Entre putsch manqué et absence de candidat de rechange, où en est vraiment Jean-Marc Ayrault ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Jean-Marc Ayrault est remis en cause en tant que Premier ministre.
Jean-Marc Ayrault est remis en cause en tant que Premier ministre.
©Reuters

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Les paris sont ouverts et ont toutes les chances de le rester pendant quelques mois encore, car la question n’est pas tant "Par qui remplacer Jean-Marc Ayrault ?" mais plutôt "Va-t-on changer de politique économique ?".

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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La réforme fiscale annoncée est-elle enterrée avant même d’avoir vu le jour ? La petite bombe lancée à la mi-novembre par Jean-Marc Ayrault n’aura-t-elle finalement servi qu’à éteindre l’incendie politique provoqué par l’affaire Leonarda et par là même à prolonger le bail du Premier ministre de quelques mois à Matignon ?

La majorité des députés socialistes et de nombreux observateurs en sont convaincus. Quant à la main mise (le pseudo putsch), de Matignon sur Bercy, ils n’y ont jamais vraiment cru. Mais il se trouve des élus, beaucoup moins nombreux certes, mais tenaces, qui croient dur comme fer qu’en dépit de la mésentente Ayrault-Moscovici sur le remplacement ou le maintien du directeur du Trésor, les travaux se poursuivent dans la discrétion ; et même s’ils ne seront pas couronnés par un grand soir, quelques réformes marquantes seront mises en place… un jour.

Concrètement, le prélèvement à la source reste sérieusement envisagé, mais pas seulement : il est aussi question de baisser l’impôt sur les sociétés et les cotisations sociales qui ne seraient plus calculés en fonction de la masse salariale des entreprises, mais celles-ci seraient imposées sur leur excédent net d’exploitation. Une façon de ne pas pénaliser les industries de main d’œuvre et de faire payer celles à forte valeur ajoutée. Une vieille idée que l’on n’a jamais réussi à appliquer jusqu’à présent ! Quant à la fusion de la CSG et de l’impôt sur le revenu, réclamée par l’aile gauche du groupe socialiste, on préfère ne plus en parler et la remiser prudemment au fond des tiroirs, car elle provoquerait des hausses d’impôts qui pénaliseraient (encore plus) les classes moyennes. Et de ce côté là, il y a saturation… Ça, ce sont les grandes idées qui sont sur la table. Pour autant, ces « réformateurs » optimistes ne sont pas prêts à engager les paris sur le nom du Premier ministre qui mènera l’opération à son terme. Jean-Marc Ayrault ou un éventuel successeur ?  

Les paris sont ouverts et ont toutes les chances de le rester pendant quelques mois encore, car la question n’est pas tant   « Par qui remplacer Jean-Marc Ayrault ? » mais plutôt « Va-t-on changer de politique (économique) ? » Et à cet égard, le nouveau tour de vis prévu pour les dépenses ne laisse pas prévoir d’inflexion.

Il n’existe pas de désaccord de fond entre François Hollande et Jean-Marc Ayrault sur la ligne à tenir ; le désaccord se situe plutôt entre l’exécutif et la majorité. Sur le plan économique, François Hollande voudrait conduire une politique sociale démocrate, voire sociale-libérale, entre réduction des déficits publics et soutien de la modernisation de secteurs innovants, en phase avec la nouvelle coalition allemande. Jean-Marc Ayrault est en phase avec lui mais il se heurte régulièrement à des députés socialistes qui affichent des opinions nettement plus à gauche, et ce sont eux qui tiennent le haut du pavé à l’Assemblée. Ils ne sont pas majoritaires, mais savent se faire entendre et c’est pourquoi certains, à l’instar de l’élu ardéchois Pascal Terrasse, n’hésitent pas à parler de « cohabitation » entre le président de la République et sa majorité. Une situation qu’il supporte de moins en moins. Au point qu’il envisage, avec ceux qui se veulent réalistes et rêvent plus à des économies de dépenses qu’à l’alourdissement des impôts nouveaux, de constituer un sous-groupe, une aile droite pour contrer  les propositions jugées irréalistes de leurs homologues de la « Gauche populaire » et de l’appeler « les Faucons Roses ».

Quant à Jean-Marc Ayrault, sa meilleure protection pour le moment semble être… le calendrier. Avec les Municipales en mars et les Européennes en juin, le calendrier n’est en effet pas propice à un changement de gouvernement avant les scrutins. Evidemment, l’absence de « balisage politique » autour de la publication du rapport sur l’Intégration des étrangers a provoqué la colère de l’Elysée, où l’on trépigne d’impatience de voir la courbe des sondages présidentiels grimper et celle du chômage baisser. Le moins que l’on puisse dire est que ce genre d’incidents n’y contribue pas, mais, même si les entourages «  se lâchent », il s’agit d’une maladresse voire d’un manque de jugement et non pas le reflet d’une véritable divergence politique à la tête de l’exécutif.

Le vrai sujet demeure la baisse des dépenses publiques et le constat est unanime : c’est au niveau des collectivités locales qu’il faut réformer. Ce n’est pas l’ajout d’une nouvelle couche au mille-feuille administratif français avec la création des métropoles qui va y contribuer. Et puis, ce sont les élus locaux qui forment le gros des cadres du PS. Et pour l’heure, personne n’a envie de se faire hara-kiri !

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