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Pourquoi le FN a adopté une attitude prudente vis-à-vis de la loi Travail
©Reuters

Paradoxe ?

Le jeudi 17 mars, soit 8 jours après la première journée de mobilisation contre la loi Travail, Marine Le Pen a médiatiquement pris la parole sur ce sujet sur RTL. Ce retard à l’allumage peut être perçu comme une déclinaison de la nouvelle stratégie de communication de la leader frontiste visant à ne plus saturer les médias et à espacer ses interventions. Mais on peut aussi y voir la volonté de trouver un point d’équilibre entre les différentes sensibilités dissonantes ayant pris position au sein du mouvement sur ce conflit.

Philippe Bilger

Philippe Bilger

Philippe Bilger est président de l'Institut de la parole. Il a exercé pendant plus de vingt ans la fonction d'avocat général à la Cour d'assises de Paris, et est aujourd'hui magistrat honoraire. Il a été amené à requérir dans des grandes affaires qui ont défrayé la chronique judiciaire et politique (Le Pen, Duverger-Pétain, René Bousquet, Bob Denard, le gang des Barbares, Hélène Castel, etc.), mais aussi dans les grands scandales financiers des années 1990 (affaire Carrefour du développement, Pasqua). Il est l'auteur de La France en miettes (éditions Fayard), Ordre et Désordre (éditions Le Passeur, 2015). En 2017, il a publié La parole, rien qu'elle et Moi, Emmanuel Macron, je me dis que..., tous les deux aux Editions Le Cerf.

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Le 22 février, Florian Philippot déclarait au micro de RMC : « On nous avait annoncé un choc de simplification, on a un choc de précarisation. On est dans la précarisation maximale des salariés", raillant  "le recyclage de vieux projets du Medef ». Il durcira quelques jours plus tard sa critique en qualifiant ce projet de loi « d’infâme ». Mais une nouvelle fois, Marion Maréchal Le Pen fit entendre un son de cloche nettement différent. La députée du Vaucluse estima ainsi le 9 mars que ce projet de loi « pouvait porter de bonnes questions mais apportait un certain nombre de mauvaises réponses [ ] Je pense que si on peut permettre de la flexibilité, c’est à mon avis indéniable, il doit quand même y avoir des grands principes qui demeurent à travers le contrat de travail, il doit y avoir l’obligation morale lorsque l’on travaille plus d’être payé plus ». Réagissant aux propos de Florian Philippot, Robert Ménard, compagnon de route du FN déclara quant à lui « Ce sont exactement les mêmes mots qu’un cégétiste il y a 20 ans, c’est un vocabulaire d’un autre temps sur une réalité des entreprises infiniment plus complexe ». Marine Le Pen dut donc opérer un recadrage et trouver un dénominateur commun. Pour faire tenir ensemble la ligne « sociale » et la ligne « libérale », la dirigeante frontiste décida d’attaquer cette loi sur deux angles faisant consensus au sein du mouvement. Pour elle, « la loi El Khomri n’était pas la feuille de route du gouvernement, c’est la feuille de route de Bruxelles » pointant ainsi une nouvelle fois le fait que le gouvernement se soumettrait à l’Europe et second angle d’attaque : la crainte d’un renforcement du communautarisme car la loi reviendrait selon elle à légaliser les revendications communautaristes dans l’entreprise puisque selon l’article 6 de ladite loi, il reviendra aux entreprises « de motiver toute limitation ou restriction » de la pratique religieuse dans leurs locaux, ce qui aura pour conséquence d’ouvrir de nombreuses brèches et d’aboutir à de multiples contentieux juridiques.    

