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Les parents mariés font-ils des enfants plus riches ?
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Amour, gloire et richesse

D'après un chercheur de l'université de Virginie, les enfants élevés par des parents mariés et n'ayant pas vécu de séparation réussiraient mieux leur vie professionnelle. Une donnée américaine qui ne se vérifierait pas en France.

Gérard  Neyrand

Gérard Neyrand

Gérard Neyrand est sociologue, est professeur à l’université de Toulouse), directeur du Centre interdisciplinaire méditerranéen d’études et recherches en sciences sociales (CIMERSS, laboratoire associatif) à Bouc-Bel-Air. 

Il a publié de nombreux ouvrages dont Corps sexué de l’enfant et normes sociales. La normativité corporelle en société néolibérale  (avec  Sahra Mekboul, érès, 2014) et, Père, mère, des fonctions incertaines. Les parents changent, les normes restent ?  (avec Michel Tort et Marie-Dominique Wilpert, érès, 2013).
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Dans un article publié sur The Atlantic(voir ici), un universitaire américain (W. Bradford Wilcox, University of Virginia) estime que peu importe le niveau social, les enfants élevés par des parents non séparés ont statistiquement beaucoup plus de chances d’obtenir un diplôme que ceux dont la famille est divisée. La stabilité familiale est-elle effectivement davantage porteuse de réussite pour les enfants que le niveau de vie ?

Gérard Neyrand: L’impact des séparations conjugales varie selon les sociétés, et leur type de fonctionnement. Nous parlons ici d'une étude américaine. Le mariage a sans doute plus d’importance aux États-Unis que dans la société française, la religion y a plus d’importance. Les séparations conjugales ont donc plus de conséquences aux États-Unis. On ne peut pas isoler des variables, il faut tenir compte de l’ensemble du contexte social dans lequel se situent les sociétés. En France, dans les années 1960, quand la famille était fondée par le mariage, il y avait un taux de divorce inférieur à 10 %, se séparer avait un impact social très fort, divorcer était difficile. Aujourd’hui le taux de divorce est de près de 50 %, bien que ce soit difficile pour les individus qui se séparent, cette étape est devenue relativement banale. La situation des enfants après séparation est devenue beaucoup plus facile, ils ne sont pas stigmatisés. L’enquête française établie il y a quelques années sur l’impact de la séparation sur les résultats scolaires des enfants, montrait que cet impact était très faible. Les chercheurs constataient que les enfants de parents séparés faisaient des études un peu moins longues, mais ce n’était pas lié à un échec scolaire. Vivant avec un seul parent, ils ne préfèrent pas faire d’études trop longues pour ne pas être une charge pour les parents. L’équilibre psychique des enfants et leurs résultats scolaires, passé le premiers moment où les parents se séparent, ne sont pas plus mauvais dans les familles ayant subi une séparation. J’ai d’ailleurs constaté dans mon enquête sur la résidence alternée que les enfants en résidence alternée avaient des meilleurs résultats que les autres.  Pourquoi ? Parce que les parents s’en occupaient à tour de rôle. Chacun suivt la scolarité de façon poussée. La scolarité n’est pas autant suivie lorsque les parents restent unis.

Cette étude pose la question du déterminisme : les enfants dont les parents sont séparés partent-ils dès le départ avec un net désavantage dans la vie ?

Il n’y a pas de déterminisme, tout dépend de la situation. Cela dépend de la relation que l’enfant a avec ses parents ou ses beaux-parents. A priori les études françaises ne montrent pas ce résultat.

Le couple monogame est une construction sociale, artificielle, ce qui signifie que d’autres modèles peuvent exister. Mais est-ce à dire que de toutes les autres structures d’éducation imaginables, il reste le mieux adapté pour assurer la réussite des enfants dans leur vie d’adulte ?

Pendant longtemps, dans les années 1950-1960, on pensait que la seule bonne éducation était à l’intérieur de la famille biparentale. Depuis, les recherches anthropologiques et sociologiques ont montré qu’il y avait des possibilités d’éducation qui n’étaient pas forcément traumatisantes, ou bien d’autres modes d’éducation plus collectifs comme dans les Kibboutz. Il n’y a pas de nécessité structurelle à ce que l’enfant soit élevé dans le modèle biparental, mais puisque c’est le modèle de notre société, l'enfant aura moins de mal, effectivement, à se sentir stabilisé. Le problème vient de la stigmatisation de la société ressenti par l'enfant. Dans le cas des familles homoparentales, nous entendons souvent les enfants se plaindre des railleries de leurs camarades. Ne pas vivre dans un modèle dominant est toujours plus difficile face au poids social et de l’entourage qui nous ramène toujours à ce modèle. Mais on ne peut pas postuler qu’une situation soit meilleure qu’une autre.  Ce qui est important pour l’enfant est d’avoir une relation affective et riche avec les personnes qui l’éduquent, peu importe qu’ils soient des parents adoptifs, adoptifs ou des personnes qui sont en position de parents. Ce sont les mêmes types de liens. On accepte aujourd’hui beaucoup mieux les personnes qui vivent de façon atypique. Nous l’avons bien vu avec le débat sur le mariage pour tous. Nous sommes dans un mouvement progressif de diminution des conflits autour de cette question.

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