Note de la France dégradée : pourquoi c’est plus de notre (absence de) croissance que du poids de la dette que Moody’s s’inquiète réellement <!-- --> | Atlantico.fr
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Moody’s a dégradé la note de la France.
Moody’s a dégradé la note de la France.
©Reuters

Paradoxe

La France est une nouvelle fois sanctionnée par une agence de notation, cette fois-ci Moody’s, au motif que le pays est incapable de retrouver un taux de croissance permettant de faire à son endettement. Pourtant, malgré cette situation, le poids des intérêts payés par le pays au titre de sa dette n’a jamais été aussi bas depuis 1983.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Ce vendredi 18 septembre, l’agence de notation Moody’s s’en prenait une nouvelle fois à la France en dégradant la note de crédit du pays, au niveau AA2. En effet, selon les dernières statistiques de l’INSEE, le pays est aujourd’hui endetté à hauteur de 97.5% de son PIB, pour le premier trimestre 2015, ce qui représente un total de 2089.4 milliards d’euros. Afin de justifier cette prise de position, l’agence de notation indique :

« Le principal facteur ayant entrainé la dégradation de la note de crédit de français à AA2, est l’évidence grandissante, selon Moody’s, que la croissance économique française restera faible sur le moyen terme, et de l’obstacle que cela va causer pour tout retournement matériel du poids élevé de la dette française dans un futur prévisible ».

Ainsi, pour l’agence de notation, la cause de la sanction provient plus de l’incapacité de la France à élever son niveau de croissance, que du niveau de la dette publique du pays. Très justement, Moody’s pointe ici la cause de la situation, c’est-à-dire la trop faible croissance et considère dès lors la progression de l’endettement français comme sa conséquence.

En premier lieu, il convient de se rassurer. Si la dette française n’avait jamais été aussi importante, les taux d’intérêts n’avaient jamais été aussi faibles. Par un jeu de vase communiquant, la progression du niveau de dette ne suffit même pas à contrebalancer l’effet de la baisse des taux. Et le résultat de cet effet ciseau est que la France n’a pas payé un montant total d’intérêts aussi faibles, par rapport au PIB, depuis 1983. En effet, le poids des intérêts de la dette par rapport au PIB est au plus bas depuis plus de 30 ans, soit 2.16%.

Poids des intérêts de la dette par rapport au PIB. France 1980-2014

Et il ne s’agit pas que d’un pourcentage. Bien que la dette française soit passée d’un niveau de 65% du PIB à la fin 2007, à un niveau de 97.5% en cette année 2015, la réduction du montant facturé au pays au titre de sa dette a baissé de 10 milliards d’euros, passant de 56 milliards d’euros en 2007 à 46 milliards pour 2014. Ceci étant dû au fait qu’au cours de l’année 2008, les taux d’intérêt à 10 ans ont pu dépasser les 4.5% alors qu’ils affichent un taux de 1% en cet automne 2015.

En second lieu, comme l’indique Moody’s, la problématique de la dette est en réalité un problème de croissance. Car la progression des déficits publics qui a eu lieu depuis 2008 n’est le résultat que d’une incapacité du pays à stabiliser son taux de croissance connu avant crise. En effet, puisque croissance et dette progressent main dans la main, le ratio de dette sur PIB a été plutôt stable dans le temps, du moins jusqu’en 2008. A partir de cette date, l’effondrement de la croissance est parfaitement corrélée avec la hausse de la dette, comme cela est observable dans le graphique suivant, prenant en compte l’évolution de la dette par rapport à son niveau de progression moyen d’avant crise, et l’évolution de la croissance par rapport à son niveau de progression moyen d’avant crise :

Dette (rouge) et PIB (bleu)  par rapport à leur tendance pré-crise. En milliards d’euros. France. Données INSEE

De plus, en prenant en compte les données fournies par l’INSEE, il apparaît que le rythme des dépenses publiques a été plutôt dégressif au courant des dernières années. Si les dépenses ont progressé de 4.45% en 2007, elles n’ont augmenté que de 1.63% en 2014. Or, malgré cet affaiblissement continu du rythme des dépenses depuis l’entrée en crise, l’Etat s’est révélé incapable de lutter efficacement contre la progression exponentielle de son endettement. Signe qu’un autre facteur est en cause, c’est-à-dire la croissance du PIB, et donc de la croissance des recettes publiques. 

Taux de croissance annuels des dépenses publiques (rouge) et des recettes publiques (bleu). France. 1991-2014. France. Données INSEE

Comme cela est visible dans le graphique ci-dessous, il apparaît que la cause de l’endettement français, c’est-à-dire des déficits, n’est pas une très forte progression des dépenses publiques au moment de la crise, comparativement à la période précédente,  mais un effondrement des recettes entre la fin 2007 et l’année 2010, signe que c’est bien la croissance économique qui est en cause.

Or, la croissance économique ne s’obtient pas en réduisant les dépenses publiques, mais en relançant l’économie en utilisant la banque centrale. Pour que le niveau de dette sur PIB puisse enfin revenir à un niveau plus acceptable, il est alors nécessaire de procéder à une relance d’une part, qui permettra d’améliorer les recettes, et de contenir les dépenses. 

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