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Plan santé : propositions intéressantes, mise en œuvre périlleuse
©ETIENNE LAURENT / POOL / AFP

Trop ambitieux pour les moyens mobilisables ?

Emmanuel Macron a dévoilé mardi son plan santé nommé "Ma santé 2022, un engagement collectif" composé de 54 mesures allant de la médecine libérale à l'organisation de l'hôpital. Une vaste réforme qui s'annonce difficile pour le gouvernement.

Claude Le Pen

Claude Le Pen

Claude Le Pen est un économiste français, professeur à l'université Paris-Dauphine où il dirige le master d’économie de la santé. Il est président du Collège des économistes de la santé.

 
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Atlantico : Ce mardi 18 septembre, Emmanuel Macron dévoilait plus en détails son plan santé nommé "Ma santé 2022, un engagement collectif" composé de 54 mesures allant de la médecine libérale à l'organisation de l'hôpital. Derrière le caractère consensuel des propositions formulées, comment évaluer la capacité du gouvernement à mener à bien un projet aussi large ? Cette mise en œuvre est-elle réaliste ? 

Claude Le Pen : C’est en effet la question qui se pose. Le Président a dessiné pendant 70mn un système de santé idéal, alliant technicité et proximité, ville et hôpital, urgence et soins chroniques. Il appelé à une réorganisation totale de l’offre de soins au plan régional autour regroupements de médecins et de professionnels de santé libéraux au sein des CPTS (Communautés professionnelles de territoriales de santé) ; il entend labéliser 500 à 600 nouveaux « hôpitaux de proximité » doté de plateaux techniques légers et spécialisés dans la petite urgence, la gériatrie, le suivi des maladies chroniques ; il veut réformer le mode de financement à l’hôpital en prenant en compte la qualité des prestations et non seulement leur quantité ; il veut aider les médecins à dégager du temps pour les patients en les dotant de nouveaux assistants médicaux pour les décharger des taches administratives et réaliser des actes simples comme la prise de température ; il veut ré-enchanter les professionnels de santé en valorisant les actes infirmiers, en décloisonnant les carrières hospitalières, en réformant les études de santé, en abolissant le numerus clausus ; il veut accélérer la transformation numérique en dotant chaque français d’un espace numérique sécurisé pour ses données de sante, etc. etc. etc. C’est considérable. Prise isolément, aucune de ces mesures n’est réellement nouvelle. Elles figurent toutes depuis longtemps dans de nombreux rapports et elles ont fait l’objet de nombreuses recommandations. Ce qui est nouveau c’est l’effet systémique de vouloir les mettre en œuvre simultanément dans un horizon de temps relativement court (dés 2019-2020 pour certaines). Ce qui est nouveau c’est aussi l’impulsion présidentielle - inédite sous la Vème République. Le Président a placé la barre haut et s’est engagé personnellement : il lui reste à agir. C’est là qu’on l’attend lui et le gouvernement.  

Quelles seront les principaux écueils qui pourraient bloquer - ou ralentir - ce processus de la mise en œuvre de ce plan santé ? 

Ils sont nombreux. Le système de santé est assez rigide et conservateur. C’est une lourde machine. Le Président veut faire travailler en équipe des professions qui ont plutôt l’habitude de travailler en silo. Et on pense bien sûr à la dichotomie médecine de ville/médecine hospitalière. La réforme des études de médecins, 1er et 2ème cycle, prendra du temps. Beaucoup de mesures devront trouver des financements. Par exemple la rémunération au parcours dans certaines pathologies chroniques. Ou le recrutement des assistants médicaux. Le gouvernement a assorti son plan d’une rallonge budgétaire de 400M€ pour 2019 et il s’engage à un financement de 3,4Mds sur les 4 prochaines années.. C’est habile car la reforme à coût constant n’aurait pas été crédible. Mais cela semble peu au regard des 200Mds€ que nous dépensons pour notre santé.

Quelles auraient été les solutions pragmatiques dont le gouvernement aurait pu se saisir afin de se faciliter la tâche, tout en privilégiant un objectif d'efficacité ? 

Le Président fait l’analyse que le système manque plus d’un manque d’organisation que d’un manque de financement. On peut le suivre sur ce point en constant que nous sommes le pays qui dépense le plus au monde pour la santé, à part les États-Unis, hors concours, et la Suisse. Les solutions organisationnelles proposées ne sont pas irréalistes. Le dossier de presse donne quelques exemples concrets : la CPTS du XIIIème arrondissement de Paris qui fonctionne bien, l’hôpital de Lure (Haute-Saône) qui est ouvert aux médecins libéraux, etc.  Mais il faut passer d’expériences locales, souvent menées par de fortes personnalités, à des solutions nationales, fonctionnant en routine. C’est loin d’être simple.

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