Maintenant que Merkel a dégoupillé la grenade sur la Grèce, faut-il envisager la déconstruction de l'euro ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Merkel a-t-elle signée la fin de l'euro ?
Merkel a-t-elle signée la fin de l'euro ?
©Reuters

Désintégration

Selon des fuites publiées dans le Spiegel, Angela Merkel ne compterait rien faire pour empêcher une sortie de la Grèce de la zone euro. Un jeu de poker menteur qui relève pourtant d'un scénario plausible, n'en déplaise à la Commission invoquant le caractère irrévocable d'une adhésion, et qui précipiterait probablement une déconstruction de la zone économique la plus importante au monde.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Alexandre Delaigue

Alexandre Delaigue

Alexandre Delaigue est professeur d'économie à l'université de Lille. Il est le co-auteur avec Stéphane Ménia des livres Nos phobies économiques et Sexe, drogue... et économie : pas de sujet tabou pour les économistes (parus chez Pearson). Son site : econoclaste.net

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Michele Chang

Michele Chang

Professeure au sein du département d’études politiques et administratives au Collège d'Europe depuis 2006, elle est également la vice-présidente du European Union Studies Association, une association académique américaine consacrée aux études européennes.

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Bruno Cautrès

Bruno Cautrès est chercheur CNRS et a rejoint le CEVIPOF en janvier 2006. Ses recherches portent sur l’analyse des comportements et des attitudes politiques. Au cours des années récentes, il a participé à différentes recherches françaises ou européennes portant sur la participation politique, le vote et les élections. Il a développé d’autres directions de recherche mettant en évidence les clivages sociaux et politiques liés à l’Europe et à l’intégration européenne dans les électorats et les opinions publiques. Il est notamment l'auteur de Les européens aiment-ils (toujours) l'Europe ? (éditions de La Documentation Française, 2014) et Histoire d’une révolution électorale (2015-2018) avec Anne Muxel (Classiques Garnier, 2019).

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Atlantico : Selon le Spiegel, la chancelière allemande Angela Merkel serait prête à laisser la Grèce sortir de la zone euro si la gauche radicale remettait en cause la politique de rigueur budgétaire dans ce pays une fois élue. Ce scénario est-il envisageable d’un point de vue institutionnel ? Les instances européennes et les dirigeants des pays de la zone euro évoquent-ils cette hypothèse en coulisses si Syriza remportait les élections législatives anticipées le 25 janvier ?

Nicolas Goetzmann : Ce scénario n’est pas envisageable d’un point de vue institutionnel mais il devient tout à fait envisageable du point de vue de la réalité. Le problème est simple ; Syriza ne souhaite pas sortir de l’euro mais veut renégocier le paiement de sa dette. Scénario que l’Allemagne écarte d’un revers de la main. Pour le moment il s’agit d’un jeu de poker menteur puisque Jörg Asmussen, ancien membre allemand de la Banque centrale européenne et actuel secrétaire d’état aux finances du gouvernement d’Angela Merkel, fait le lien entre le gouvernement allemand et Syriza depuis plusieurs semaines. Ce qui permet également de voir qui contrôle la zone euro aujourd’hui.

L’Allemagne ne veut pas de précédent d’une telle renégociation de dette car cela pourrait inspirer une nouvelle doctrine que les électeurs allemands considéreraient comme inacceptable. Cette raison est suffisante pour que l’Allemagne puisse vouloir faire un exemple avec la Grèce. La tension est importante et la révélation du Spiegel ne sert à rien d’autre que de mettre la pression sur l’électeur Grec, signe que les discussions avec Syriza ne conviennent pas à Angela Merkel.

Alexandre Delaigue : Rien n’est prévu sur le plan juridique mais c’est possible de fait. Le scénario envisageable est celui où Syriza remporte les élections et veut appliquer son programme d’arrêt des politiques d’austérité. Si la situation se passe mal, la Grèce pourrait se retrouver dans une situation de défaut de paiement. Il y aurait beaucoup d’incertitudes, ce qui pourrait aboutir à un "bank run". Les banques grecques ont déjà été sujettes à une panique bancaire en 2012. Elles pourraient désormais faire faillite.

