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Quand la colère des peuples se réveillera face à l'incroyable préférence des classes dirigeantes françaises pour le chômage
©REUTERS/Philippe Wojazer

Ça va barder !

Depuis près de 30 ans, la rentabilité du capital n'a cessé de se dégrader en France en raison de la complexité du code du Travail, empêchant ainsi les entrepreneurs d'embaucher et provoquant la hausse du chômage. Une situation que les dirigeants français ne semblent pas prêts à changer.

Charles Gave

Charles Gave

Charles Gave est président de l'Institut des Libertés, un think tank libéral. Il est économiste et financier. Son ouvrage L’Etat est mort, vive l’état  (éditions François Bourin, 2009) prévoyait la chute de la Grèce et de l’Espagne. Il est le fondateur et président de Gavekal Research et de Gavekal Securities, et membre du conseil d’administration de Scor.

 

 

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De temps en temps le découragement me submerge tant la situation en France est kafkaïenne. Nous venons de connaitre un drame typiquement français, que je vais essayer de résumer de mon mieux. Notre pays, comme chacun le sait, souffre d’un taux de chômage élevé qui engendre des drames humains considérables ainsi que des coûts financiers de plus en plus insupportables.

A l’origine de ce fléau, nous trouvons une cause unique : la rentabilité du capital investi en France est non seulement faible, très faible, mais de plus en baisse constante et régulière depuis des décennies, comme en fait foi le graphique suivant.

La ligne rouge représente ce que l’INSEE appelle la marge brute d’autofinancement des entreprises installées en France, en pourcentage du PIB.

Il ne s’agit donc pas des bénéfices du CAC 40 mais de la mesure la plus simple de la rentabilité du capital investi EN FRANCE.

Ce ratio entre deux flux, les profits et le PIB a été avancé d’un an et demi, c’est-à-dire poussé sur la droite d’un an et demi. (ie: projection)

La ligne bleue quant à elle représente le taux de chômage en pourcentage de la population active.

Quelques remarques sur ce graphique s’imposent à ce point de l’analyse.

  1. 1. La rentabilité du capital en France a baissé prodigieusement de 1974 à 1985 qui furent les années d’abord du " libéralisme avancé ", grande idée du désastre Giscardien, suivies par les années où le programme commun fut appliqué.  De 1985 à 2008, nous avons eu une stabilisation aux alentours de 23 % du PIB. Depuis 2009, nous avons perdu encore quatre points de rentabilité.
  2. 2Le taux de chômage SUIT la rentabilité des entreprises avec un délai moyen d’environ 18 mois. La relation est de la baisse de la rentabilité au chômage et non pas comme le croient les Keynésiens du chômage à la rentabilité. (et que personne ne vienne me parler de la poule et de l’œuf…)
  3. 3. Ce que les statisticiens appellent le taux de corrélation entre les deux variables est aux alentours de 90 %. Le carré du taux de corrélation s’intitule le coefficient de détermination et il est donc de 81 %. Cela veut dire que 81 % du taux de chômage est déterminé par la rentabilité du capital investi dix huit mois plus tôt.En termes clairs, cela signifie que si la rentabilité du capital baisse de deux points, le taux de chômage monte de deux points 18 mois plus tard…
  4. 4. Comme la rentabilité du capital investi vient de remonter d’un point en raison de la dévaluation de l’euro, il est probable que le chômage va baisser dans les 18 mois qui viennent, ce qui permettra à monsieur Hollande de nous expliquer qu’il a réussi son pari de " renverser " la courbe du chômage.

Ces points étant acquis et vérifiables dans TOUS les pays du monde, que se passerait-il dans un pays normal si le but réel était de faire baisser le chômage ?

Les hommes politiques devraient s’interroger sur la baisse structurelle de la rentabilité du capital en France et une fois le diagnostic fait, prendre des mesures pour y remédier.

D’après nombre d’études internationales faites par l’OECD ou le FMI, l’une des causes principales de cette baisse structurelle serait que le code du Travail est d’une complexité inouïe ce qui empêcherait les embauches par les entrepreneurs. Et à ce sujet, nous venons d’assister à un psychodrame totalement français.

