Les libéraux ont disparu de la scène politique alors que la situation appelle avec urgence l’application de réformes libérales<!-- --> | Atlantico.fr
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Emmanuel Macron et Elisabeth Borne lors d'une cérémonie officielle.
Emmanuel Macron et Elisabeth Borne lors d'une cérémonie officielle.
©GONZALO FUENTES / POOL / AFP

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Les libéraux ont tous disparu et ceux qui restent se cachent, alors que la situation économique mondiale imposerait l'application de mesures libérales, et l'opinion réclame des résultats que seul le libéralisme a su dans le passé générer.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Rares sont les responsables politiques de droite comme de gauche qui se déclarent porteurs des idées libérales. Ils se cachent. Et si, dans le passé, certains avaient été convaincus par le libéralisme de Valéry Giscard d'Estaing, ceux-là même n'assument plus du tout l'utilité de telles mesures. Plus graves parce que plus contradictoires, les critiques fusent actuellement contre un État hyperprésent, hyper-interventionniste, une administration inefficace et coûteuse. Ces critiques viennent de partout, de droite comme de gauche, mais si jamais quelques experts aventurent des propositions libérales pour remédier aux dysfonctionnements de l'hyper-centralisme, ils deviennent inaudibles et illisibles sous le prétexte que les Français, de par leur histoire et leur culture, n'admettraient jamais une once de libéralisme. La conjoncture ne s'y prête pas, nous expliquent certains, la démocratie a besoin d'être protégée, c'est une valeur cardinale. Mais le libéralisme conduit inexorablement au capitalisme financier, à la spéculation et aux inégalités... Ce serait donc le pire des systèmes, le plus suspect d'exploitation au profit de quelques-uns : des riches, évidemment.

Conséquences, alors que la planète est confrontée à des mutations considérables, la seule méthode qui dans l'histoire a pu au cours des siècles passés favoriser l'émergence d'un système de création de richesse pour le plus grand nombre est aujourd'hui rejetée ou marginalisée, y compris dans les démocraties politiques.

Sans revenir à l'origine du monde, dont il faut laisser l'étude à Gustave Courbet et à ses amis psychanalystes de l'école de Lacan, le libéralisme n'est pas une idéologie préfabriquée comme le marxisme ou le socialisme, c'est un ensemble de concepts, d'attitudes, qui renvoient à la liberté individuelle. Au siècle des Lumières, on avait dans la Déclaration des Droits de l'Homme gravé une définition que personne ne pourrait renier aujourd'hui : "La liberté individuelle consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui."Tout était dit ! Personne, ni de droite ni de gauche, ne peut aujourd'hui rejeter cette définition... et pourtant, quand on coche  les cases d'une organisation libérale, la plupart sont rejetées ipso facto ou nuancées par un sempiternel "oui, mais...".

L'économie de marché d’abord est au cœur d'un système de liberté. A priori, les acteurs du système, producteurs, consommateurs, épargnants, investisseurs, salariés, revendiquent cette liberté individuelle, ce qui implique l'organisation de confrontations et de négociations qui doivent forcément déboucher sur des compromis multiples, d'abord sur les prix et la valeur des richesses créées, mais aussi sur leur organisation interne de contre-pouvoir. L'économie de marché ne fonctionne que dans le respect de la concurrence, et c'est cette concurrence qui contribue au progrès, toujours plus, toujours plus vite et toujours mieux. La liberté d'innover est devenue corollaire de l'économie de marché, avec des résultats considérables  depuis deux siècles.

On s'est aperçu aussi que ce libéralisme économique ne fonctionnait bien que dans un cadre démocratique. Il faut qu'une majorité politique se dégage, il faut que chacun soit libre de bouger, de créer, d'entreprendre, d'investir, et d'innover. Les tentatives de créer des économies de marché dans les pays émergents qui restent réfractaires aux principes de la démocratie n'ont pas très bien réussi. La Russie, la Chine, par exemple, revendiquent leurs ambitions d'appartenir au cercle de l'économie de marché, mais parce qu'elles n'ouvrent pas les portes aux libertés individuelles, ça marche mal et ça finit par buguer... Le libéralisme de marché a besoin d'une liberté individuelle élargie à la liberté de penser, d'innover et de s'enrichir. Les pouvoirs autocratiques ne peuvent pas l'accepter, leur gouvernance finit toujours par refermer les économies de marché.

Dans les régimes démocratiques, dont les valeurs de liberté sont culturelles et historiques, elles commencent à remettre en cause des pans entiers du libéralisme. Pourquoi ? Tout simplement parce que les gouvernances démocratiques se découvrent l'obligation d'intervenir pour réguler le fonctionnement des marchés. Et parfois même à acheter des soutiens politiques par le biais d'une redistribution généreuse. À partir du moment où cette démocratie a besoin d'être appuyée par une majorité, la gouvernance aura la tentation de protéger ceux qui lui apportent la majorité : d'où la tentation démagogique ou populiste qui consiste à satisfaire une envie, un besoin, au risque de détruire une capacité de progrès.

Nous sommes entrés dans une époque compliquée à équilibrer le partage du progrès pour tous, ce qui devrait être le moteur comme au temps des Trente Glorieuses.

D'un côté, il faut respecter les forces du marché qui expriment des solutions pour des problèmes immédiats. Mais de l'autre, il ne faut pas insulter l'avenir. D'un côté, une mondialisation qui fabrique pour une moitié du monde du pouvoir d'achat. De l'autre, une mondialisation qui travaille tellement vite et fort qu'elle fabrique le réchauffement climatique qu'il va falloir combattre. Pour les uns, la fin du monde, pour les autres, la fin du mois. Avec des structures politiques fragiles pour gérer les démocraties dans la tempête et une mondialisation qui freine les flux d'échanges. On s'aperçoit que si l'économie de marché est mise à mal dans certains pays, les valeurs de la démocratie sont moins respectées qu'il y a un siècle. Notamment dans les vieux pays où la démocratie a été installée en premier. Beaucoup de ces démocraties (la France, la Grande-Bretagne, l'Allemagne, et même les États-Unis) ne respectent plus les valeurs du libéralisme. Ces démocraties laissent les États intervenir dans la gestion quotidienne comme jamais depuis la révolution industrielle. Les États se mêlent de tout et de rien, ils redistribuent plus de la moitié des richesses produites (c'est vrai en France, un peu moins ailleurs), ils consomment et vivent à crédit... La pandémie du Covid-19 et les crises financières successives et systémiques nous ont apporté des habitudes d'États providence omniprésents mais qui asphyxient les capacités d'innovation et de progrès. En renforçant un pouvoir d'intervention énorme, par la fiscalité, les normes, les aides et les subventions, l'État hypothèque la concurrence des initiatives privées et empêche au marché de fonctionner.

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