Si la Banque centrale grecque n'obéissait pas à la BCE, ce qu'elle peut faire, cette dernière pourrait tout à fait dire que l'euro grec n'a pas la même valeur qu'un euro classique, ce qui de facto entraînerait sa sortie de la zone euro.

De nombreuses personnalités politiques, comme c'est le cas en Grèce, n'hésitent pas à bluffer avant de négocier. Mais ailleurs aussi, les Européens ont tout intérêt à évoquer leur intransigeance. La Grèce ne pourra pas franchir un certain nombre de lignes jaunes. Si elle bénéfice d’un traitement de faveur, d’autres Etats comme le Portugal pourront eux aussi réclamer un traitement particulier. En fait, les dirigeants allemands sont probablement plus flexibles qu’on ne le pense. Ils ont intérêt à faire croire que les lignes jaunes sont beaucoup plus proches qu’elles ne sont en réalité, dans une logique de négociation.

Bruno Cautres :En fait, les traités ne prévoient pas de mécanisme de sortie de l’euro bien que le Traité de Lisbonne prévoit la possibilité de sortie de l’UE et donc de fait de l’euro. Je reste prudent sur la réalité de ce scénario. Comme l’a remarqué le journaliste Jean Quatremer sur son blog le 1er janvier, la crainte d’une sortie de la Grèce de la zone euro est un peu "surjouée". Selon ce spécialiste des "coulisses" de Bruxelles, "Syriza n’est plus le parti radical qui, en 2010, voulait sortir de l’euro" ou dénoncer unilatéralement sa dette. Et sans doute qu’un bras de fer à distance (puisque les élections ont lieu en Grèce le 25 janvier) s’est d’ores et déjà engagé entre le possible vainqueur de ces élections et l’UE ou Berlin sur le contenu et le rythme des réformes de choc appliquées à un peuple grec qui souffre dans ses profondeurs plutôt que sur la sortie de la zone euro.

Michele Chang : Un tel scenario est envisageable mais cela n’est pas probable car la préférence va au maintien des Etats au sein de la zone euro. Ce ne serait pas une bonne chose et personne ne veut voir la Grèce sortir de la zone euro. Cette dernière a réalisé ces dernières années beaucoup de réformes afin de renforcer sa gouvernance économique, en améliorant notamment la coopération fiscale. Si la Grèce rejette les politiques d'austérité cela remettrait en question la stratégie de la zone euro pour résoudre la crise. Même si un débat existe à ce sujet chez les économistes et les pays européens, les créanciers (en particulier les créanciers allemands) sont convaincus de la nécessité de mettre en place l’austérité. Il y a déjà eu des discussions concernant un possible départ 3 ans plus tôt et je serais surprirse qu'ils ignorent cette possibilité aujourd'hui. 

La zone euro pourrait-elle résister à une sortie d'un des Etats membres ? A quelles réactions en chaîne pourrait-on s'attendre, au sein de la zone mais aussi dans chacun des pays membres ? Existe-t-il des simulations d'un tel scénario ?

Alexandre Delaigue : Les conséquences sont plutôt à observer sur le long terme. Si la Grèce sort de la zone euro, un chemin sera alors tracé et l’on pourra du coup voir qui gagne, qui perd, ce qu’il se passe…Tous ceux qui disent qu’il n’y a pas de risque de contagion raisonnent à court terme. Effectivement, on ne verra pas la dette italienne ou espagnole exploser rapidement mais on risque malgré tout de se retrouver avec un lent délitement, ce qui d’ailleurs est déjà le cas.

Rappelons également que des Etats concernés par une grosse récession comme l’Argentine au début des années 2000 ont fini par aller mieux plus tard. Si la Grèce fait défaut, il deviendra intéressant d’aller y acheter de l’huile d’olive et d'y faire du tourisme. Plusieurs années plus tard, la situation pourrait nettement s'améliorer. Les Grecs sentiraient toutefois les effets négatifs : la valeur de leur patrimoine pourra considérablement diminuer. En ce qui concerne les simulations, elles relèvent au mieux des exercices mentaux, au pire des exercices politiques. Il existe des gens qui sont depuis le début contre la création européenne. Ces gens-là font des évaluations en disant qu'une sortie serait aisée, mais en réalité nous n’en savons rien. Une telle situation peut générer d’énormes mécontentements, des problèmes géopolitiques, etc.

