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UE Bruxelles AFP

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Les Etats-Unis vont-ils vers un krach ?

Fed/ BCE : le match de l’impact des politiques monétaires sur l’économie européenne

Faut-il avoir peur du grand retour de l’inflation annoncé à grands coups de clairons par tant d’esprits éclairés ?

La BCE semble nettement privilégier le climat à l’emploi dans ses objectifs de politique monétaire. Est-ce bien raisonnable ?

L’inflation n’a plus d’impact sur les Etats-Unis ?

Quand la montée des prix aux Etats-Unis fait oublier aux Européens ce que leur coûte l’inflation trop basse chez eux 

Ce 26 août : chute mondiale des bourses et reprise européenne endommagée ?

<h3>Atlantico&nbsp;: Les d&eacute;cisions de politique mon&eacute;taire de la BCE et la FED se r&eacute;percutent ind&eacute;niablement de mani&egrave;re asym&eacute;trique sur d&rsquo;autres pays et ont un r&ocirc;le important sur des variables telles que les conditions financi&egrave;res des &Eacute;tats et l&rsquo;activit&eacute; &eacute;conomique des entreprises. &Agrave; l&rsquo;heure actuelle, entre la FED et la BCE, qui a le plus d&rsquo;impact sur l&rsquo;&eacute;conomie europ&eacute;enne ?&nbsp;</h3>
R&eacute;mi Bourgeot&nbsp;: Il est important de voir la politique mon&eacute;taire, en particulier en p&eacute;riode de crise, en conjonction avec la politique fiscale et avec l&rsquo;action plus g&eacute;n&eacute;rale des Etats sur le front &eacute;conomique, sociale, sanitaire mais aussi technologique. On voit actuellement les Etats-Unis et l&rsquo;Europe reprendre le chemin de la croissance, et les plans de relance massifs, notamment aux Etats-Unis, y jouent &eacute;videmment un r&ocirc;le crucial. La politique mon&eacute;taire n&rsquo;est qu&rsquo;un &eacute;l&eacute;ment dans cet ensemble de politique &eacute;conomique. Les banques centrales ne cr&eacute;ent pas de la croissance &eacute;conomique. Elles cr&eacute;ent des liquidit&eacute;s dont elles inondent actuellement les march&eacute;s au travers d&rsquo;achat de titres de dette. Cela a des cons&eacute;quences massives sur ces march&eacute;s naturellement et sur l&rsquo;ensemble des conditions de financement. L&rsquo;importance des march&eacute;s d&rsquo;obligations priv&eacute;es aux Etats-Unis donnent un r&ocirc;le particulier aux politiques de la Fed, au-del&agrave; m&ecirc;me de la question de la conjoncture &eacute;conomique g&eacute;n&eacute;rale.
La question qui se pose par ailleurs aujourd&rsquo;hui est celle de l&rsquo;adaptation de la politique mon&eacute;taire au d&eacute;but de reprise &eacute;conomique. Derri&egrave;re les chiffres agr&eacute;g&eacute;s indiquant une reprise, on voit &agrave; l&rsquo;&eacute;vidence des pans entiers de la soci&eacute;t&eacute; ravag&eacute;s par cette crise, et en particulier les jeunes en Europe. Face &agrave; cette situation la BCE aura plus de mal encore que la Fed &agrave; normaliser sa politique mon&eacute;taire dans les ann&eacute;es &agrave; venir. Le paradoxe de cette situation, naturellement, repose dans le fait que ces programmes dits de relance mon&eacute;taire ont de terribles effets secondaires, en particulier sur les march&eacute;s immobiliers, p&eacute;nalisant en premier lieu les cat&eacute;gories d&eacute;j&agrave; les plus touch&eacute;es par la crise.
<h3>Avec un r&ocirc;le dominant du dollar am&eacute;ricain dans le syst&egrave;me mon&eacute;taire international, la politique mon&eacute;taire de la Fed aura-t-elle toujours plus d&rsquo;importance que celle de la BCE ?&nbsp;</h3>
A l&rsquo;&eacute;chelle mondiale la politique mon&eacute;taire de la Fed a effectivement une importance plus grande du fait du r&ocirc;le du dollar. Cet effet est tr&egrave;s marqu&eacute; naturellement pour les pays qui ont tendance &agrave; se financer en dollars, en particulier parmi les pays &eacute;mergents. Et cet effet est d&rsquo;autant plus prononc&eacute; que les quantit&eacute;s de dollars inject&eacute;s sur les march&eacute;s par la Fed s&rsquo;&eacute;coulent sur l&rsquo;ensemble des march&eacute;s mondiaux. Ce r&eacute;gime de relance mon&eacute;taire quasi-permanente depuis la crise de 2008 a ainsi instaur&eacute; un r&eacute;gime dans lequel la Fed a encore accru les effets de sa politique mon&eacute;taire dans le monde. La politique de la BCE, m&ecirc;me avec ses rachats massifs actuellement au rythme de 80 milliards d&rsquo;euros par mois, n&rsquo;a pas des effets v&eacute;ritablement comparables en raison du r&ocirc;le international moins d&eacute;velopp&eacute; de l&rsquo;euro. Notons toutefois qu&rsquo;&agrave; cette &eacute;chelle moins grande, les injections massives de la BCE ont tout de m&ecirc;me des cons&eacute;quences tout &agrave; fait importantes au-del&agrave; de la zone euro et de l&rsquo;Europe o&ugrave; de nombreuses &eacute;conomies hors-zone euro ont largement recours &agrave; l&rsquo;euro pour le financement et les op&eacute;rations de leurs entreprises industrielles et financi&egrave;res.
<h3>Comment les actions de la politique mon&eacute;taire de la BCE pourraient-elles alors avoir un impact pr&eacute;pond&eacute;rant sur l&rsquo;&eacute;conomie europ&eacute;enne ?</h3>
Le principal d&eacute;fi auquel est confront&eacute; la BCE et de nature existentielle. Elle ne travaille pas en conjonction avec un Etat mais avec une multitude d&rsquo;Etats membres aux politiques fiscales tout &agrave; fait distinctes et aux orientations souvent divergentes. Les cons&eacute;quences de la pand&eacute;mie sur l&rsquo;Europe du sud et la France sont d&eacute;vastatrice car cette crise joue directement sur les failles de ces mod&egrave;les &eacute;conomiques en termes de comp&eacute;tences technologiques et d&rsquo;exclusion massive des jeunes. La BCE se retrouve enferm&eacute;e dans une politique de relance mon&eacute;taire qui n&rsquo;a qu&rsquo;un sens limit&eacute; du point de vue de ses effets &eacute;conomiques r&eacute;els. Pour maintenir un peu d&rsquo;inflation &agrave; la consommation, elle cr&eacute;e d&rsquo;invraisemblables bulles immobili&egrave;res et financi&egrave;res. La seule issue consisterait &agrave; mettre en &oelig;uvre de nouveaux moyens de politique mon&eacute;taire. En particulier, une monnaie num&eacute;rique publique, comme cela est discut&eacute; un peu partout dans le monde, permettrait de d&eacute;velopper des moyens de relance mon&eacute;taire bien plus directs, au moyen de programmes de financement ou m&ecirc;me de dotation op&eacute;r&eacute;s plus ou moins directement par la banque centrale, en partenariat avec les banques, mais &agrave; destination directe des acteurs &eacute;conomiques.