1- Un électorat frontiste massivement hostile à la loi Travail… 

Si l’attitude Marine Le Pen a été extrêmement prudente et tactique sur ce dossier, ce n’est pas uniquement pour ménager et faire la synthèse entre les deux sensibilités incarnées par sa nièce et par Florian Philippot. Comme son père par le passé, la dirigeante du FN a dû définir un chemin de crêtes périlleux entre des cadres du mouvement, très majoritairement proches des attentes et de la vision portées par le monde des patrons de petites et moyennes entreprises1 et une base électorale beaucoup plus attachée au maintien du modèle social français.     Invité par BFM Business, chaîne s’adressant justement prioritairement aux dirigeants de TPE/PME, Louis Aliot indiquait le 1er mai (date symbolique)  que : « la loi El Khomri était issue de bonnes réflexions du monde de l'entreprise, elle arrivait in fine à rien et à un non-choix". Dans le même ordre d’idées, le maire FN de Cogolin, Marc-Etienne Lansade, ancien chef d’entreprise, considérait qu’au travers de cette loi, certains thèmes étaient « abordés de manière positive » et un communiqué de presse signé par Gilbert Collard et Marion-Maréchal Le Pen à l’occasion du recours au 49.3 expliquait quant à lui que « Les attentes des chefs d’entreprises et de salariés sont sacrifiés pour satisfaire au dogmatisme d’un pouvoir coupé des réalités du monde de l’entreprise. Soucieux de ne pas trop heurter les syndicats, le gouvernement a entériné une loi insipide loin d’effacer les multiples entraves à l’embauche et à l’investissement auxquelles sont confrontés quotidiennement les acteurs de l’économie réelle ».  Or si certains dirigeants frontistes ne se sont donc pas montrés totalement hostiles à ce texte, dès le début du conflit, l’électorat frontiste a été l’un de ceux à rejeter le plus massivement ce projet de loi. La bataille de l’opinion a été perdue très rapidement par le gouvernement car dès le mois de mars, 59% des Français  estimaient que ce texte allait accroître la précarité des salariés contre 16% qui pensaient qu’il aboutirait à une baisse du chômage2. Au sein de l’électorat frontiste, où les salariés sont nombreux, pas moins de 76% redoutaient une précarisation des salariés. Percevant très négativement cette réforme, les électeurs frontistes ont toujours regardé avec compréhension voire bienveillance le mouvement de contestation. A la fin du mois de mai, après près de trois mois de conflit, de grèves et de manifestations, 76% d’entre eux trouvaient que le mouvement était « justifié », dont 46% le déclarant « tout à fait justifié ». Le blocage des raffineries et le début de pénurie d’essence ne fit pas évoluer les perceptions puisque que quelques jours plus tard, la même proportion (78%), considérait encore ce mouvement comme « justifié » et la proportion de ceux le percevant comme « tout à fait justifié » grimpant à 53%. Interrogés à la veille du lancement de l’Euro de football alors que la grève à la SNCF se poursuivait et que les éboueurs parisiens étaient rentrés dans la danse, 72% des soutiens du FN considéraient encore le mouvement comme « justifié » dont 46% comme « tout à fait justifié »3. Cet item, qui constitue un bon indicateur du soutien le plus appuyé à la contestation, est demeuré durant toute la séquence significativement plus élevé dans l’électorat frontiste où il flirte avec la barre des 50% alors qu’il oscillait entre un quart et un tiers dans l’ensemble de la population. 

1  Sur le rapport du FN aux syndicats voir par exemple « Le FN et les syndicats, une stratégie d’entrisme ? » D. Andolfatto et T. Choffat in Les faux semblants du FN. Sciences-po les Presses 2015.  

Cette attitude de l’électorat frontiste n’est pas nouvelle et ne s’explique pas principalement par le rejet et l’hostilité dont est victime François Hollande dans cette partie de l’électorat. Sous un gouvernement de droite également, quand il s’est agi de réformer le système des retraites en 2010, 56% des sympathisants frontistes déclaraient que le recul de deux ans de l’âge légal de départ à la retraite n’était pas acceptable, contre 47% dans l’ensemble de la population et 8% seulement parmi les sympathisants de l’UMP4. On mesure ici le fossé existant entre ces deux électorats sur les questions économiques et sociales. Dans ce contexte, 68% des sympathisants frontistes jugeaient « justifié » le mouvement social de protestation contre la réforme des retraites, chiffre à comparer aux 72% mesurés dans la dernière enquête concernant la réforme El Khomri, qui est donc autant rejetée par les électeurs frontistes que le fut la réforme des retraites en 2010.    