Nicolas Goetzmann : "L’euro est irréversible". Cette formule, prononcée par Mario Draghi en juillet 2012 a permis de calmer considérablement le jeu en plein cœur de la crise des "dettes souveraines". A partir de cet instant, les marchés avaient reçu le signal que la BCE ferait tout pour sauver l’euro. Etant donné qu’une banque centrale dispose des outils nécessaires à la réalisation d’une telle promesse, la spéculation avait cessé. Mais si cette promesse est remise en cause, on ouvre une nouvelle fois la boîte de pandore.

En rompant la promesse, la nature "irréversible" de la zone euro disparaît. Il s’agirait surtout d’un constat d’échec flagrant. L’énorme prix payé par la population grec n’aura servi à rien, et ce, après 5 ans de politique d’austérité. Il ne faut pas oublier que les premières prévisions faites par la BCE et le FMI faisaient état d’une récession de 2.6% en 2010 et d’un retour de la croissance dès 2011. Le résultat est une contraction de 25% du PIB au total. Un carnage. Et comme le cobaye ne guérit pas, il risque de "mal" voter, ce qui, pour les instances de la zone euro, est véritablement insupportable.

Michele Chang : Il est difficile de prévoir toutes les possibilités. Les marchés sont plutôt calmes, même après les informations concernant un possible départ de la Grèce. Je doute qu’une sortie de la zone euro menacerait cette dernière comme il y a 3 ans mais il y aurait néanmoins des conséquences pour ce pays.  Leurs dettes sont en effet en euros et un départ de la zone euro ferait qu’on attendrait la chute de leur nouvelle monnaie. Il ne serait alors pas certain que les marchés financeraient le nouveau gouvernement grec. Pour la zone euro, ce serait une situation sans précédent. Il y a déjà un manque de solidarité et si la Grèce était poussée dehors ce problème s’aggravera. C’est encore plus important que la contagion. L'économie grecque est petite et si les marchés sont convaincus par les réformes de la zone euro, les dommages peuvent être limités. Les simulations existent mais il est difficile de faire une telle estimation car la réaction des marchés n’est pas facile à prédire. 

Selon la Commission européenne, l'appartenance à la zone euro serait  "irrévocable". Faut-il comprendre que personne au sein des institutions européennes ne travaille à des scénarios de déconstruction de l'espace monétaire européen ?

Nicolas Goetzmann : Si les institutions européennes se mettaient à travailler sérieusement à ce type d’éventualités, une fuite serait dévastatrice. Ce qui rend, de fait, plutôt improbable une telle éventualité. L’objectif pour les institutions européennes a toujours été de montrer qu’une telle occurrence était impossible, elles ne pourraient se désavouer en l’imaginant sérieusement et en tentant d’en prévoir les conséquences.

Par contre, l’article qui a été cité par la commission européenne pour justifier le caractère irrévocable de la zone euro est le 140 paragraphe 3 ; c’est-à-dire :

"le Conseil (..) fixe irrévocablement le taux auquel l'euro remplace la monnaie de l'État membre concerné et décide les autres mesures nécessaires à l'introduction de l'euro en tant que monnaie unique dans l'État membre concerné".

Si le mot irrévocable est bien présent, l’interprétation de l’article effectuée par la porte-parole de la commission, Annika Breidthardt ; lui appartient.