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Fed/ BCE : le match de l’impact des politiques monétaires sur l’économie européenne rémi bourgeot

Tremblez misérables mortels !

Faut-il avoir peur du grand retour de l’inflation annoncé à grands coups de clairons par tant d’esprits éclairés ? Don Diego de la Vega

<h3>Atlantico : Que peut-on tirer des rapports et des d&eacute;clarations de la BCE sur sa politique mon&eacute;taire qui &laquo; privil&eacute;gie l&rsquo;emploi &raquo; ou qui &laquo; tient compte des in&eacute;galit&eacute;s &raquo;, et de ses ambitions en mati&egrave;re de maitrise des &eacute;missions de carbone, &agrave; quelques mois des conclusions de sa &laquo; review &raquo; strat&eacute;gique ?</h3>
Don Diego de la Vega&nbsp;:&nbsp;Une &laquo;&nbsp;Review&nbsp;&raquo; entam&eacute;e en d&eacute;cembre 2019, rien ne presse, ce n&rsquo;est pas comme s&rsquo;il y avait une crise en zone euro&hellip; La FED, qui avait commenc&eacute; son travail de refonte m&eacute;thodologique au m&ecirc;me moment, a rendu l&rsquo;essentiel de sa copie fin ao&ucirc;t 2020, ce qui lui permet d&rsquo;&ecirc;tre plus accommodante et de passer plus au calme l&rsquo;ann&eacute;e compliqu&eacute;e qu&rsquo;est 2021&nbsp;; passons.
Globalement, ce que fait une Banque Centrale, c&rsquo;est agir &agrave; court terme (m&ecirc;me si cela peut avoir un impact sur le moyen terme)&nbsp;: elle ne va pas impacter directement des variables structurelles, r&eacute;elles&nbsp;; elle va choquer des variables nominales (les taux d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t, les taux de changes, etc.). Ce n&rsquo;est d&eacute;j&agrave; pas mal, beaucoup de choses dans une &eacute;conomie sont tr&egrave;s nominales, ou fonctionnent &agrave; l&rsquo;illusion nominale&nbsp;: &agrave; commencer par les salaires, le cr&eacute;dit, etc. Les variables r&eacute;elles ne sont touch&eacute;es qu&rsquo;&agrave; la marge par la politique mon&eacute;taire&nbsp;: le nombre d&rsquo;enfants par femme, la qualification de la main d&rsquo;&oelig;uvre ou le nombre de puits de p&eacute;trole dans des pays amis ne sont pas des sujets sur lesquels la FED et a fortiori la BCE ont une prise directe.
J&rsquo;ajoute qu&rsquo;en politique mon&eacute;taire vous &ecirc;tes plut&ocirc;t sur des variables domestiques. Indirectement vous affectez le monde, mais la plupart de vos canaux de transmission sont assez domestiques. A commencer par les banques commerciales, qui sont tr&egrave;s domestiques. Enfin la politique mon&eacute;taire est homog&egrave;ne, aveugle, elle ne fait pas trop de distinctions comme les budg&eacute;taires et fiscales. On ne peut pas trouver un taux d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t diff&eacute;rent selon les individus, quand vous en avez 400 millions. Ce caract&egrave;re aveugle n&rsquo;est pas un probl&egrave;me, c&rsquo;est un des attributs de la justice&nbsp;; aux autorit&eacute;s budg&eacute;taires de faire de la redistribution, elles adorent &ccedil;a.
R&eacute;sumons&nbsp;: la politique mon&eacute;taire est plut&ocirc;t courte, homog&egrave;ne, nominale et domestique.
Pr&eacute;tendre agir depuis Francfort sur des variables r&eacute;elles, de long terme et globales (par exemple, les questions climatiques), c&rsquo;est se moquer du monde en Dolby Surround. Vous pouvez me croire, je passe le plus gros de mon temps depuis 15 ans &agrave; combattre l&rsquo;id&eacute;e d&eacute;fendue &agrave; Francfort selon laquelle la politique mon&eacute;taire n&rsquo;est pas si importante que cela.
Dans le domaine o&ugrave; la BCE est attendue, parce que c&rsquo;est sa mission, parce que c&rsquo;est le Trait&eacute;, et parce que c&rsquo;est sa cible (d&eacute;finie par elle-m&ecirc;me&nbsp;!), elle n&rsquo;y arrive pas&nbsp;: je veux parler bien entendu d&rsquo;une inflation proche de 2% par an. Au d&eacute;part, cela &eacute;tait cens&eacute; &ecirc;tre sa seule raison d&rsquo;&ecirc;tre, sa &laquo;&nbsp;seule boussole&nbsp;&raquo; comme disait Jean-Claude Trichet. La BCE a m&ecirc;me longtemps critiqu&eacute; les institutions qui pr&eacute;tendaient pouvoir faire plusieurs choses &agrave; la fois, comme la FED avec son triple objectif depuis 1978 (la maximisation de l&rsquo;emploi, la minimisation de l&rsquo;inflation et la minimisation des taux d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t). En &laquo;&nbsp;off&nbsp;&raquo;, en interne, la BCE avait pris l&rsquo;habitude de dire, un peu &agrave; la mani&egrave;re des juifs ou des musulmans face aux chr&eacute;tiens&nbsp;: nous sommes les vrais monoth&eacute;istes&nbsp;; &agrave; travers la Trinit&eacute;, vous essayez de r&eacute;installer un syst&egrave;me polyth&eacute;iste. La BCE faisait cette critique vis-&agrave;-vis de la FED en alertant sur le fait qu&rsquo;il puisse y avoir &agrave; court terme une certaine contradiction entre les objectifs, et maintenant c&rsquo;est elle qui cherche &agrave; noyer le poisson, en plein dans ce que les sp&eacute;cialistes des organisations nomment un &laquo;&nbsp;syndrome du Pont de la rivi&egrave;re Kwa&iuml;&nbsp;&raquo;&nbsp;: un d&eacute;placement insidieux de la norme ou une perte de vue de l&rsquo;objectif final.