Si l’on remonte à une époque plus ancienne, on constate que déjà en décembre 1995, l’électorat frontiste déclarait avoir de la sympathie à l’égard des mouvements de grève dans les services publics. L’écart était très marqué entre le niveau de sympathie dans cet électorat (60% au début du mois de décembre) et celui prévalant à droite (seulement 20% au RPR et 28% à l’UDF). L’ampleur du soutien dans les rangs frontistes signait le développement significatif de l’audience de ce parti dans les catégories populaires qui s’était produit à l’occasion de l’élection présidentielle de 1995. Dans un contexte de très forte mobilisation sociale et de blocage sans précédent du pays, le soutien frontiste s’éroda quelque peu puisqu’il passa de 60% au début du mois de décembre 1995 à 46% le 20 décembre5. L’intensité du mouvement social contre la loi Travail et la gêne occasionnée sont certes moins spectaculaires qu’à l’époque, mais les sondages de l’Ifop n’enregistrent pas à ce jour un recul du soutien dans l’électorat frontiste contrairement à 1995.

La réalisation dans un laps de temps rapproché de 4 vagues d’enquêtes et la stabilité des résultats concernant les sympathisants frontistes nous ont permis de cumuler ces données afin d’observer quelles étaient les lignes de clivage internes parmi cette population. Cette analyse fait clairement ressortir un clivage sociologique au sein de cet électorat. 82% des ouvriers et employés frontistes considèrent le mouvement comme « justifié », c’est le cas également de 74% des professions intermédiaires et le soutien s’érode ensuite chez les sympathisants retraités (63%) et plus encore parmi les cadres supérieurs, les commerçants, artisans, chefs d’entreprises et professions libérales qui ne sont « que » 58% à approuver le mouvement. Les mêmes lignes de clivages et de fractures que dans l’ensemble de la société sont donc à l’œuvre dans cet électorat et c’est la raison pour laquelle Marine Le Pen a adopté une posture prudente sur le sujet pour ne froisser aucune de ses clientèles.

2- …et compréhensif vis-à-vis des formes d’actions assez dures  

La bienveillance et la compréhension dont fait preuve une grande majorité de l’électorat frontiste vis-à-vis du mouvement d’opposition à la loi El Khomri, s’accompagne-t-elle pour autant d’une approbation vis-à-vis des actions les plus dures comme les blocages de dépôts de carburant ?  La question se pose dans la mesure où certes, la dimension protestataire et la culture de la confrontation sont prégnantes dans cet électorat, mais où dans le même temps, le rejet du désordre est une valeur centrale à l’extrême-droite et l’hostilité historique à une CGT « marxiste » est encore très présente dans une famille politique, toujours violemment anti-communiste. Pris dans cette tension contradictoire, les électeurs frontistes se montrent partagés à propos des modes d’action des grévistes. 51% d’entre eux estiment ainsi à propos des grèves dans les raffineries, les dépôts de carburants, les centrales nucléaires et les transports publics que la CGT exerce légitimement son droit de faire grève même si ces mouvements perturbent le fonctionnement du pays quand 49% considèrent que la CGT abuse de son droit de grève et cherche de manière illégitime à bloquer le fonctionnement du pays6. Dans l’ensemble de la population, les jugements sont nettement plus sévères puisque 60% des interviewés répondent que la CGT abuse de son droit de grève. Les sympathisants frontistes sont donc plus bienveillants que la moyenne des Français vis-à-vis de la CGT dans le cadre de cette mobilisation contre la loi Travail et comme le montre le graphique suivant, les proches du FN ont une attitude très éloignée de celle des électeurs des Républicains et se situent donc à mi-chemin entre ce rejet massif de la droite et le soutien tout aussi massif des électeurs du Front de gauche.

2  Sondage Ifop pour Atlantico réalisé par internet du 15 au 18 mars 2016 auprès d’un échantillon national représentatif de 1504 personnes.

3  Sondage Ifop pour Atlantico réalisé par internet du 6 au 8 juin 2016 auprès d’un échantillon national représentatif de 956 personnes.

4  Sondage Ifop pour Dimanche Ouest-France réalisé par téléphone du 21 au 22 octobre 2010 auprès d’un échantillon national représentatif de 956 personnes.