Bruno Cautrès : Bien au contraire. Il est impossible que la Commission européenne ne planche pas sur ces questions en interne. Rappelons que parmi les priorités énoncées par la Commission Junker, l’Union économique et monétaire occupe une place centrale. Selon les termes mêmes utilisés par la Commission, il s’agit de "conférer une plus grande légitimité démocratique aux décisions concernant l'aide aux pays de la zone euro en difficulté, en renforçant le contrôle du Parlement européen et des parlements nationaux", "d’évaluer les programmes d'aide et de réformes, non seulement sous l'angle de la viabilité financière, mais aussi de leurs incidences sur les citoyens et le pays concerné", de "réexaminer la législation relative à la surveillance budgétaire et macroéconomique ("six-pack") et les nouvelles règles budgétaires ("two-pack") ; enfin "d’encourager l'adoption de réformes structurelles supplémentaires dans les pays de la zone euro". Comme on le voit, la Commission européenne semble très concernée par l’ensemble des conséquences économiques, sociales et politiques des programmes de réformes et d’aides mis en place par la "Troïka" ou les gouvernements nationaux. S’il faut prendre avec recul les belles intentions affichées, il faut également ne pas tomber dans le stéréotype d’une Commission européenne complétement sourde et aveugle.

Michele Chang : Non, je dirais qu'il n'y a aucune raison d’évoquer publiquement une sortie de la zone euro car cela pourrait favoriser la spéculation et bouleverser les marchés. Comme dans le cas d’une faillite d'une entreprise, il faudrait en outre que la sortie soit faite rapidement.

Parmi les propositions de déconstruction de la zone euro portées par diverses formations politiques au sein des pays membres, lesquelles sont les plus farfelues et lesquelles sont les plus sérieuses ?

Alexandre Delaigue : Je ne vois pas comment on peut faire quelque chose de sérieux car il y a trop d’incertitudes. Il existe un paradoxe : le parti espagnol Podemos disant que le secteur privé ne pourra jamais payer la dette ainsi que Syriza qui veut rester dans la zone euro ont un diagnostic juste et n’ont pas un programme plus farfelu que d’autres. Ils sont même plus réalistes que le scénario de la troïka qui est ultra optimiste depuis le début. Le programme de la Troïka n’est pas économiquement sérieux et repose sur la méthode Coué. Il n’existe pas encore en France d’offres alternatives et celle du FN est très farfelue. Leur programme consistant à vouloir sortir de la zone euro et revenir au franc ne tient pas la route.

Bruno Cautrès : On compte aujourd’hui plusieurs études sur les conséquences économiques des différents scenarii de sortie de la zone euro. Une très intéressante analyse des Décodeurs publiée sur le site du Monde en septembre 2014 montre que certains scenarios, par exemple ceux de l’économiste (classé à gauche) français Jacques Sapir, reposent sur des fondements juridiques et économiques même s’ils comportent de fortes zones d’ombre. En l’occurrence il s’agit d’un scénario de requalification de la dette publique (française) en mettant de côté les emprunts contractés en droit étrangers et en remboursant en monnaie nationale (franc) ceux contractés sous droit français. Mais de grandes inconnues restent pour une raison majeure : on ne sait pas quelles seraient les réactions des créanciers (actions en justice pour réfuter cette requalification), quelles seraient les réactions des marchés et quelles seraient les conséquences pour les dettes privées.

De même on ne sait rien des effets de dominos de la sortie d’un pays sur les autres. D’autres scenarii ont été élaborés. Ainsi, le comité du Wolfson Economics Prize a demandé en 2012 aux économistes de proposer des scenarios répondant à la question suivante : "Comment dissoudre l’union monétaire européenne sans plonger le monde dans une crise pire que celle qui secoue l’UE actuellement ?". Cinq scenarios ont été sélectionnés par le jury de ce prix et un scenario a été primé, celui proposé par l’équipe de Roger Bootle, directeur général du cabinet de conseil indépendant Capital Economics. Ce scenario préconisait la sortie de la Grèce de la zone euro avec comme corollaire la mise en place d’une nouvelle monnaie à parité avec l’Euro, la conversion des salaires, des prix, des dépôts dans les banques et des emprunts dans cette nouvelle monnaie nationale. Tout ceci accompagné de mécanismes et d’institutions de contrôle de l’inflation, des prix, etc…Comme on le voit, la sortie de l’euro fait l’objet d’analyses faites par des économistes défendant différents scénarios. Mais on sait également qu’il peut exister un écart entre les modélisations et les réalités dans l’économie réelle.