Que fait donc maintenant la BCE alors que depuis 12 ans elle &eacute;choue lamentablement, dans une forme de japonisation&nbsp;? Elle tente de se disculper, avec la bonne vieille technique de la diffraction du bl&acirc;me. Puisque je rate ma cible, et au fond ma mission, je vais me cr&eacute;er d&rsquo;autres objectifs. Un objectif interm&eacute;diaire sur le cr&eacute;dit, par exemple. En plus d&rsquo;un objectif implicite de sant&eacute; des banques, vu l&rsquo;OPA que la BCE a r&eacute;alis&eacute; sur la supervision bancaire il y a bient&ocirc;t une d&eacute;cennie. Et des sujets soci&eacute;taux, de plus en plus.
La BCE s&rsquo;occupe de la liquidit&eacute;, du maquillage des stress-tests, et de plus en plus du cr&eacute;dit. On l&rsquo;a vu faire pression sur des dividendes et des bonus de traders. Elle va bient&ocirc;t demander d&rsquo;investir dans tel ou tel domaine, de pr&ecirc;ter &agrave; telle ou telle contrepartie. Elle s&rsquo;occupe parait-il maintenant des moyens de paiement (l&rsquo;euro digital). Et le changement climatique, parce qu&rsquo;il le vaut bien. Techniquement, il est vrai que la BCE a particip&eacute; &agrave; la mod&eacute;ration climatique de la zone euro puisqu&rsquo;elle y a cr&eacute;&eacute; des millions de ch&ocirc;meurs par le sabotage syst&eacute;matique de l&rsquo;&eacute;conomie et de l&rsquo;industrie europ&eacute;enne depuis 15 ans&nbsp;; et les ch&ocirc;meurs, c&rsquo;est bien document&eacute;, &eacute;mettent moins de Co2. Mais peut-on imaginer qu&rsquo;elle fasse cela plusieurs d&eacute;cennies de suite&nbsp;?&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;
J&rsquo;attends la prochaine &eacute;tape, en 2022 peut-&ecirc;tre, un nouvel objectif contre les discriminations vis-&agrave;-vis des transsexuels, et en 2023 un panel sur le respect des b&eacute;b&eacute;s phoques.
L&rsquo;une des r&eacute;ponses possibles des shoguns de la BCE consisterait &agrave; dire&nbsp;: nous sommes une sorte de proto-Etat f&eacute;d&eacute;ral. Comme nous n&rsquo;arrivons pas &agrave; faire les Etats-Unis d&rsquo;Europe d&rsquo;un point de vue politique, nous le faisons &agrave; notre niveau, technocratique, il est donc normal que l&rsquo;on s&rsquo;empare d&rsquo;un certain nombre de th&egrave;mes. Probl&egrave;me n&deg;1&nbsp;: cela ressemble moins &agrave; un proto Etat f&eacute;d&eacute;ral qu&rsquo;&agrave; un proto Etat fasciste. Personne n&rsquo;est &eacute;lu dans ce syst&egrave;me. Et ils n&rsquo;ont de comptes &agrave; rendre &agrave; personne (&laquo;&nbsp;ind&eacute;pendance&nbsp;&raquo;). Probl&egrave;me n&deg;2&nbsp;: ils &eacute;chouent. Un track record affligeant. Ils n&rsquo;ont m&ecirc;me pas la l&eacute;gitimit&eacute; technocratique&nbsp;: je ne vois aucun vrai sp&eacute;cialiste de politique mon&eacute;taire au sein du Board de la BCE. M&ecirc;me dans le cadre de l&rsquo;inter-minable revue strat&eacute;gique, je n&rsquo;ai pas eu connaissance d&rsquo;une seule invitation &agrave; Francfort des cadors de politique mon&eacute;taire, ne serait-ce que pour une vague discussion de panel. Ni Lars Svensson, ni Scott Sumner, ni Christina Romer, ni Adam Posen, etc. Ce n&rsquo;est pas le gouvernement des meilleurs, qui nous consolerait un peu du caract&egrave;re satrapique de toute l&rsquo;entreprise. Probl&egrave;me n&deg;3&nbsp;: ils s&rsquo;emparent donc de sujets &eacute;minemment politiques, mais ce faisant ils se tirent une balle dans le pied&nbsp;; sur ces sujets, la BCE n&rsquo;a aucun moyen d&rsquo;action v&eacute;ritable du point de vue de l&rsquo;analyse &eacute;conomique, elle peut juste faire des ch&egrave;ques et pr&ecirc;ter sa r&eacute;putation. Elle va passer au dessus du radar m&eacute;diatique, ce qu&rsquo;elle &eacute;vite habituellement. Elle se dit qu&rsquo;il vaut mieux guider les choses plut&ocirc;t que de les subir un jour, vue la prolif&eacute;ration des activistes, mais le calcul est tr&egrave;s hasardeux, m&ecirc;me pour elle. Que l&rsquo;on m&rsquo;explique la logique qu&rsquo;il y a &agrave; refuser l&rsquo;effacement des dettes dans le bilan de la BCE et &agrave; faire en sorte que cette derni&egrave;re participe &agrave; toutes les bonnes causes qui passent&nbsp;?
