L’islamisme, une menace civilisationnelle pour l’Europe ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Jean-Bernard Pinatel publie "L'esprit guerrier 62 ans en 100 histoires et 9 vies au service de la France et de ses entreprises" aux éditions Balland.
Jean-Bernard Pinatel publie "L'esprit guerrier 62 ans en 100 histoires et 9 vies au service de la France et de ses entreprises" aux éditions Balland.
©CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Bonnes feuilles

Jean-Bernard Pinatel publie "L'esprit guerrier 62 ans en 100 histoires et 9 vies au service de la France et de ses entreprises" aux éditions Balland. A travers ses mémoire, le Général Pinatel retrace plusieurs décisions politiques qui font partie de l'histoire de la France et de son environnement stratégique. Extrait 2/2.

Jean-Bernard Pinatel

Jean-Bernard Pinatel

Général (2S) et dirigeant d'entreprise, Jean-Bernard Pinatel est un expert reconnu des questions géopolitiques et d'intelligence économique.

Il est l'auteur de Carnet de Guerres et de crises, paru aux éditions Lavauzelle en 2014. En mai 2017, il a publié le livre Histoire de l'Islam radical et de ceux qui s'en servent, (éditions Lavauzelle). 

Il anime aussi le blog : www.geopolitique-géostratégie.fr

Voir la bio »

J’ai écrit durant les deux ans à l’école de guerre mon premier livre La Guerre civile mondiale. Après avoir participé à plusieurs tirs nucléaires dans le Pacifique, j’étais convaincu que la guerre sous menace nucléaire n’aurait plus jamais lieu car même les dirigeants les plus fous ou les plus labiles trouveraient d’autres voies pour imposer leur volonté de puissance. Je percevais – et les Palestiniens avaient ouvert la voie dès 1973 – que nous nous dirigions vers une guerre civile mondiale Nord-Sud dans laquelle les nations les plus développées seraient confrontées aux pays en voie de développement qui contesteraient leur suprématie en recourant au terrorisme. C’est que le premier stade de la guerre révolutionnaire théorisé par Mao. J’ai perçu à l’instar d’Emmanuel Todd, avec quinze ans d’avance, les signes de désagrégation du camp soviétique. Je n’ai jamais cru que l’ouverture des frontières au commerce international permettrait d’imposer un modèle économique et politique unique et un citoyen-consommateur, « unidimensionnel » au monde entier. C’est ce que des entrepreneurs géniaux, à qui nous devons l’accélération du progrès technologique, n’ont absolument pas compris par manque de culture générale.

Il m’a fallu en revanche attendre le 11 septembre 2001 pour percevoir la profondeur de la prophétie d’André Malraux «  Le XXIe   siècle sera religieux ou ne sera pas  ». C’est dans les années 2000, en Irak, que j’ai rencontré l’horreur dont les tenants de cette déviance politique de l’islam étaient capables, à la fois pour fanatiser leurs combattants, les transformer en bombes humaines et installer la sidération et l’horreur au cœur des villes.

Pourtant ma première expérience de l’islam date de la guerre d’Algérie lorsque j’ai commandé une section de tirailleurs algériens. Plus tard aussi, lors des soirées où je brisais le jeûne du Ramadan après des journées de travail avec mes amis marocains, lors de mes voyages en Algérie et Tunisie, dans la bande sahélienne, lors de mes séjours en Syrie, en Irak et en Iran, j’avais perçu la diversité des pratiques mais je n’avais aucune connaissance du contenu théologique de cette religion. Je l’ai étudié en 2005 pour répondre aux besoins de développement mondial de L’Oréal. Mais c’est en constatant sur place le malheur du peuple irakien et en même temps sa capacité de résilience que j’ai compris que l’on ne peut pas imposer la démocratie telle que nous la concevons, encore moins par la guerre, à des peuples qui n’y sont pas préparés par les milliers d’années d’histoire.

Les désastreux résultats des Américains en Afghanistan et en Irak, et dans une moindre mesure, la France, en Libye et en Syrie sont là pour nous le rappeler. Ne pas le comprendre, et continuer de s’y essayer sous des prétextes fallacieux ou humanitaires est criminel; c’est ajouter la guerre à la guerre civile que ces peuples musulmans subissent du fait de l’islamisme et engendrer une résistance sans fin, le chaos et s’exposer à un retour de boomerang.

C’est d’autant plus vrai que lorsque les États-Unis font la guerre – et heureusement la tradition française est autre – ils ne se soucient que de la vie de leurs soldats et en aucune façon des dégâts collatéraux qu’ils occasionnent dans la population civile et de la haine qu’ainsi ils engendrent.

