Les Français se détournent du livret A : mauvaise ou bonne nouvelle ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Les livrets défiscalisés sont en perte de vitesse.
Les livrets défiscalisés sont en perte de vitesse.
©Reuters

Vases communicants

Malgré une collecte nette en chute sur le Livret A, la Caisse des dépôts n'a pas beaucoup de souci à se faire pour ses finances.

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Atlantico : La collecte nette (dépôts moins retraits) sur le Livret A, dont le taux a été abaissé à 1,25 % le 1er août, continue sa baisse. Après être passée à 380 millions d’euros en juillet, elle a chuté à 50 millions d’euros en août 2013, a indiqué la Caisse des dépôts.  A quoi cette tendance est-elle due ?

Philippe Crevel : Depuis le mois de mai, les livrets défiscalisés sont en perte de vitesse. Après avoir enregistré un record au mois de janvier avec près de 11 milliards d’euros de collecte, le Livret A et le LDD sont sur la pente descendante. Si la collecte était de 4,6 milliards d’euros au mois d’avril, elle est passée à 430 millions au mois de mai. En juillet, elle s’est élevée certes à 1,23 milliard d’euros tout en demeurant inférieure à celle de juillet 2012 où elle avait atteint 2,56 milliards d’euros. Au mois d’août, elle n’a été que de 260 millions d’euros contre un peu plus de deux milliards d‘euros en 2012. Ce recul est très net pour le seul livret A dont la collecte n’a été que de 50 millions d’euros au mois d’août.

Trois raisons peuvent expliquer cette diminution. Il y a la fin de l’impact du relèvement des plafonds du livret A et du LDD qui a dopé les versements durant toute l’année 2012. Les titulaires de livrets au plafond ont effectué des versements exceptionnels qui s’estompent au fil du temps. Deuxièmement, la baisse du taux qui est intervenue au 1er février et au 1er août a sans nul doute joué un rôle dans la décrue de la collecte. Les épargnants considèrent qu’entre un compte courant et un Livret A, la différence est trop faible pour effectuer un transfert. La troisième raison de cette baisse est à rechercher du côté du pouvoir d’achat. La stagnation des salaires et l’augmentation des impôts amputent les revenus des Français. Pour maintenir leur niveau de vie, ils réduisent leur effort d’épargne. En 2012, le pouvoir d’achat s’est contracté de 0,9 %. Il n’est donc pas étonnant que l’épargne souffre, d’autant plus que les Français ont voulu maintenir, en 2013, les dépenses liées aux vacances.

Faut-il s’inquiéter, ou au contraire se réjouir de voir les Français se détourner de ce placement ? Quelles pourraient être les conséquences ?

Il n’y a pas de désamour entre les Français et les livrets défiscalisés. Le Livret A et le LDD ont enregistré une collecte nette de près de 50 milliards d’euros en 2012 dont plus de 28 milliards d’euros pour le seul Livret A. Depuis le 1er janvier 2013, 23 milliards d’euros se sont placés sur ces deux livrets dont plus de 15 milliards pour le Livret A. Les Français sont toujours très attachés à l’épargne de précaution défiscalisée. Les des deux livrets mentionnés ci-dessus dépasse 365 milliards d’euros. La Caisse des Dépôts, qui gère les ressources du Livret A, n’a aucun problème pour financer le logement social. Au contraire, il n’y a pas assez d’opérations de construction en cours pour utiliser les ressources disponibles. Compte tenu des règles en vigueur, la Caisse des Dépôts peut faire face à un mouvement modéré de décollecte. En effet, 50 % de l’épargne collectée est placée sur un fonds permettant de garantir la liquidité du Livret A et le capital investi.

Outre le Livret de développement durable (LDD), qui enregistre une hausse constante sur un an (210 millions d’euros de collecte nette en août), vers quels autres placements les Français se tournent-ils ? Lesquels devraient-ils privilégier ?

Le Livret de Développement Durable, qui est un clone du Livret A, souffre moins que ce dernier du fait qu’il a été, dès le départ, distribué par tous les réseaux bancaires. La banalisation de la commercialisation du Livret A est intervenue simplement au 1er janvier 2009. De ce fait, le LDD est souvent l’antichambre du compte courant. Les ménages arbitrent entre le compte courant et leur LDD qui sont souvent hébergés dans la même banque. Pour le Livret A, l’opération nécessite fréquemment un virement entre deux établissements.

En période de crise et du fait des impôts à payer en septembre et durant tout l’automne, les ménages peuvent être conduits à conserver d’importantes liquidités sur leurs comptes courants. En fonction de leurs disponibilités, ils devraient néanmoins regarder du côté des placements longs, que ce soit le PEA ou l’assurance-vie, qui disposent d’une fiscalité attractive. Les bonnes performances du marché d'actions devraient inciter les Français à regarder à nouveau ce placement qu’ils ont un peu vite rejeté durant la crise financière.


Propos recueillis par Gilles Boutin

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