"En séparant la question du mariage et de l'adoption par les couples homosexuels de la question de la PMA, le gouvernement essaie d'enfumer la représentation nationale"

Atlantico : Alors que le groupe socialiste de l'Assemblée nationale a renoncé mercredi à déposer un amendement élargissant la PMA aux couples de lesbiennes ayant un projet parental, Noël Mamère a confirmé que le groupe écologiste déposerait un amendement en ce sens. La question du mariage et de l'adoption par des couples homosexuels doit-elle être dissociée de la question de la procréation médicalement assistée ?

Gérald Darmanin :Non, car le mariage est lié au droit de filiation. La question du mariage est donc corrélée à l'adoption, à la procréation médicalement assistée et bientôt à la gestation pour autrui (GPA). On ne peut pas mettre en place le mariage pour les couples homosexuels en le déconnectant de l'accueil des enfants qui est le symbole et la raison d'être du mariage dans la société occidentale. Derrière la question du mariage, il y a la question de la famille. C'est pour cela que nous nous opposons au mariage homosexuel. En revanche, il faut améliorer le Pacs sur un certain nombre de points, comme les pensions de reversions pour les couples  homosexuels. Pourquoi ne pas créer une union civile comme certains de mes collègues le proposent ?

La ministre de la Justice Christine Taubira a estimé vendredi que la question de l'assistance à la procréation médicalement assistée (PMA) avait "brouillé" les lignes du projet de loi. En lieu et place, un article sur la PMA sera introduit par le gouvernement dans le projet de loi sur la famille qui sera présenté en mars 2013. Vous dénoncez une manœuvre politique...

Les questions sociétales du mariage homosexuel, de l'adoption, de la PMA ou de la GPA relèvent toutes de l'éthique et de la conception que l'on a de la famille et de la vie. Le Gouvernement essaie d’enfumer la représentation nationale en reportant le débat sur la question de la PMA. Il s'agit effectivement d'une manœuvre destinée à saucissonner une mesure qui est difficilement acceptée par la majorité elle-même. La pensée de la gauche consiste à dire qu'il n'y a pas de modèle de mariage, que les couples homosexuels ont le droit de se marier et sont maîtres de la possibilité d'avoir des enfants. Comme les couples homosexuels ne peuvent pas avoir naturellement des enfants, hormis dans une relation hétérosexuelle, ils doivent imaginer la possibilité  d'adopter ou d'avoir recours à la science avec la PMA. Cette pensée est une pensée globale qu'il faut appréhender comme telle.

La conception que nous avons du mariage, comme une grande partie de la population, c'est que celui-ci est depuis le début de l'humanité réservé à l'hétérosexualité parce que c'est grâce à l'hétérosexualité que l'on a des enfants. La question éthique qu'il faut se poser est : "existe-t-il un droit à l'enfant  ?"  Pour ma part, j'estime que l'intérêt de l'enfant n'est pas de répondre à l'envie des parents, mais d'être éduqué dans un cadre hétérosexuel avec une figure maternelle et paternelle. Cela tient à la façon dont on conçoit la vie : "La science peut-elle vraiment résoudre tous les problèmes qui touchent à l'intime et à la reproduction ?". Le gouvernement déconnecte aujourd'hui le mariage et l'adoption de la PMA. Mais le problème ne sera pas résolu puisque dans trois mois un texte sur la famille et la PMA sera de nouveau présenté.

Que prévoit exactement l’amendement que vous allez déposer contre la PMA ?

Je vais déposer avec un certain nombre de mes collègues un amendement au projet de loi sur le mariage homosexuel, créant ainsi un nouvel article qui prévoira explicitement l’interdiction au recours à la procréation médicalement assistée pour les couples de même sexe si le projet de loi sur le mariage était adopté. Le débat doit avoir lieu au parlement lors du vote sur le mariage homosexuel et non dans trois ou quatre mois au cours d'un autre vote. Soit notre amendement est accepté par le Parlement et il ne faudra pas revenir sur la question de la PMA dans quelques mois, soit le parlement rejette cet amendement ce qui signifie implicitement qu'une majorité parlementaire de gauche accepte la PMA. Dans ces cas là, autant l'adopter tout de suite... Lorsqu' à droite, nous avons réfléchit avec Jean Leonetti sur la fin de vie, nous avons travaillé un an et demi pour trouver une solution de consensus. Là, en quelques semaines, alors que la France traverse une grave crise économique et sociale, le PS veut faire adopter un texte d'une importance capitale à la hussarde. Et dans trois mois un autre texte arrivera avec des questions éthiques encore plus importantes. Ce n'est pas acceptable...