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Nos gouvernants se croient-ils dotés de forces surnaturelles pour penser qu’il suffit de lois pour changer la réalité ?
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Pensée magique

Aujourd’hui, la loi prétend décider instantanément du sexe des parents, de la durée du travail ou de l’égalité hommes-femmes, et pourquoi pas, demain, de la couleur du ciel. La controverse sur le projet du "mariage pour tous" est le signe de la perversion de nos systèmes démocratiques dans leur acharnement législatif.

Lionel  Fleury

Lionel Fleury

Lionel Fleury est économiste et ancien président de l’AFP.

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Jadis, des siècles étaient nécessaires pour voir se manifester de grandes évolutions de la société, seuls le progrès manifeste, le droit privé ou la justice pouvant les entériner progressivement. Aujourd’hui, la loi prétend décider instantanément du sexe des parents, de la durée du travail ou de l’égalité hommes-femmes, et pourquoi pas, demain, de la couleur de l’herbe ou du ciel. La controverse sur le projet du "mariage pour tous" n’est qu’un exemple de résultat de la perversion de nos systèmes démocratiques dans leur acharnement législatif.

Cette perversion trouve son origine dans une dérive de fond du pouvoir parlementaire. Historiquement, ce dernier s’est imposé pour autoriser la dépense publique dans les seules tâches régaliennes, exercées sous son contrôle par le pouvoir exécutif. De son côté, l’arsenal législatif, comme le disait Portalis à propos du Code Civil, devait rester compact "pour ne pas déresponsabiliser les citoyens".

Progressivement, la confusion entre les pouvoirs introduite par le système majoritaire a incité tous les gouvernements à s’attribuer le droit de modifier la société par voie législative, réduisant à néant le champ d’action de la justice et du droit privé. Au cours des décennies récentes, la victimisation étant devenue objet de toutes les attentions grâce à son retentissement médiatique, le pouvoir exécutif est allé jusqu’à se réinventer le pouvoir de guérir les écrouelles. Ses prédécesseurs monarchiques, par réalisme, avaient tempéré leur formule au cours des siècles en l’énonçant non plus "Le roi te bénit, Dieu te guérit" mais "….,  Dieu te guérisse", reconnaissant implicitement que leur influence devait tenir compte de forces surnaturelles. Rien de tel chez nos nouveaux monarques, qui ne voient aucune limite à leur pouvoir de guérir la société de ses maux et de ses défauts supposés et qui, contrairement à leurs prédécesseurs, ont besoin de surenchérir et d’invoquer le changement pour ne pas avoir à gérer le présent.

En France, en plus, le gouvernement est confisqué par un parti unique, celui des fonctionnaires : il détient plus de 55% des sièges à l’Assemblée et la majorité dans toutes les instances de contrôle législatif, depuis le Conseil d’État jusqu’au Conseil constitutionnel ou la Cour de Cassation. A la différence d’une représentation parlementaire normale constituée de contribuables, d’entrepreneurs ou de représentants de la société civile, le parti unique, au centre de gravité plutôt à gauche, se méfie d’une gestion parcimonieuse des finances publiques qui viendrait limiter son influence. Logiquement, notre système s’est donc désintéressé du contrôle des dépenses pour se consacrer à sa seule compétence, écrire des textes de loi ou des règlements, sur tout et sur rien, histoire d’affirmer son pouvoir. Le résultat en est une fuite en avant dans la banqueroute budgétaire et l’inflation des textes, procurant un faux sentiment de sécurité et une déresponsabilisation générale.

La monarchie héréditaire s’est effondrée au 18e siècle, anéantie par la banqueroute et les privilèges de sa classe dirigeante. Comment éviter qu’il arrive la même catastrophe à nos monarchies parlementaires perverties ? C’est un défi qu’un vrai projet de droite républicaine devra essayer de relever.

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