<h3>La BCE tente-t-elle de rivaliser avec la FED en mati&egrave;re de plein emploi ? &nbsp;&nbsp;</h3>
De temps en temps, la BCE parle d&rsquo;emploi, un peu maladroitement. Elle refusait de s&rsquo;en occuper &agrave; l&rsquo;&eacute;poque de Trichet. Mais en zone euro nous connaissons des march&eacute;s du travail fragment&eacute;s ; et cela ne va pas changer de si t&ocirc;t. Rares sont les Allemands qui viennent travailler en France. S&rsquo;il y a bien quelque chose qui rel&egrave;ve des Etats, c&rsquo;est bien le march&eacute; du travail. Les r&eacute;glementations ne sont pas les m&ecirc;mes, il y a tr&egrave;s peu d&rsquo;harmonisation. La BCE pourrait avoir plus d&rsquo;impact avec un r&eacute;el march&eacute; du travail transeurop&eacute;en, mais ce ne sera pas au XXIe si&egrave;cle. Tout ce qu&rsquo;elle peut faire &agrave; ce stade consiste en une admonestation aupr&egrave;s des Etats pour qu&rsquo;ils fluidifient les march&eacute;s du travail. Mais ce n&rsquo;est pas une bande de gens non &eacute;lus qui est la mieux plac&eacute;e pour forcer &agrave; des r&eacute;formes structurelles. La r&eacute;forme est plus facile &agrave; dire qu&rsquo;&agrave; faire ; plus facile dans un symposium que lorsque l&rsquo;on doit g&eacute;rer quelques cons&eacute;quences sociales. J&rsquo;ajoute que la BCE n&rsquo;est pas vraiment en position de donner des le&ccedil;ons : son recrutement est tr&egrave;s consanguin, avec des gens qui restent longtemps aux affaires et qui sont recas&eacute;s &agrave; la BRI ou dans des banques m&ecirc;me en cas d&rsquo;&eacute;chec total. La flexibilit&eacute;, oui, mais pour les autres !
Aux USA c&rsquo;est assez diff&eacute;rent. Il y a un vrai march&eacute; du travail am&eacute;ricain, unifi&eacute;&nbsp;; une vaste bassine. L&rsquo;id&eacute;e que la Banque centrale doive rendre des comptes sur ce crit&egrave;re l&agrave; aussi est quelque chose d&rsquo;ancien et d&rsquo;admis. La FED comme annexe de la s&eacute;curit&eacute; sociale, en amont au moyen d&rsquo;une politique mon&eacute;taire contra-cyclique, en aval par le QE et divers efforts de policy-mix. On le voit bien depuis 15 mois, ce n&rsquo;est pas tr&egrave;s propre&nbsp;; mais c&rsquo;est assum&eacute;, et ils r&egrave;gleront leurs comptes entre eux.
<h3>Par quels ph&eacute;nom&egrave;nes justement est-il possible d&rsquo;expliquer l&rsquo;inefficience de la BCE &agrave; ce sujet ?</h3>
L&rsquo;inefficience de la BCE concerne tous les sujets. Il est justement possible de la d&eacute;douaner un peu sur la question de l&rsquo;emploi, face aux diff&eacute;rentes normes et cadres en vigueur dans chaque pays (m&ecirc;me si par sa politique d&rsquo;euro trop cher elle fait beaucoup de mal &agrave; l&rsquo;emploi, en particulier dans l&rsquo;industrie de moyenne gamme).
Mais la BCE doit &ecirc;tre attaqu&eacute;e sur d&rsquo;autres sujets, ses sujets. Elle est th&eacute;oriquement en charge de l&rsquo;ancrage des anticipations d&rsquo;inflation, tr&egrave;s approximatif apr&egrave;s une d&eacute;cennie perdue. A d&eacute;faut d&rsquo;une cible de croissance du PIB nominal qui ferait sens, elle pourrait dire que l&rsquo;on va faire du &laquo;&nbsp;price level targeting&nbsp;&raquo; sur une base temporaire&nbsp;; mais elle n&rsquo;en veut pas non plus. M&ecirc;me l&rsquo;Average Inflation Targeting de la FED lui semble bien trop os&eacute;. Sans d&eacute;cision sur l&rsquo;objectif, obtiendra-t-on au moins une discussion sur les instruments&nbsp;? La BCE pr&eacute;f&egrave;re dire&nbsp;: nein &agrave; toutes les initiatives (la monnaie h&eacute;licopt&egrave;re, les taux ultra n&eacute;gatifs, une remise des dettes dans son bilan). Sans rien de concret en politique mon&eacute;taire pour faire face aux futurs chocs d&eacute;flationnistes, peut-on au moins r&ecirc;ver &agrave; un renforcement de la transparence et de la responsabilit&eacute;&nbsp;de l&rsquo;institution mon&eacute;taire ? Pas du tout. Refus des transcripts (publi&eacute;s apr&egrave;s 5 ans aux USA, apr&egrave;s 50 ans en zone euro). Refus de communiquer sur les votes. Circulez. Jean-Claude Trichet &eacute;crivant r&eacute;cemment un article sur la question (dans &laquo;&nbsp;Commentaire&nbsp;&raquo;), c&rsquo;est un peu comme si le g&eacute;n&eacute;ralissime Gamelin venait nous faire un cours sur l&rsquo;interop&eacute;rabilit&eacute; et la r&eacute;activit&eacute; des arm&eacute;es. &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;
