La démocratie taïwanaise se cherche désespérément des alliés ailleurs dans le monde <!-- --> | Atlantico.fr
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La présidente de Taïwan, Tsai Ing-wen, lors d'une cérémonie officielle.
La présidente de Taïwan, Tsai Ing-wen, lors d'une cérémonie officielle.
©SAM YEH / AFP

Géopolitique

Face à la menace de la Chine, Taïwan peine à trouver de véritables soutiens sur le plan diplomatique.

Emmanuel Lincot

Emmanuel Lincot

Professeur à l'Institut Catholique de Paris, sinologue, Emmanuel Lincot est Chercheur-associé à l'Iris. Son dernier ouvrage « Le Très Grand Jeu : l’Asie centrale face à Pékin » est publié aux éditions du Cerf.

 

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Atlantico : Quels sont les alliés de Taïwan à ce jour ?

Emmanuel Lincot : La seule relation qui vaille est celle qui par le Taiwan Relations Act en vigueur depuis 1979 lie Taïwan aux États-Unis; lesquels lui assurent sa protection militaire. Le Japon a assuré qu’en cas d’agression chinoise contre l’île, il interviendrait à son tour mais cela ne signifie pas qu’il existe une alliance à proprement parler. Les alliances comme celle qui unit les pays membres de l’OTAN sont rares. Elles sont synonymes d’obligation et de réciprocité. De ce point de vue Taïwan bénéficie d’appuis mais pas d’alliances. La préoccupation pour Washington est de veiller à ce que la liberté de navigation dans l’inter-détroit soit respectée. Cette vigilance que partagent la France et l’Union Européenne est en quelque sorte une assurance vie pour l’île qui s’apprête à connaître des élections présidentielles l’année prochaine. 

PourquoiTaïwan peine à trouver des alliés, alors même que ce pays est reconnu par la plupart des États membres de l’ONU ?

Emmanuel Lincot : Non Taïwan n’est pas reconnu en tant que pays. Une petite dizaine d’Etats reconnaissent non pas la souveraineté de l’île mais la République de Chine qui en 1949, du fait de la guerre civile et de la victoire des communistes sur le continent, s’est réfugiée sur l’île. Ceci explique que pour les dirigeants de Pékin, Taïwan est une province renégate et que tout ce qui a trait à Taïwan relève d’une affaire de politique intérieure. D’un point de vue légal, tous les pays occidentaux reconnaissent le principe d’une seule Chine c’est à dire la République populaire de Chine et non la République de Chine (Taïwan) même si, en revanche, et d’un point de vue de la légitimité grandissante que semble représenter Taïwan à leurs yeux, les pays occidentaux se rapprochent de l’île sans pour autant vouloir en reconnaître la souveraineté. Et pour cause, si Taïwan voulait à terme se voir reconnaître comme tel, il faudrait que ses propres dirigeants le veuillent. Et cela serait une décision évidemment dangereuse, un véritable casus belli pour Pékin. Donc pas de souveraineté, pas d’alliance et le sens à la fois du compromis et d’un statu quo qui à tout moment peut être remis en cause par les principaux intéressés: Chine et Taïwan. 

Le fait que la Chine soit au cœur du système économique mondial n’est-il pas le principal problème pour Taïwan ? (Les pays peuvent être récalcitrants à soutenir Taïwan pour ne pas remettre en causes leurs relations avec la Chine…)

Emmanuel Lincot : Non c’est même un problème secondaire. La preuve : tout le monde est d’accord pour commercer avec les deux Chine et l’économie n’a jamais été un facteur d’apaisement politique. Les deux Chine sont économiquement complémentaires mais rivales sur le plan politique. On pense qu’elles le sont depuis 1949, ce qui est juste depuis la guerre froide sur le plan stratégique, mais ce n’est en fait que depuis les années 90 qu’elles sont fondamentalement et politiquement opposées. Avant son processus de démocratisation, l’île était soumise au régime du Guomindang souscrivant à la même matrice dictatoriale et originelle que son rival, le Parti Communiste Chinois. En réalité se joue sur chacune des rives une part existentielle de la Chine ou de Taïwan dans ses intentions dictatoriales ou ses valeurs démocratiques. C’est cela le problème fondamental qui oppose les deux rives. 

En cas de conflit avec la Chine, Taïwan sera-t-elle défendue par les Américains ?

Emmanuel Lincot : Si Washington respecte le Taiwan Relations Act, l’île sera défendue. Parce que les États-Unis savent aussi que leur avenir se joue dans la région. Maintenant, les États-Unis vont entrer dans une période électorale incertaine à leur tour et vous connaissez le mot de De Gaulle: « Les traités sont comme les roses. Elles ne durent qu’un matin ».

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