J’ai voulu décrire dans Carnets de crise et de guerre cette façon de conduire les opérations qui me choque profondément.

Sur ce point, les États-Unis ont développé un savoir-faire pour en dissimuler l’horreur aux citoyens du monde en imprimant grâce à Hollywood une légende qui n’a rien à voir avec la réalité. Des films comme Le  jour le plus long, Il faut sauver le soldat Ryan ne parlent jamais des pertes et des dégâts subis par les civils français et leurs biens. Pourtant du 13 juin 1940 à Dunkerque au 15 avril 1945 à Royan, les bombardiers alliés ont déversé 518000  tonnes de bombes sur la  France pour détruire le dispositif militaire allemand causant cinquante-sept mille morts, soixante-quatorze mille blessés et la destruction de trois cent mille logements.

L’histoire de la guerre du Vietnam est également emblématique. La mort d’au moins deux millions de civils non combattants vietnamiens et les effets à long terme des herbicides et notamment de l’agent orange, disséminés sur la forêt vietnamienne, ne sont pas encore pleinement connus et reconnus par la majorité des responsables et du peuple américain.

De même, un rapport de cent une pages, Body Count, établi en coopération internationale par des médecins légistes américains, canadiens et allemands, évalue de 1,2 à 2 millions de civils tués du fait de l’intervention américaine en Afghanistan, Pakistan et Irak entre 2003 et 2011. Ce massacre a certes entraîné quelques débats mais ils sont restés confinés à Washington, New York et San Francisco. Le général Stanley Cristal en 2009, lors de son premier discours en tant que commandant en chef de la Force Internationale d’assistance et de sécurité (ISAF) sur le théâtre d’opérations AFPA (Afghanistan Pakistan), a eu le courage d’en faire le constat : « I believe the perception caused by civilan casualties is one of the most dangerous enemies we face. »

Les islamistes qui tentent de s’imposer par la terreur à la tête de ces pays ont un objectif encore plus condamnable : mettre en place une nouvelle civilisation dans laquelle l’homme n’a aucune liberté sinon de suivre à la lettre ce qui est censé être la volonté divine transcrite dans le Coran.

Face à cette menace, la France est le seul pays à afficher clairement la séparation du temporel et du spirituel par son principe de laïcité, l’exact contraire de l’islam. Cet élément de force, fait d’elle le verrou à faire sauter en Europe dont la soumission est une condition nécessaire pour les islamistes qui veulent établir le règne de l’islam dans le monde. Cet objectif serait facilité dès lors que les islamistes pourraient disposer de la puissance nucléaire de la France et donc de la terreur que sa menace d’emploi générerait. Ce même risque nous le courrons déjà avec le Pakistan même si son alliance stratégique avec la Chine le rend désormais moins probable. La France doit donc se défendre pour elle-même et pour l’ensemble du monde non musulman afin de garder cette spécificité, qui sans nuire à la liberté de penser et de croire, permet de nous protéger des extrémismes religieux.

La pente à remonter en France et en Europe sera longue car la corruption des esprits est profondément ancrée notamment dans les deux grandes fonctions, judiciaire et médiatique dont le rôle devrait se limiter en démocratie à dénoncer ou à sanctionner tout dérapage de la loi car seuls les pouvoirs législatif et exécutif disposent de la légitimité à voter les lois et à les faire appliquer car ils procèdent du suffrage universel. En effet, je suis de ceux qui pensent que l’autorité judiciaire et les médias, qui n’ont aucune légitimité démocratique à vouloir faire la Loi, s’arrogent « de facto » ce pouvoir dans nos sociétés démocratiques en contournant ses règles comme le secret de l’instruction et la présomption d’innocence. Et ces nouveaux maîtres à penser, qui décident ce qui est bien ou mal, limitent voire bloquent toutes les décisions et les actions des pouvoirs législatif et exécutif nécessaires au redressement de la situation.

C’est ce combat idéologique que nous avons à mener et que nous gagnerons car nos adversaires et leurs compagnons de route font heureusement des erreurs. Celles-ci permettent à nos concitoyens de prendre conscience de la menace qui pèse sur notre civilisation européenne à cause, en premier lieu, de ses errements politiques et stratégiques.

Extrait du livre de Jean-Bernard Pinatel, "L'esprit guerrier: 62 ans en 100 histoires et 9 vies au service de la France et de ses entreprises", publié aux éditions Balland

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