Il faut voir tout le reste comme des diversions. Par rapport &agrave; l&rsquo;importance de la politique mon&eacute;taire, la question de l&rsquo;euro digital est une anecdote. Epsilon &agrave; Lilliput.
<h3>Dans l&rsquo;article est &eacute;voqu&eacute; la question des minorit&eacute;s : ils tentent de faire un lien entre la politique mon&eacute;taire et l&rsquo;am&eacute;lioration des conditions de vie des minorit&eacute;s ? &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;</h3>
Il s&rsquo;agit l&agrave; encore d&rsquo;une influence catastrophique en provenance des Etats-Unis. C&rsquo;est vraiment dommage car il y a des choses qui fonctionnent tr&egrave;s bien outre-Atlantique et on ne les importe jamais. On r&eacute;cup&egrave;re par contre ce qu&rsquo;il y a de pire sur les campus am&eacute;ricains, souvent avec 25 ans de retard, en y m&ecirc;lant nos propres fantasmes, et on prend cela pour le summum de la modernit&eacute;. Les Am&eacute;ricains rencontrent beaucoup de difficult&eacute;s avec leur politique raciale, de quotas, de discrimination positive ; la facture est sans cesse croissante, pour des r&eacute;sultats qui ne sont pas fameux. Une fois que vous rentrez dans ce genre de sch&eacute;ma, vous n&rsquo;en sortez pas. Les minorit&eacute;s ont besoin d&rsquo;un march&eacute; du travail ouvert, pas d&rsquo;aides budg&eacute;taires ou mon&eacute;taires.
Thomas Piketty a indiqu&eacute; qu&rsquo;il fallait donner 30 milliards d&rsquo;euros &agrave; Ha&iuml;ti pour se faire pardonner de tout le mal qu&rsquo;on a fait &agrave; ce pays il y a plus de deux si&egrave;cles. Je ne sais pas s&rsquo;il pensait &agrave; un ch&egrave;que de la BCE, il pensait plus probablement &agrave; un ch&egrave;que de la France ou des europ&eacute;ens. Mais l&rsquo;id&eacute;e que la BCE va maintenant devoir faire des ch&egrave;ques pour un certain nombre de minorit&eacute;s organis&eacute;es ou pour un certain nombre de syndicats de victimes est une id&eacute;e qui progresse. Si vous fa&icirc;tes des panels sur tout, des discriminations homme-femme &agrave; la question des &eacute;missions de carbone en 2100, vous vous exposez &agrave; ce genre de chantage.
Les gens commencent &agrave; comprendre que ceux qui ont l&rsquo;argent sont les banquiers centraux. Eux qui dominent les march&eacute;s financiers, eux qui dominent les banques, eux qui peuvent mettre dans leurs bilans autant de trillions qu&rsquo;ils veulent. Les politiques n&rsquo;ont plus les poches suffisamment pleines, leur effet de levier rencontre des limites. Si la conscientisation progresse sur ce que peut faire la politique mon&eacute;taire, il faudra retrouver le sens de ce qu&rsquo;elle doit faire.
La BCE devrait se comporter de fa&ccedil;on digne : reconnaitre que la croissance nominale a &eacute;t&eacute; en dessous de tout depuis 13 ans, que l&rsquo;euro a &eacute;t&eacute; maintenu trop cher, que toutes les m&eacute;thodes d&rsquo;analyse et d&rsquo;intervention doivent &ecirc;tre revues de fond en comble. Au lieu de cela, avec une Banque centrale dans la cit&eacute;, une Banque centrale citoyenne, ou verte, ou num&eacute;rique, elle se place et elle nous place dans une situation d&eacute;licate, sans r&eacute;elles limites. Si vous commencez &agrave; placer des taux d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;ts selon les origines ethniques ou sociales, on appelle cela du cr&eacute;dit bonifi&eacute;, ou br&eacute;silien. Ces techniques ont partout fait la preuve de leur nocivit&eacute;. Quand la FED a voulu s&rsquo;amuser &agrave; faire ce genre de choses, cela ne s&rsquo;est pas tr&egrave;s bien pass&eacute;. Je pense notamment &agrave; sa complicit&eacute; dans les m&eacute;canismes de cr&eacute;dit hypoth&eacute;caire qui avaient permis &agrave; un certain nombre d&rsquo;Am&eacute;ricains qui n&rsquo;avaient pas les moyens de devenir propri&eacute;taires. C&rsquo;est aussi la porte ouverte &agrave; tous les conflits d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;ts. Et &agrave; Francfort, avec une BCE peupl&eacute;e d&rsquo;anciens ou de futurs banquiers commerciaux, il y en a d&eacute;j&agrave; un paquet, pas besoin d&rsquo;empiler des conflits d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t sur des conflits d&rsquo;objectifs.

