Les facteurs biologiques qui mènent à l'évolution sont plus abondants qu'on ne le pensait chez les animaux sauvages<!-- --> | Atlantico.fr
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Un chevalier échassier marche dans l'eau dans les "Vieux-Salins" à Hyères, dans le sud-est de la France, le 31 août 2021.
Un chevalier échassier marche dans l'eau dans les "Vieux-Salins" à Hyères, dans le sud-est de la France, le 31 août 2021.
©Nicolas TUCAT / AFP

Adaptation

Selon une étude menée par une équipe de recherche internationale, les animaux évoluent deux à quatre fois plus vite que ce que l'on pensait, des réponses observables à l'échelle des décennies.

Céline Teplitsky

Céline Teplitsky

Céline Teplitsky est Chargée de recherche au Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive (CNRS) à Montpellier. Ses recherches portent sur les mécanismes qui favorisent la variation phénotypique ainsi que sur les possibilités et les contraintes d’adaptation, en plaçant ces questions à la frontière entre la biologie de l’évolution et la biologie de la conservation.

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Atlantico : On utilise l’expression « fuel for evolution » que recoupe cette expression ?

Céline Teplitsky : C’est une image qu’on emploie pour désigner la variance génétique. Pour que l’évolution se produise dans une population, il faut trois choses. Il faut des caractères qui varient entre les individus ; que ces variations aient une base génétique, et donc puissent être transmises aux générations suivantes. La variation génétique c’est la part de variation des caractères entre les individus qui est dûe à une variation au niveau génétique (par opposition par exemple à une variation due à l’environnement). Et enfin, il faut que ces caractères soient sélectionnés, c’est-à-dire qu’ils affectent la fitness (valeur sélective), le nombre de descendants un individu va laisser à la génération suivante. La variance génétique est un descriptif de la capacité des populations à évoluer, au temps T, dans un environnement donné.

Dans votre étude, vous posez la question de savoir si face à un monde qui évolue fortement en raison du changement climatique, les animaux sont en capacité d’évoluer et de s’adapter. Vous concluez que tant les oiseaux que les mammifères peuvent évoluer deux à quatre fois plus vite que ce qu’on pensait. Comment l’avez-vous mesuré ? Et comment l’expliquer ?

L’évolution ne peut arriver que s’il y a une variation génétique. Dans notre étude nous avons regardé la variation génétique de la fitness, ce qui estime le potentiel évolutif global d’une population.  Ce qu’on observe c’est que la variance génétique entre individus pour la fitness est plus importante que ce qu’on pensait. L’une des explications est très statistique. Nos modèles représentent mieux qu’auparavant ces données. Avant les modèles utilisaient une distribution gaussienne, désormais nous prenons en compte le fait que beaucoup d’individus ne laissent pas de descendants (zéro inflation). Notre étude porte sur 19 populations de 14 espèces, c’est l’équivalent de 2,6 millions d’heures de travail de terrain. Ce genre d’étude n’est possible qu’en se basant sur des suivis à long terme et avec des pedigree. Ces données permettent d’estimer comment la variation se répartit entre familles et d’estimer la variation génétique sans savoir quel gène fait quoi.

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Est-ce que ces résultats donnent des informations sur la capacité ou non des animaux à s’adapter au monde changeant, notamment en raison du climat ?

C’est une question compliquée. Notre étude montre une variabilité génétique de la fitness substantielle et suggère que la fitness pourrait augmenter de 10% par génération. On s’attendrait donc à ce que les populations soient en croissance. Or ce n’est pas ce qu’on observe. On peut avancer plusieurs explications. Peut être que face à un monde qui change leur capacité d’évolution leur permet simplement de se maintenir à flot. Il est difficile de savoir pour combien de temps : la dégradation des environnements peut avoir des effets démographiques bien plus forts que la capacité des individus à s’adapter. Il est aussi possible que parce que tout le monde évolue un peu, cela crée plus de compétition. Quand tout le monde court autour de vous, il faut courir pour rester sur place.

On a longtemps pensé que l’évolution était un processus très lent. Nos résultats soulignent que l’évolution en cours peut être fréquemment plus rapide que ce qu’on pensait mais il est difficile d’extrapoler au futur, en particulier dans un monde qui change - ne serait-ce que parce que la variation génétique peut dépendre de l’environnement. Il faut donc rester prudent mais une chose est sure, il est important de prendre en compte les capacités d’évolution (et leurs limites) pour comprendre et prédire le devenir des populations.

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