5 Enquête Sofrès réalisée pour 7 sur 7 publiée dans l’Etat de l’Opinion 1996.

6 Sondage Ifop pour Le Figaro-Magazine réalisé par internet du 27 au 30 mai 2016 auprès d’un échantillon national représentatif de 1012 personnes. 

Cette ambivalence de l’électorat frontiste renvoie à sa sociologie composite avec, comme on l’a vu une composante populaire très en soutien du mouvement de protestation et une frange CSP+ plus en demande de réformes sociales, mais aussi aux tensions idéologiques existant au sein de cette famille politique. 47% de ces électeurs pensent, par exemple, que le gouvernement aurait dû adopter une attitude moins ferme dès le début du conflit social, alors que 20% considéraient qu’il avait eu la bonne attitude dès le début du conflit quand 33% auraient souhaité qu’il adopte une attitude plus ferme. Cette demande de davantage de fermeté de la part de l’Etat s’exprime avec beaucoup plus de force dans les rangs de Républicains dont 64% partagent cette opinion, soit une proportion deux fois plus importante que dans l’électorat frontiste.  

On voit ici qu’un véritable fossé sépare les deux populations avec un électorat frontiste beaucoup plus compréhensif voire en soutien face aux formes de contestations sociales les plus musclées quand l’électorat de droite, très allergique au désordre, se montre beaucoup plus sévère et intransigeant. Cette divergence de point de vue n’est pas nouvelle et l’on avait déjà observé par le passé des attitudes radicalement différentes. Ainsi en octobre 2015, 66% des sympathisants des Républicains condamnaient le comportement des salariés d’Air France qui avaient agressé physiquement des cadres de l’entreprise dont deux avaient eu la chemise arrachée, cette proportion était deux fois moindre parmi les proches du FN (34%)7. Et de la même façon, six ans plus tôt, au déclenchement de la crise économique quand les fermetures de sites se multipliaient, 54% des sympathisants frontistes approuvaient en juillet 2009 les séquestrations de patrons par des salariés victimes de plans sociaux, alors que ce n’était le cas que de 6% des sympathisants de l’UMP, 36% condamnant ces actions contre seulement 2% au FN8.    

Dans le contexte actuel de forte mobilisation sociale, les sympathisants frontistes apparaissent également comme majoritairement opposés (57%) à l’interdiction du droit de grève pour les salariés qui travaillent dans des sites stratégiques comme les raffineries ou les centrales nucléaires alors que 62% des sympathisants des Républicains y seraient favorables. 

7  Sondage Ifop pour Sud-Ouest Dimanche réalisé par internet du 7 au 9 octobre 2015 auprès d’un échantillon national représentatif de 1000 personnes. 

8  Sondage Ifop pour L’Humanité réalisé par internet du 27 au 29 juillet 2009 auprès d’un échantillon national représentatif de 1005 personnes.

3- Un rapport ambigu à la CGT 

 Si la base soutient donc majoritairement le recours à ce type d’actions dures, certaines figures du parti les ont critiquées avec violence et ont condamné avec fermeté la CGT. Marion Maréchal Le Pen l’a qualifiée « d’organisation d’extrême gauche, sectaire et ultra-minoritaire regroupant les ultimes adeptes d’une lutte des classes périmée ». Elle posta également le message suivant sur son compte twitter « Face aux casseurs comme à la CGT qui prend en otage les Français, la seule réponse doit être la fermeté ». Même tonalité chez Nicolas Bay déplorant une « prise en otage des Français » par une CGT qui « plus elle est minoritaire, plus elle se radicalise. » Face à ces actions « inacceptables » le secrétaire général du parti exige l’application de la « loi républicaine avec sévérité ». Sur son blog, Marine Le Pen fut plus prudente préférant fustiger le gouvernement qui porterait « l’entière responsabilité de la situation d’exaspération que connaît la France » tout en soulignant la « lourde responsabilité de certains responsables syndicaux ». Pointer du doigt les « responsables syndicaux » lui permet de faire la distinction entre une hiérarchie syndicale qu’elle considère comme politisée à l’extrême gauche et une base à qui elle souhaite s’adresser et dont elle sait qu’une partie ne lui est pas hostile. On retrouve le même distinguo et la même volonté de s’adresser aux adhérents de base de la CGT et aux grévistes, dans la bouche de Fabien Engelmann, maire frontiste de Hayange en Moselle et ex-cégétiste exclu de la centrale pour son engagement au FN qui dénonce « Une direction corrompue qui ne demande pas l’avis des salariés et des syndiqués de la base pour faire de la propagande anti-FN et des campagnes anti-flics9 ». 