Choix stratégique

L'analyse d'un économiste

<h3>Atlantico : Jerome Powell avait annonc&eacute; il y a quelques mois qu&rsquo;une l&eacute;g&egrave;re inflation accompagnerait la croissance. Il a depuis rassur&eacute; sur le fait qu&rsquo;elle ne serait que temporaire. En Europe, cette annonce a &eacute;t&eacute; accueillie avec f&eacute;brilit&eacute;, pourquoi l&rsquo;inflation am&eacute;ricaine inqui&egrave;te-t-elle de ce c&ocirc;t&eacute; de l&rsquo;Atlantique ?</h3>
S&eacute;bastien Laye : Nombre de membres de la technocratie europ&eacute;enne (et les politiques qui les &eacute;coutent) plus que les &eacute;conomistes europ&eacute;ens d'ailleurs, sont engonc&eacute;s dans le dogme de la Courbe de Philips: cet axiome d'inspiration keyn&eacute;sienne, devenu tr&egrave;s populaire dans les ann&eacute;es 1970, pr&eacute;sente un dilemme qui existerait entre l'inflation et la croissance/ch&ocirc;mage. En p&eacute;riode de r&eacute;cession, les banques centrales doivent stimuler l'&eacute;conomie, notamment par des baisses d'int&eacute;r&ecirc;t, afin de retrouver le chemin de la croissance: mais lorsque l'&eacute;conomie retrouve sa pleine croissance potentielle, d'&eacute;ventuelles surchauffes cr&eacute;ent une hausse g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;e des prix ou inflation. Les aspects n&eacute;gatifs de l'inflation requi&egrave;rent alors de la banque centrale une fin de la stimulation et m&ecirc;me une hausse des taux d'int&eacute;r&ecirc;t. Ce canevas a guid&eacute; toutes les politiques mon&eacute;taires jusqu'&agrave; la crise financi&egrave;re de 2008: et encore, dans les ann&eacute;es qui ont suivi, Bernanke a oscill&eacute; entre innovations mon&eacute;taires et rigoureux suivi de cette bo&icirc;te &agrave; outils. En r&eacute;alit&eacute;, depuis cinq ans au moins, avec Yellen puis Powell (cautionn&eacute;s par Trump et d&eacute;sormais Biden), les Am&eacute;ricains ont compl&egrave;tement revu cette articulation entre croissance et inflation. Non seulement les difficult&eacute;s de mesure de l'inflation font d&eacute;bat, mais c'est surtout sa disparition dans les statistiques il y a quelques ann&eacute;es sur fond de croissance d&eacute;cevante qui a suscit&eacute; cet aggiornamento. Je crois que le propos de Powell -m&ecirc;me s'il tente ainsi de rassurer les acteurs des march&eacute;s financiers- va beaucoup plus loin que de simplement dire que l'inflation est de retour mais transitoire avec l'effet rebond post Covid. Il accepte tr&egrave;s clairement un certain niveau d'inflation (la cible parait &ecirc;tre d'au moins 2% aux Etats-Unis) afin de renouer avec une croissance forte et durable. Les Etats-Unis n'ont plus peur de l'hydre inflationniste, les Europ&eacute;ens par le truchement de la Bundesbank et des ordolib&eacute;raux allemands s'en m&eacute;fient toujours. Les Allemands ne scrutent pas uniquement l'inflation am&eacute;ricaine, mais son impact en Europe si le nouveau cadre inflationniste devait atteindre le continent.
<h3>La France et l&rsquo;Europe ne connaissent pas ou presque pas d&rsquo;inflation depuis des ann&eacute;es, et ce constat serait vrai m&ecirc;me si elles souhaitaient y rem&eacute;dier selon certains &eacute;conomistes. Pourtant les dirigeants europ&eacute;ens continuent &agrave; vouloir maintenir une inflation basse. Quels sont les risques d&rsquo;une inflation trop basse comme peut le conna&icirc;tre la zone euro ?</h3>
On touche ici au c&oelig;ur du paradoxe: avoir peur de ce qui n'existe pas vraiment... Nous avons en Europe une inflation des actifs financiers et de la sp&eacute;culation st&eacute;rile sur &agrave; peu pr&egrave;s toutes les classes d'actifs: actions, immobilier, obligations. Cet effet richesse sur les produits financiers cr&eacute;e d'&eacute;normes disparit&eacute;s sociales qui menacent en particulier nos d&eacute;mocraties europ&eacute;ennes. Nous pouvons y mettre un terme ais&eacute;ment, en cessant de faire acheter des titres obligataires priv&eacute;s par la banque centrale et avec un cadre de r&eacute;gulation prudentielle -notamment sur les banques- plus s&eacute;rieux que l'actuel. En dehors de ce probl&egrave;me purement financier, l'absence d'inflation mesur&eacute;e en Europe atteste d'un tr&egrave;s faible niveau de croissance potentielle. Le risque qui p&egrave;se sur le continent depuis quinze ans est avant tout d&eacute;flationniste, et marqueur d'une croissance molle. La priorit&eacute; du continent devrait &ecirc;tre la croissance et la r&eacute;duction du ch&ocirc;mage, y compris au prix du retour d'une (faible) inflation : cette derni&egrave;re serait tol&eacute;rable, &agrave; condition comme je l'ai pr&eacute;cis&eacute; de lutter concomitamment contre les ph&eacute;nom&egrave;ne de bulle, notamment immobili&egrave;res r&eacute;sidentielles.&nbsp;
<h3>Quelle serait la situation optimale pour la relance europ&eacute;enne sur le plan de l&rsquo;inflation ? Quel est le bon &eacute;quilibre &agrave; trouver ?</h3>
Premi&egrave;rement, se poser clairement la question des march&eacute;s en situation de bulle. Deuxi&egrave;mement, revoir les trait&eacute;s mon&eacute;taires pour assigner comme objectif &agrave; la banque centrale une cible de croissance nominale du PIB d'au moins 2% par an. Enfin, pour atteindre ce niveau de croissance, se fixer une inflation pivot, qui serait le niveau acceptable d'inflation avec une croissance de 2-3%. Il faut accepter un couple croissance/inflation assez &eacute;lev&eacute; pendant la d&eacute;cennie afin de rattraper la croissance molle des quinze derni&egrave;res ann&eacute;es, plut&ocirc;t que d'augmenter les taux d'int&eacute;r&ecirc;ts &agrave; la moindre &eacute;ruption d'inflation. Rappelons aussi que cette inflation doit s'appr&eacute;cier sur plusieurs ann&eacute;es, car nous n'&eacute;chapperons jamais &agrave; des ph&eacute;nom&egrave;nes inflationnistes contingents&nbsp; et transitoires, comme lors des d&eacute;confinements (mais une inflation sur un ou deux trimestres ne signifie pas grand-chose)...

