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Messaline, l’épouse lubrique de l’Empereur romain Claude, mourra de ne pas être la femme d'un seul homme
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Bonnes feuilles

Impératrices, reines, maîtresses, princesses, philosophes, écrivains célèbres, les polissonnes sont des femmes libres et audacieuses qui, en dépit du péril dans une société machiste, osent tout ! À travers le portrait de ces femmes passionnées, au tempérament de feu, Pierre Lunel revient sur les luttes de pouvoir et la brutalité de certaines époques. Il soulève avec humour les jupes de l'Histoire. Extrait de "Polissonnes" de Pierre Lunel éditions du Rocher 1/2

Pierre  Lunel

Pierre Lunel

Pierre Lunel agrégé de droit romain, est l'auteur de nombreux ouvrages. Il commence sa carrière d'auteur en 1989 avec un best-seller : "L'Abbé Pierre, l'insurgé de Dieu" (Stock), vendu à plus de 500 000 exemplaires. Il poursuit avec succès grâce à une série de livres autour de figures d'exception, comme "Sœur Emmanuelle" (Fixot) ou "Ingrid Betancourt" (L'Archipel). Il est aussi l'auteur des livres "Les amours d'Hollywood" et "Kennedy, secrets de femmes" (éditions du Rocher).

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Messaline n’est pas une sentimentale mais une collectionneuse et une licencieuse. De tempé- rament échangiste et peu jalouse, elle se livre à trois amants par nuit plutôt qu’à un. Une fois nu, un homme en vaut un autre et l’esclave vaut le maître s’il se montre à la hauteur. Mais ce style de vie ne reste pas longtemps caché. Et Claude a beau être un cocu plutôt sourd, il finit par entendre des bruits courir… Il faut être sérieusement inconscient ou fondamentalement libre, ou les deux, pour se conduire ainsi dans une société romaine phallocrate où le moindre manquement aux codes quand on est une femme peut coûter très cher. Si cette femme n’est autre que l’impératrice, c’est de la folie pure, car alors la rumeur s’en empare et déforme allègrement la vérité. Bientôt il se raconte dans les tavernes de Rome que Messaline se lève la nuit, déserte la couche de Claude, dissimule ses cheveux noirs sous une perruque blonde et gagne les bordels de Suburre sous le pseudonyme de Lysisca. Là, elle se livrerait à la lie de Rome pour regagner, repue de sexe, sa couche au petit matin. Elle lancerait même des paris, d’après ce qu’on dit… Elle défierait des putains de métier… Son record serait de vingt-quatre hommes en vingt-quatre heures ! Et voilà comment on se fabrique une réputation de « petite louve » ainsi qu’on l’appelle chez les maquereaux.

Mais tout ceci est très exagéré comme on s’en doute… Ambitieuse autant que jouisseuse, Messaline sait qu’il lui faut des alliés si elle veut survivre à Claude et ménager les chances de leur rejeton Britannicus. Claude s’est entouré d’affranchis brillants et sans scrupule dont il a fait ses ministres. Il faut que Messaline en fasse ses créatures. Ainsi, Narcisse, Polybe, Pallas… Tous lui font bientôt sourires et courbettes. Messaline peut souffler. Du moins, le croit-elle… Son erreur, excusable du fait de son extrême jeunesse, sera de penser qu’avec le glaive, le poison et le sexe, elle pourrait aisément gagner. Elle était certaine qu’en trois ans à peine elle se débarrasserait de Claude. Impatience ? Mauvais jugement ? Les deux sans doute… Messaline s’est trompée sur son mari. Claude traîne une fâcheuse réputation d’idiot de la famille mais il est beaucoup plus intelligent et matois qu’il n’y paraît. En l’occurrence, la belle ne serait peut-être pas passée à l’acte si elle n’y avait été poussée par l’un de ses amants du moment. Il s’appelle Caïus Silius. Noble, beau comme un dieu, suffisant, sûr de lui et arriviste. Chevaucher la jeune épouse de l’empereur le gonfle comme une outre. Il veut la peau du cocu et prendre sa place. Rien de moins. Claude expédié, il épouserait Messaline, adopterait Britannicus, et hop !

Tenant Claude pour un imbécile, Messaline lui raconte qu’elle a lu dans les entrailles d’animaux qu’il est menacé et que le seul moyen de sortir de ce mauvais pas consiste pour elle à s’engager dans un faux mariage qui éloignera les esprits néfastes. Claude fait semblant de croire à ces balivernes et part pour Ostie. À peine a-t-il tourné le dos que Messaline et Silius célèbrent leurs noces en grande pompe dans les jardins de Lucullus, et de nuit, pour exciter les sens des convives. Une vraie bacchanale, avec les excès qu’on imagine. Messaline et Silius bien sûr donnent le la. L’ennui, c’est que l’affranchi Narcisse a retourné sa tunique et averti Claude. Craignant sa colère, il ne le prévient pas directement mais confie la nouvelle aux deux prostituées dans le lit de Claude cette nuit-là. Calpurnia et Cléopâtre se feront un malin plaisir de déconfire Messaline qu’elles jalousent. Pari gagné… Claude rentre à la hâte. Devant le cocu, les amants nient. Obstination ridicule, comment nier quand tout démontre le contraire ? Silius est invité à rejoindre ses ancêtres. Messaline, elle, s’est réfugiée dans les jardins de Lucullus, théâtre de sa dernière folie. Elle tente d’approcher Claude. Sans succès. Narcisse veille au grain, car la diablesse, grâce à ses charmes, serait bien capable de retourner le vieux Sardanapale. La colère du vieux est justement retombée. Mais l’affranchi joue à celui qui ne sait pas. Il envoie des soldats exécuter Messaline dans les jardins. Là-bas, la mère de la petite, Domitia Lepida l’a rejointe et l’exhorte à se suicider. Mourir à la romaine ! Les soldats sont là. Messaline appuie un couteau contre son sein. Impossible, l’envie de mourir ne vient pas. Elle ne désire que vivre, jouir encore et toujours… Un centurion s’impatiente, dégaine son glaive et le lui enfonce dans la poitrine jusqu’à la garde.

Extrait de "Polissonnes" de Pierre Lunel, publié aux éditions du Rocher, mai 2016. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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