Les données de sondage permettent de comprendre cette attitude et cette volonté d’opérer une distinction entre un appareil syndical politisé et hostile et des adhérents. Dans le contexte de la mobilisation contre la loi Travail, texte, on l’a vu rejeté par une grande majorité des sympathisants frontistes, ces derniers sont 46% à avoir une bonne opinion de la centrale de Montreuil, en pointe dans la contestation. Les dirigeants frontistes doivent donc tenir compte de ce paramètre tout comme du fait qu’aux élections régionales de 2015, 27% de salariés se disant proches de la CGT avaient voté au 1er tour pour une liste frontiste10. La CGT n’est pas la seule concernée par la progression du vote FN parmi ses sympathisants (34% de ceux de FO, syndicat contestant également la loi Travail et 26% de ceux de la CFDT ayant voté FN) mais l’on constate que le mouvement de Marine Le Pen a souvent obtenu des résultats élevés voire très élevés dans certains bastions de la contestation. Ainsi à Haulchin dans le Nord, où Philippe Martinez est venu soutenir symboliquement les cégétistes bloquant un dépôt de carburant en jetant un pneu dans le feu allumé par le piquet de grève, Marine Le Pen a atteint 47.8% au 1er tour et 53.9% au second. Sa nièce a enregistré aussi d’impressionnants scores à Fos, où sont implantés une raffinerie de pétrole et un centre de traitement d’ordures ménagères qui ont été le théâtre de grèves et de blocages, ainsi que dans les communes voisines. 

9 In « Le FN met la CGT et l’Etat dans le même sac » in Le Figaro du 27 mai 2016. 

Dans l’ouest de la France, les niveaux sont moins élevés, mais néanmoins importants sur d’autres sites pétroliers de Total qui ont eux-aussi fait l’objet d’une longue grève. Dans la banlieue du Havre, le FN a atteint 31.1% au 2nd tour à Gonfreville-l’Orcher, et 26.7% à Donges dans la région nantaise, les deux communes abritant une raffinerie.  

Dans ces territoires industriels, l’audience de la CGT reste importante et le syndicat y demeure capable de mener des grèves dures et longues (pas moins de 3 semaines par exemple dans le cas de la raffinerie de Normandie) avec le soutien de toute une partie de la population locale. Cette prégnance d’une CGT de combat s’accompagne généralement d’une assez forte audience du PC dans ces communes. Mais l’influence et la pression du FN sont de plus en plus fortes dans ces citadelles ouvrières. Comme le montre le tableau suivant, on retrouve le même phénomène dans bon nombre de « cités cheminotes » c’est-à-dire des communes marquées par la présence historique d’activités de la SNCF (nœuds ferroviaires, gares de triage, centres de réparations…) qui leur ont conféré une forte identité ouvrière et contestataire.   

Dans ces communes où les cheminots se sont mobilisés, le Front de Gauche a systématiquement franchi la barre des 10% aux régionales mais le FN le surclassait très nettement. Si le bras de fer auquel se livrent depuis des mois le gouvernement et la CGT peut être analysé, au-delà d’un conflit social contre la loi Travail, comme un affrontement entre les deux gauches, ce mouvement illustre également la lutte à mort opposant le FN et la gauche radicale pour capter la colère de la « France des insoumis » chère à Jean-Luc Mélenchon. On notera qu’à Flixecourt dans la Somme, commune désindustrialisée où a été tourné le film « Merci patron ! » de François Ruffin, film engagé et dont la projection a contribué à la naissance du mouvement « Nuit Debout », la liste du PC obtint 26.3% au 1er tour, loin devant le PS, mais loin derrière le FN de Marine Le Pen qui engrangea 44.7% des voix au 1er tour et 52.7% au 2nd.   

10 Sondage Ifop pour l’Humanité réalisé par internet le 6 décembre 2015 auprès d’un échantillon de 2904 personnes inscrites sur les listes électorales. 

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