Inquiétudes

Quand la montée des prix aux Etats-Unis fait oublier aux Européens ce que leur coûte l’inflation trop basse chez eux Sébastien Laye

Ce 26 ao&ucirc;t &agrave; Jackson Hole, lieu de rencontre des financiers mondiaux sous la houlette de la Banque centrale am&eacute;ricaine (la Fed). Jay Powell, son patron, y jouera gros jeu. Il devrait annoncer que la Fed soutiendra moins le Tr&eacute;sor US, en achetant moins de ses bons, donc en r&eacute;duisant le Quantitative Easing. Mais il doit bien le faire, pour &eacute;viter un plongeon boursier et un ralentissement mondial, qui touchera notamment la zone euro. Mais pourquoi donc cette reprise am&eacute;ricaine est-elle si fragile&nbsp;?
Oui, un tantrum menace les march&eacute;s de la dette &agrave; long terme, avec les &Eacute;tats-Unis comme &eacute;picentre, si Jay Powell ne mesure pas ses mots, pour annoncer la normalisation, tr&egrave;s graduelle, de la politique mon&eacute;taire am&eacute;ricaine. Et pourtant, voil&agrave; des semaines que des responsables de la Fed en parlent &agrave; tour de r&ocirc;le, avec certes des nuances, pour pr&eacute;parer le terrain. Mais on ne sait jamais&hellip;
Un Tantrum&nbsp;? Une col&egrave;re. Oui, c&rsquo;est ce qui angoisse les march&eacute;s (et donc aussi Jay Powell)&nbsp;: une col&egrave;re, comme celle d&rsquo;un enfant, comme celle qu&rsquo;avait piqu&eacute;e les march&eacute;s financiers quand Ben Bernanke avait annonc&eacute; en mai 2013, pourtant tr&egrave;s prudemment, qu&rsquo;il envisageait de r&eacute;duire ses achats (tapering, r&eacute;duction, effilochage) dans les prochaines r&eacute;unions de la Fed. Il avait &agrave; l&rsquo;&eacute;poque de bonnes raisons pour agir ainsi&nbsp;: une am&eacute;lioration continue de l&rsquo;&eacute;conomie, apr&egrave;s la crise des subprimes qui avait fait craindre un 1929 en pire et un r&eacute;veil timide de l&rsquo;inflation. Tout cela lui donnait de la l&eacute;gitimit&eacute; et du temps, pour agir graduellement. Mais, &agrave; ce moment-l&agrave;, les march&eacute;s ne l&rsquo;entendent pas du tout de cette oreille&nbsp;: ils veulent que le quantitative easing continue&nbsp;! C&rsquo;est le taper tantrum&nbsp;: la col&egrave;re de la r&eacute;duction&nbsp;! Les taux longs montent brusquement, les bourses baissent, une onde de choc se r&eacute;pand et secoue le monde financier. Quelle surprise&nbsp;! Quelle le&ccedil;on&nbsp;!
Un Taper Tantrum puissance 10 ? C&rsquo;est bien le risque d&rsquo;explosion aujourd&rsquo;hui, avec la masse de bons du tr&eacute;sor que d&eacute;tient la Fed&nbsp;: pr&egrave;s de la moiti&eacute; du PIB am&eacute;ricain, contre 25% en 2013, quand Bernanke parlait&nbsp;! Et pourtant, le PIB est reparti &agrave; un niveau sup&eacute;rieur &agrave; celui d&rsquo;avant le COVID-19, et pourtant le taux de ch&ocirc;mage est plus faible qu&rsquo;alors, &agrave; 5,4% aujourd&rsquo;hui contre 7,5%, mais le taux d&rsquo;inflation sous-jacente (hors nourriture et &eacute;nergie, volatiles) est bien plus fort, &agrave; 3,7% contre 1,4% &agrave; l&rsquo;&eacute;poque. Donc il faut agir.
