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Un débat doit s'ouvrir sur la responsabilité de la pensée communiste de Marx.
Un débat doit s'ouvrir sur la responsabilité de la pensée communiste de Marx.
©JOHN MACDOUGALL / AFP

Lourd héritage

En France, la culture politique reste imprégnée du schéma marxiste manichéen et réducteur de la lutte des classes sans compromis entre dominants et dominés.

André Sénik

André Sénik

André Sénik est agrégé de philosophie.

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La question que je me suis posée est pourquoi la reconnaissance de la nature criminelle du régime communiste n'a-t-elle pas affecté l'aura du communisme marxiste. Voici quelques éléments de réponse. 

Les idées et les intentions de Marx auraient été trahies par ses héritiers au pouvoir. La raison de l'immunité étonnante dont jouit le concepteur du régime communiste est que l'on confond le programme de Marx et les sentiments humanistes des militants de base qui crurent y trouver la promesse d'un monde réalisant les idéaux et les promesses de la Révolution française. Or Marx commence dès son article inaugural paru en 1844 intitulé Sur la question juive par faire la critique radicale des droits de l'homme en tant qu'individu particulier membre de la société civile. 

Marx appelle " émancipation humaine" ce qui réalisera la métamorphose intégrale de l'individu doté de droits individuels en citoyen. Cet article fondateur de l'anthropologie marxiste détruit les principes et les valeurs qui figurent aujourd'hui dans les constitutions des sociétés démocratiques et dans la charte des Nations unies. Le génie stylistique et sophistiqué de Marx a fait passer son anti-individualisme destructeur de la personne humaine pour le comble de l'humanisme. Il a réussi à faire passer son appel à la guerre civile mondiale des prolétaires pour un universalisme alors que l'internationalisme prolétarien est une forme de Jihad mondial contre les non communistes. Il faudrait donc accepter de confronter le monstrueux programme de Marx aux sentiments généreux de ceux qui lui donnèrent leur foi. 

Autre obstacle à la mise en examen sans complaisance de la pensée de Marx : il représente le critique par excellence de nos sociétés dont on a du mal à admettre ce qu'en disait Churchill : « ce sont les pires de toutes à l'exception de toutes celles qui ont existé ». En France, la culture politique reste imprégnée du schéma marxiste manichéen et réducteur de la lutte des classes sans compromis entre dominants et dominés. Ce schéma marxiste a muté et s'étend à tous les rapports sociaux sous la catégorie de l’intersectionnalité. Dans les milieux intellectuels et culturels prévaut l'idée que Marx est avant tout un philosophe génial à l'égal de Platon et d'Aristote : un philosophe qu'il faut comprendre et discuter de l'intérieur sans sortir de la sphère spéculative et sans le juger vulgairement sur sa mise en pratique hors du champ intellectuel. La vérité est que Marx a rompu explicitement avec la philosophie qui est vouée à un débat sans fin et sans conclusion définitive capable de galvaniser les masses. La pensée de Marx s'appuie sur un socle philosophique qui est en réalité une philosophie de l'histoire militante. Le marxisme ne se veut pas une philosophie spéculative exposée au débat, il est une idéologie révolutionnaire qui se présente comme science et même comme savoir absolu. Les universitaires qui se comportent en militants dans l'université sont les continuateurs des monstruosités intellectuelles communistes opposant la science prolétarienne à la science bourgeoise en biologie et dans toutes les disciplines. Pour les marxistes comme Louis Althusser la philosophie doit mener "la lutte des classes dans la théorie". Rien de plus étranger à la philosophie comme recherche libre de tout impératif étranger. En revanche, la lutte des classes dans la pensée est politiquement responsable de ses effets historiques. Voilà qui mérite qu'un débat s'ouvre sur la responsabilité de la pensée communiste de Marx dans ce qui s'est fait en son nom et sur la base de son programme.

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