Nicolas Goetzmann : Un scénario de sortie de l’euro porté par un parti politique m’apparaît farfelu par nature. Non pas par dogmatisme mais tout simplement en raison de la présence des marchés financiers. Si un parti qui porte un tel programme de sortie de l’euro progresse dans les sondages, et se retrouve en situation de l’emporter dans un pays majeur, les marchés vont réagir et se préparer à cette éventualité avant qu’elle ne se réalise. Les investisseurs ne vont pas attendre bien sagement avant de se protéger. Ce qui signifie que le programme ne devrait pas avoir le temps de voir le jour.

Tout comme il est farfelu de chercher à évaluer ce que serait l’euro après une sortie d’un grand pays, puisque l’euro ne serait plus. De plus, si la problématique repose bien sûr sur les modalités de sortie, le plus important reste de savoir ce qui est proposé à la place.

Et là, il n’y a pas grand-chose de convaincant sur le marché. Même pas de réel programme monétaire mentionnant les objectifs d’une nouvelle banque centrale. Ce qui est pourtant la base.

Michele Chang : Les choses les plus sérieuses sont celles évoquées par les pays membres actuels. L'incertitude sur les vrais coûts d'une sortie est une puissante incitation à rester dans la zone euro et à garder tous ses membres. La plus farfelues des propositions est d’établir deux zones euro, une pour les pays nordiques et une autre pour les pays d’Europe du sud. 

Dans le pire des cas, comment les choses pourraient-elles se passer ? Comment faudrait-il s'y prendre pour éviter d'en arriver là, que ce soit en préparant une déconstruction propre ou, sans aller aussi loin, en réformant le mécanisme ? Existe-t-il des solutions intermédiaires ?

Alexandre Delaigue : La solution est relativement simple : la BCE montre au créneau, elle affiche son soutien à tous les pays qui font des efforts, fait des opérations bien visibles de rachat d’actifs publics dans les pays en difficultés… La BCE dispose de moyens infinis si elle le souhaite et aura donc les coudées franches dans un tel contexte. Si une partie de la dette grecque est encore détenue par des banques privées ces pertes peuvent être toutefois digérées. En cas d’intervention de la BCE il y a un risque de "bank run" mais elle peut toutefois fournir un mécanisme innovant. Je ne suis pas convaincu par une zone euro à plusieurs vitesses, ce qui releverait du bricolage. Le projet européen doit être partagé par tout le monde.

Nicolas Goetzmann : Au-delà d’une sortie de la zone euro, la solution qui apparaît comme étant la moins mauvaise est la modification du mandat de la BCE. Ce qui permettrait de sauvegarder ce qui reste de l’ensemble et de reconstruire la zone euro sur la notion de plein emploi. C’est un projet un peu plus porteur et mobilisateur que la seule stabilité de prix. Pour qu’une telle réforme puisse voir le jour, et il ne faut pas compter sur l’Allemagne pour la proposer, il est impératif que ce soit la France qui la porte. Car elle est le seul pays ayant un poids encore suffisant pour faire dévier la trajectoire actuelle. Mais cela nécessite une ambition européenne que François Hollande ne semble tout simplement pas avoir. Il s’agit, à mon sens, de l’unique solution viable du projet de la zone euro. Sans cela, ce sera la stagnation jusqu’à l’éclatement, même si cette période peut durer encore très longtemps. Comme elle peut commencer à rompre dès cette année.

Michele Chang : C'est difficile de savoir car un tel plan n'est pas public. Dans le pire des cas, une sortie de la Grèce encouragerait la spéculation contre d'autres pays, y compris les grands Etats comme la France et l'Italie. Cela serait le début de la fin de l'euro et probablement de l'UE. Les problèmes ne sont pas vraiment d’ordre institutionnel mais ce sont des désaccords sur la façon dont fonctionne l'économie, avec les débats autour de l'austérité. C’est aussi un problème politique : les sauvetages ne sont en effet pas populaires au sein des pays créanciers. 

Propos recueillis par Julien Chabrout

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