Et le plafond de la dette publique am&eacute;ricaine autoris&eacute;e est d&eacute;pass&eacute;, comme en 2013&nbsp;! C&rsquo;est plus dangereux aujourd&rsquo;hui quand elle atteint plus de 128% du PIB am&eacute;ricain, contre 101% en 2013, puis la bourse a profit&eacute; de ces taux bas pour doubler ! A l&rsquo;&eacute;poque d&eacute;j&agrave; le Congr&egrave;s ne voulait pas monter le plafond de la dette et mena&ccedil;ait les &Eacute;tats-Unis de d&eacute;faut. En 2013, la Fed avait pris la menace au s&eacute;rieux et fait une r&eacute;union sp&eacute;ciale &laquo;&nbsp;au cas o&ugrave;&nbsp;&raquo;. Depuis, nous vivons sous la menace du d&eacute;faut am&eacute;ricain. Surtout, la situation est plus dangereuse aujourd&rsquo;hui o&ugrave; l&rsquo;opposition politique entre R&eacute;publicains et D&eacute;mocrates est bien plus violente et &eacute;chappe &agrave; des craintes financi&egrave;res et &eacute;conomiques en cas de d&eacute;faut, sachant que la bourse est sur un nuage.
On nous dira que la dette am&eacute;ricaine qui monte se place sans probl&egrave;me &agrave; 1,3%, au tiers de l&rsquo;inflation&nbsp;! La dette et l&rsquo;inflation font baisser les taux&nbsp;: rien de mieux que la dette am&eacute;ricaine&nbsp;! Le Variant Delta, &eacute;manation du COVID-19, explique cet incroyable r&ecirc;ve o&ugrave; se trouve la finance am&eacute;ricaine&nbsp;: la mont&eacute;e de l&rsquo;inflation am&eacute;ricaine ne fait pas monter les taux d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t, avec l&rsquo;id&eacute;e que la pand&eacute;mie pourrait s&rsquo;aggraver&nbsp;et qu&rsquo;il n&rsquo;y a pas de meilleur placement sans risque. L&rsquo;inflation est alors vue comme &laquo;&nbsp;transitoire&nbsp;&raquo;, dans une &eacute;conomie qui ne peut que mieux remonter, car elle peut le plus s&rsquo;endetter.
Mais comment les march&eacute;s vont-ils r&eacute;agir, en pleine crise afghane, qui est un &eacute;chec analytique sans &eacute;gal (sans parler de ses aspects humains), quand Jay Powell dira qu&rsquo;il envisage d&rsquo;acheter chaque mois moins de 120 milliards de dollars&nbsp;? Ceci au moment m&ecirc;me o&ugrave; un programme de plus d&rsquo;1 trillion de dollars de d&eacute;penses a &eacute;t&eacute; vot&eacute;, plus un autre de 3 trillions se pr&eacute;pare&nbsp;: s&rsquo;endetter plus, moins cher parce qu&rsquo;on est jug&eacute; plus s&ucirc;r n&rsquo;a de sens que si on l&rsquo;est, s&ucirc;r de son jugement notamment.
Dans ce contexte de mont&eacute;e des risques globaux, la Banque Centrale Europ&eacute;enne n&rsquo;a aucun choix que de s&rsquo;endetter plus et doit l&rsquo;expliquer, pour renforcer la croissance et faire de la zone euro une zone s&ucirc;re, tout &eacute;tant relatif bien s&ucirc;r. Il n&rsquo;est pas certain qu&rsquo;elle convaincra rapidement de ces nouvelles r&eacute;alit&eacute;s g&eacute;opolitiques, dans une Europe plus endett&eacute;e qui ne se renforce pas assez. Plus t&ocirc;t et plus forts seront ses messages, mieux ce sera. Les march&eacute;s chercheront peut &ecirc;tre alors un peu plus analytique et constant dans la d&eacute;marche&nbsp;: ici&nbsp;?

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