialiser ses capacités ; de lui offrir des outils illustrant la devise des Jeux Olympiques "Plus vite, plus haut, plus fort".
Le 30 novembre 2023, au Cnam- Paris, se tiendra sur ce thème une conférence sur le thème
HORIZON 2030 : DÉTECTER, DÉMONTRER, DÉCIDER
Intelligence artificielle, géopolitique, anticipation
Sur inscription, elle est ouverte à tous ceux que ces problématiques intéressent :
https://my.weezevent.com/horizon-2030-detecter
(Nom, prénom, mail - dans un amphithéâtre du CNAM-Paris)
Dans un monde surinformé mais désinformé, penser la sécurité, c'est parer aux chocs stratégiques. D'où, le crucial besoin d'un renseignement d'alerte pour voir devant nous sur la route, le réel observable, réduire l'erreur décisionnelle et repérer à temps les menaces (entités, flux, territoires, situations).Dirigeants (militaires, renseignement, sécurité) stratèges politiques ou d'entreprises : face aux nouveaux périls, mais aussi aux illusions et impasses, ce colloque ouvrira une réflexion collective et concrète sur rôle crucial des intelligences artificielles en matière de prévision, de décèlement précoce et de prévention
Mais en quoi consiste le fait d'anticiper ? Pour Martin Heidegger (Hymnes de Hölderlin, la Germanie, le Rhin, Gallimard, 1988), cela revient à scruter "L'abîme incréé où tremble et est contenu tout ce qui s'apprête à survenir". Descendons des pics d'une phénoménologie superbement poétique vers les exigences immédiates - et les craintes - du stratège, du chef d'État ou du patron d'une multinationale. Ici, prolonger les courbes, chercher dans le passé la trame du futur conduit à l'échec garanti ; et quatre mots cachent une infernale complexité : "L'incertitude n'est pas modélisable". Devant nous sur la route, l'incertitude c'est l'à-venir. Or d'usage, les ordinateurs et désormais, les intelligences artificielles, modélisent. Ils font "tourner" une maquette" du sujet étudié, sidéralement plus vite que l'humain ; tordent ce sujet en tous sens et gagnent beaucoup de TEMPS. Et si cela fonctionne en général (nouveau vaccin... high tech...) l'échec est absolu dans la dimension temporelle. Casser la barrière du futur a souvent été tenté depuis la 2e guerre mondiale : un échec après l'autre dans cette voie dite du "tout-calculable" - même si la cybernétique résulte de ces premières tentatives.
Anticiper serait-il donc pensable, à partir du théorème géopolitique + intelligence Artificielle ? Réflexions et début de réponse, lors de la conférence du 30 novembre prochain.
En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.
Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !