Panneaux photovoltaïques : la mairie de Paris s’entête dans des mauvais choix<!-- --> | Atlantico.fr
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La maire de Paris, Anne Hidalgo, assiste à une cérémonie à Paris, en avril 2021.
La maire de Paris, Anne Hidalgo, assiste à une cérémonie à Paris, en avril 2021.
©Bertrand GUAY / POOL / AFP

Green washing

H16 revient sur la polémique #saccageparis et sur la décision de la mairie de Paris d'installer des panneaux photovoltaïques sur les toits d’une école en face de la Tour Eiffel.  

Hash H16

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H16 tient le blog Hashtable.

Il tient à son anonymat. Tout juste sait-on, qu'à 37 ans, cet informaticien à l'humour acerbe habite en Belgique et travaille pour "une grosse boutique qui produit, gère et manipule beaucoup, beaucoup de documents".

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Franchement, il faut un peu arrêter avec ces histoires de #saccageparis, cette tendance lancée sur Twitter consistant à poster les photos d’un Paris de plus en plus dégradé : non seulement, tout le monde sait que tout ceci n’est qu’une nouvelle manœuvre sournoise des hyènes photographes de l’estrèmedrouate, mais en plus, on ne peut que constater que l’actuelle maire de Paris ne minimise guère ses efforts pour (enlaidir) améliorer encore la situation de sa ville.

Or, c’est un combat de tous les instants pour Anne Hidalgo que la « transformation » de Paris, véritable terrain de jeu livré à toutes les expériences les plus pertinentes en matière d’art comptant pour rien, d’urbanimsme total, de transiture écologique et de syntonisation forcenée avec Gaïa. Et c’est donc sans surprise qu’on la découvre trottant de happenings en pince-fesses et de cérémonies en inaugurations pour telle ou telle installation frétillante d’écologisme finement raffiné, de culture vibrante de diversité, d’audace artistique et de pertinence économique évidente.

Et dernièrement, elle a donc participé à l’inauguration de quelques panneaux photovoltaïques installés sur les toits d’une école en face de la Tour Eiffel ; moyennant quelques serviles journalistes gamellards, la poignée de panneaux se transforme en « ferme de production photovoltaïque » (ah, cette poésie moderne qui transforme les aveugles en non-voyants et les imbéciles en « personnes à l’intelligence contrariée »), et l’installation devient le lien indispensable entre l’écologie, la mairie et le pâté de foyers attenants qui devrait probablement bénéficier un jour de la manne électrique ainsi produite.

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L’utilisation du conditionnel dans la phrase précédente n’est pas fortuite : on se rappelle que le raccordement de tels panneaux au réseau électrique global reste parfois lettre morte lorsque des services municipaux, jamais en retard d’un retard, doivent se saisir du problème. Gageons cependant qu’ici, il n’en sera rien et que le courant presque gratuit coulera presque à flot.

« Presque » car, comme le conditionnel précédent qui est de mise lorsqu’on implique une grosse mairie, les rendements ainsi que le bilan économiquement et énergétique de ces merveilles technologiques ne sont que très rarement au rendez-vous.

Eh oui : question soleil, Paris n’est pas Casablanca (ni même Nantes), et même à Casablanca, les nuages viennent réduire l’ensoleillement et donc le rendement des panneaux. Et si Paris n’est que fort rarement balayée par des vents de sable contrairement à la ville marocaine, les poussières et autres aérosols opaques de la ville hidalguesque n’en tombent pas moins sur ces surfaces lisses et viennent inexorablement les recouvrir, faisant ainsi s’effondrer leur production de toute façon maigrichonne (on parle de moins de 15% de rendement en moyenne dans les cas favorables).

On peut imaginer les riverains, ayant poussé cette installation, venir tendrement nettoyer les panneaux avec régularité mais la réalité n’en restera pas moins cruelle : ces installations sont rarement rentables, encore moins quand les panneaux sont disposés à plat comme le petit reportage le montre clairement, encore moins dans une ville peu ensoleillée, encore moins dans une ville dont l’air est chargé de particules et encore moins quand c’est (#saccagepanneaux) mal entretenu (ce qui n’arrivera pas, n’est-ce pas).

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Toute cette intéressante expérience n’est pas sans rappeler la précédente occurrence d’une dispendieuse politicienne s’agitant dans les énergies futiles : on se souvient en effet d’une Ségolène Royal décidée à développer le concept pourtant parfaitement consternant de route solaire et dont la facture finale avait été (au moins en partie) payée par le contribuable poitevin alors que la production, catastrophiquement faible, ne parvenait même pas à alimenter un foyer.

Ici, les panneaux hidalguesques, encrassés, à plat, sur le toit sale d’une école en plein Paris, auront sans nul doute un rendement athlétique en comparaison de l’expérience ségolienne, mais resteront globalement anecdotiques dans la fourniture des besoins parisiens, mêmes locaux, pour la même raison que ces panneaux ne sont jamais rentables en Europe du Nord (ce qui explique qu’ils sont encore subventionnés plus ou moins fermement) et qu’ils ne constituent jamais qu’un petit appoint dans la fourniture d’énergie d’un foyer moyen.

On peut même aller plus loin et garantir que cette expérience reviendra cher au contribuable : il faudra entretenir ces panneaux, et lorsque leur vie sera achevée, après quelques années de médiocrité molle, il faudra les démonter, les recycler et on peut raisonnablement parier que – chic type – le contribuable parisien sera mis à contribution.

Et de la même façon qu’il ne fut bien sûr absolument jamais question pour la Reine des Neiges de rendre des comptes sur cette décision calamiteuse (comme elle n’en eut jamais à rendre pour toutes les précédentes qu’elle avait pu prendre, en toute décontraction), on peut là encore garantir que le Drame de Paris ne verra jamais cette expérience coûteuse versée à son débit, tout comme les douzaines d’autres idioties plus ou moins hideuses que les Parisiens se seront cognés depuis qu’elle sévit.

Et puis rassurez-vous : cette aimable frivolité qui tient bien plus du green-washing que de l’écologie pratique et réaliste sera bel et bien financée, et ce malgré les abysses de plus en plus insondables que forment actuellement les finances de la capitale française : magie des finances publiques et de l’inventivité de nos édiles, le recours à l’une ou l’autre taxe viendra combler le petit trou photovoltaïque ainsi constitué.

Et pour taxer, on pourra commencer par cogner sur les restaurateurs de la capitale dont on a préalablement interdit l’exercice professionnel dans leur salle habituelle et qui sont donc forcés d’installer leur commerce sur des terrasses improvisées : puisqu’après tout, les voilà sur la voie publique, il semble logique pour la fine équipe en place de taxer les cafetiers, restaurateurs et autres commerçants installés là. Oh, bien sûr, on attendra la rentrée avant de leur tomber dessus, mais oui, indubitablement, on leur tombera dessus.

Comprenez-vous, il faut bien trouver quelqu’un pour payer l’entretien des panneaux photovoltaïques… Ou l’entretien, (#saccageparis) impeccable, des voiries, des monuments, des parcs et jardins de la ville lumière, n’est-ce pas !

Cet article a été initialement publié sur le site de H16 : cliquez ICI

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