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Pourquoi la grande majorité des arabo-musulmans se déclare très insatisfaite et "déçue par le gouvernement" de François Hollande
©Reuters

Bonnes feuilles

L’objectif de cet essai est très simple : étudier à la fois le vote “musulman” – vers qui se tourne-t-il et quelles sont ses motivations ? – et l’impact électoral, s’il existe, de la présence d’une population d’origine arabo-musulmane dans les différents quartiers. Extrait de "Karim vote à gauche et son voisin FN", de Jérôme Fourquet, publié en partenariat par la Fondation Jean-Jaurès et les éditions de L'Aube (1/2).

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

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On l’a vu, les Français issus de l’immigration maghrébine et africaine subsaharienne, qui constituent l’essentiel de la population musulmane française, composent un électorat qui vote historiquement très fortement à gauche. C’est particulièrement vrai lors des élections présidentielles de 2012, où ils ont voté à 86 % pour François Hollande. Ces entretiens nous permettent de revenir sur certaines raisons de ce vote si massif.

Plus du tiers des interviewés expliquent leur vote pour François Hollande en 2012 par une proximité avec la gauche ou le Parti socialiste. Certains disent « avoir toujours voté à gauche », comme Mohamed, Fadila, Zina, ou encore Allaoua, ouvrier marseillais. Salir dit, lui, « avoir vu [s]es parents voter à gauche toute [s]on enfance, et ça fait partie de [s]a culture ». On note à ce propos que la solidarité est une valeur cardinale pour cet électorat. Vingt-quatre des trente interviewés de notre échantillon y sont très attachés. La situation économique des musulmans n’y est pas étrangère. Saïd rappelle, lui, qu’il est « issu d’une famille pauvre et qu’il a bénéficié des avantages sociaux […] et [s]e sent profondément proche du Parti socialiste ». Aussi, entre un « François Hollande qui pense plus au peuple », d’après Zineb, qui « est plus social », pour Linda, et un Nicolas Sarkozy, dont la politique est dénoncée par Sylvie comme « plutôt pour les riches que pour les personnes défavorisées », le choix a paru évident à beaucoup d’entre eux.

>>>>>>>>>>>> A lire également : Le PS, c’est plus ça : qui pourrait capter le vote arabo-musulman en France... et comment ?

>>>>>>>>>>>> La grande majorité des arabo-musulmans déçue du socialisme : une véritable recomposition politique ou un mécontentement passager ?

D’autres évoquent la volonté, voire la nécessité d’un « changement » pour expliquer leur vote à la présidentielle (on note onze occurrences du terme « changement » uniquement à propos du vote de 2012 lors des trente entretiens conduits). Près d’un tiers des répondants se revendique anti-sarkozyste, et insiste sur l’envie de « se débarrasser » de l’ex-président, comme le disent le Roubaisien Mohamed ou le Marseillais Fouad. Pour Samir, Gary ou Samia, ce sont « la personnalité de Nicolas Sarkozy, son omniprésence, son image bling-bling » qui sont en cause. Le débat sur l’identité nationale, puis la ligne politique dite Buisson suivie pendant la campagne électorale ne semblent pas non plus étrangers au sentiment de rejet que provoque Nicolas Sarkozy auprès des interviewés. Mohamed déclare par exemple que « François Hollande n’a pas stigmatisé les arabo-musulmans comme l’a fait Sarkozy ».

Partant de là, quelles peuvent être les raisons de ce « désamour », de cet abandon par ces électeurs d’origine musulmane de la gauche ? Deux ans et demi après l’élection de François Hollande à la présidence de la République, les personnes interrogées jugent très sévèrement son bilan et celui des gouvernements qui se sont succédé. Si certains considèrent qu’il a hérité du « pays dans un sale état », comme Ali, ou qu’il faut « lui accorder du temps avant de faire un bilan », comme Samir, ils ne sont pas pour autant satisfaits, et la grande majorité est loin d’être aussi indulgente. La très grande majorité se déclare ainsi très insatisfaite et « déçue par le gouvernement »..

Au-delà des positions partisanes ou idéologiques, c’est au quotidien que la crise économique est vécue par les Français et, musulmans ou pas, elle les affecte de manière identique, voire davantage quand ils sont issus de l’immigration, puisque les catégories populaires y sont surreprésentées. Qu’il s’agisse de l’emploi, du pouvoir d’achat et de son corollaire, le niveau des impôts, ou du « changement » de manière plus générale, les promesses non tenues reviennent sans cesse. Ces électeurs attendaient une politique « plus à gauche », « vraiment socialiste » et dénoncent « une politique plutôt de droite ».

Extrait de "Karim vote à gauche et son voisin FN", de Jérôme Fourquet, publié en partenariat par la Fondation Jean-Jaurès et les éditions de L'Aube, 2015. Pour acheter ce livre cliquez ici.

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