Les routiers désormais obligés d’éviter Calais à cause de la menace des clandestins : les raisons d’un pourrissement<!-- --> | Atlantico.fr
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Les chauffeurs routiers en direction de l'Angleterre vont bientôt être dans l'obligation de dévier leur trajectoire de Calais.
Les chauffeurs routiers en direction de l'Angleterre vont bientôt être dans l'obligation de dévier leur trajectoire de Calais.
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Haute tension

Une recrudescence des violences entre les migrants, les passeurs et les forces de l'ordre à Calais a conduit la plupart des chauffeurs routiers en partance pour l'Angleterre à dévier leur trajectoire de la ville.

Atlantico : Les chauffeurs routiers en direction de l'Angleterre vont bientôt être dans l'obligation de dévier leur trajectoire de Calais. Et pour cause, plusieurs altercations ont eu lieu ces derniers jours entre les forces de l'ordre et certains migrants armés. Que s'est-il passé exactement ?

Catherine de Wenden : Dès la fermeture du centre de Sangatte en 2002 par Nicolas Sarkozy et de la " jungle " de Calais en 2009 par Eric Besson, on a pu assister à une dispersion tout le long de la côte des migrants qui, à l’origine, étaient principalement concentrés dans ces dits centres. Dès lors, ils se sont mis à errer pour la plupart dans les jardins publics, en ville, etc. en attendant de monter clandestinement dans un train, dans un bateau ou dans un camion de marchandises. Et c’est précisément de là que viennent les altercations entre les migrants, les forces de l’ordre et les chauffeurs routiers, comme on a pu le voir ces derniers jours par exemple lorsqu’un passeur kurde a pointé une arme contre l’un des policiers lors de l’arrestation de quinze clandestins dans un camion.

Il est cependant important de rappeler que la mairie de Calais refusait jusqu’à peu de déployer des actions de solidarité à l’égard des migrants, étant donné que depuis très longtemps, elle a été confrontée à ces arrivées de personnes voulant passer en Angleterre. Ce n’est qu’il y a très peu que Natacha Bouchart, la nouvelle maire de Calais, a demandé au ministère de l’Intérieur la création d’un centre d’accueil de 400 places pour les exilés afin de faire face à la situation.

Il y a donc, depuis un certain temps, une sorte de bras de fer entre la mairie de Calais et les associations de migrants. On a vu, par ailleurs, ces dix dernières années – depuis la fermeture de ces fameux centres – beaucoup de solidarité de la part des personnes habitant la région (pas uniquement Calais) à l’encontre des migrants. On a pu également assister à un bras de fer avec les policiers qui ont pour mission d’éviter les concentrations de population et de disperser au maximum les personnes qui se mettent donc à errer pour la plupart.

Calais est-il vraiment devenu plus dangereux pour les chauffeurs routiers, ou ces violences sont des faits usuels ? Comment expliquer que l'on en soit arrivé à ce niveau de violence ?

Ce type de violence semble être visiblement assez rare. Il faut bien comprendre que pour la plupart des migrants souhaitant passer, il s’agit d’une question de vie ou de mort. Ils ont parcouru des milliers de kilomètres pour atteindre Calais. Ils en sont à leur dernière étape avant l’Angleterre et se montrent donc prêts à tout. Quant aux passeurs, il y a une véritable économie de passage. Chaque migrant paye une fortune afin de pouvoir monter clandestinement dans ces bateaux, trains et camions. Et pour les chauffeurs de ces derniers, quoi qu’il arrive, ils seront obligés de dénoncer quiconque tente de s’introduire chez eux, sous peine d’être soumis à de fortes amendes.

On constate donc une montée de la pression concernant la question des migrants de Calais depuis plusieurs mois, et particulièrement depuis juillet dernier. Les pouvoirs publics n’ont pas vraiment de réponses à apporter, ce qui explique notamment une accentuation des tensions entre les policiers, les chauffeurs routiers et les migrants.

Par ailleurs, l’une des raisons pour lesquelles la maire de Calais souhaite à tout prix la création d’un centre d’accueil réside dans le fait qu’une importante partie de la population souhaite depuis longtemps la réhabilitation d’un centre afin d’accueillir ces personnes qui n’ont rien. Aller dans leur sens signifie donc une tranche d’électorat en plus. De plus, si ces populations locales se montrent si solidaires, c’est d’une part parce que cette région a été fortement touchée par la Seconde Guerre mondiale et qu’une partie de la ville a été rasée. Les gens considèrent donc qu’il y a un peu de leur histoire personnelle dans l’histoire de ces migrants. Et d’autre part, cela ne sert à rien d’essayer de les disperser ou de les dissuader, étant donné que les migrants reviennent toujours dans l’espoir de passer outre-Manche. Et ce pôle d’attraction que représente cette ville va perdurer.

Les candidats clandestins à l'immigration outre-Manche sont-ils de plus en plus nombreux à Calais ?

Il est très difficile d’avoir des chiffres précis concernant le nombre de clandestins à Calais étant donné qu’ils sont en majorité sans papiers. Cependant, la plupart viennent de régions actuellement instables.

La Libye, par exemple, avait signé plusieurs accords bilatéraux de réadmission avec l’Italie et la France. A partir du moment où l’Etat libyen s’est retrouvé face à une crise interne, elle n’a pu assurer plus longtemps le respect de ces accords, ce qui a contribué à faire à nouveau de la Libye une terre de passage pour les subsahariens vers l’Europe.

De plus, la crise du Proche-Orient, notamment en Syrie et en Irak, pousse les populations à traverser la Turquie pour venir en Europe. La Grèce ne délivrant que très peu de visa pour les réfugiés, la plupart choisissent donc de passer en France pour rejoindre le Royaume-Uni où se trouvent nombre de leurs compatriotes.

Les migrants sont-ils prêts à prendre de plus en plus de risques pour rejoindre l'Angleterre ?

Totalement. Comme expliqué précédemment, tous viennent de parcourir des milliers de kilomètres et Calais constitue donc la dernière étape de leur parcours. Ils doivent donc absolument y arriver. Et la France, à savoir les pouvoirs publics et les policiers sur place, les a déjà encouragés à essayer de passer. 

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