Une réforme du code du Travail vient d’être proposée et je dois confesser que je n’ai pas beaucoup étudié son contenu tant j’étais sûr qu’en fin de parcours, toutes les " forces de progrès " se ligueraient pour empêcher tout changement. Et bien-sûr, je me suis trompé, et je n’ai pas été déçu en bien, comme disent les Suisses.

Rien n’a changé, si ce n’est que le président a d’abord rajouté quelques complications visant à renforcer le pouvoir des syndicats dans les PME et TPE mais qu’en plus le point d’indice des fonctionnaires a été augmenté, ce qui coutera au budget de l’Etat environ 7 milliards d’euros. Voila qui risque d’empêcher le chômage de baisser comme il aurait dû le faire si monsieur Hollande ne s’en était pas mêlé.

Devant un tel désastre, l’observateur non-partisan doit se poser la question : pourquoi cette préférence pour le chômage de la part de notre classe dirigeante ?

A cette question, il existe deux réponses non mutuellement exclusives.

  1. 1. Une incompétence inimaginable. Les hommes qui nous dirigent seraient marxistes et penseraient que l’économie est un gâteau de taille fixe qu’il convient de partager. Et, en bonne théorie marxiste, la plus-value, c’est-à-dire le profit, n’a aucune justification, ni économique, ni morale. Il s’agit d’un vol et leur rôle est donc de punir les voleurs.Ils ne comprennent pas que le profit est la rémunération du risque comme l’ont montré Schumpeter et Solow et donc leur but est de capturer ce qui pour eux est une rente injustifiée, pour l’accaparer au profit de leurs troupes. Tant qu’a faire de voler, autant que ce soit à leur profit.
  2. 2. Un enfantin machiavélisme politique. Pour eux, hommes de l’appareil étatique et socialistes (ce qui revient au même), maintenir une majorité de Français dans une situation de dépendance et de précarité, c’est assurer leurs réélections. A la masse des fonctionnaires qui votera toujours pour eux, on peut rajouter l’ensemble de ceux qui sont sans emploi et que l’on entretient à grands coups de prébendes. Si en plus, on réussit à créer une espèce d’apartheid grâce auquel un tiers des Français n’a pas son mot à dire lors des élections, alors les deux partis de gouvernement (socialistes de gauche et socialistes de droite tels Giscard, Chirac ou Sarkozy) qui suivent tous la même politique  peuvent alterner au pouvoir en ne recueillant qu’un peu plus du tiers des votes. Le bonheur total.

Voila où nous en sommes.

Toynbee, le grand historien anglais, avançait que le rôle des élites dans un pays était de répondre aux défis qui se posaient à la société. S’ils n’y arrivaient pas et apportaient de fausses solutions, alors les mêmes défis se représentaient… jusqu’à ce que les élites soient changées, au besoin de façon révolutionnaire, ce qui entrainait un changement de régime. En cas de nouvel échec, le pays, la société ou la civilisation, pouvaient disparaitre…

On songe à l’Amérique Indienne dont la Civilisation a disparu lorsque les Conquistadores sont arrivés.

On peut citer l’Allemagne en 1934 après le Traité de Versailles de 1918 qui consacrait le suicide de l’Europe.

On songe à l’URSS qui a crevé du marxisme.

De nos jours, on peut mentionner le Moyen et le Proche-Orient.

On ne peut s’empêcher de citer aussi les institutions bruxelloises qui toujours apportent les mauvaises réponses (euro, politiques migratoires, etc.…) aux questions qui tracassent les peuples.

Nous en sommes là et le salut ne viendra pas d’un homme providentiel mais ne peut venir que du peuple français qui devra se lever et faire entendre sa voix.

Déjà, les voix des peuples polonais, hongrois, américains, anglais se font entendre.

Les élites devraient se méfier de la colère des peuples.

Cet article a été initialement publié sur le site de l'Institut des Libertés

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