L’Etat doit-il sauver Air France, Renault, la SNCF ? Si oui, comment et pourquoi ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Air France est en grande difficulté financière du fait de l'épidémie de Covid-19.
Air France est en grande difficulté financière du fait de l'épidémie de Covid-19.
©Joël SAGET / AFP

Atlantico Business

La question va se poser très vite. Comment va-t-on sauver de la faillite des entreprises emblématiques terrassées par les effets de la crise pandémique ? Faudra-t-il les nationaliser ou laisser le marché faire les arbitrages et sauver ce qui est sauvable ? Qui va payer : le contribuable, les épargnants ou les actionnaires ?

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Les résultats d’entreprise de l’exercice 2020 permettent de dresser un premier bilan de la pandémie et illustrent jusqu'à la caricature la prophétie de Warren Buffet : « quand la mer se retire à marée basse, on retrouve sur la grève tous ceux qui se baignaient nus et surtout ceux qui ne savaient pas nager ».

Beaucoup d ‘entreprises françaises ont fait preuve d’une résilience extraordinaire et se sont adaptées très rapidement au changement, en profitant des aides de l’Etat certes, mais surtout en faisant preuve d’une agilité exceptionnelle. Toutes les entreprises du digital ont essayé de répondre à la demande qui s’est déclenchée pendant le premier confinement et ont réussi, pour la plupart, à faire face et à continuer toutes les activités. Le e-commerce a pris une dimension qu’on ne soupçonnait pas et a donné à des segments entiers de la production des alternatives à la distribution traditionnelle. La clientèle a adopté, sans doute durablement, des formes de services qui se développaient mais très lentement : e-commerce, proximité, click and collect, livraison à domicile... Des nouveaux métiers sont apparus.

Parmi les grandes entreprises, on assiste au même clivage entre celles qui ont limité les dégâts en accélérant leur mutation (télétravail, digitalisation, recentrage sur leur métier de base ou au contraire diversification opportune), et celles qui étaient en risque avant la pandémie et dont la crise a profondément hypothéqué les chances de survie.

Les entreprises les plus abîmées appartiennent au secteur du transport qui a terminé l’année en très grande difficulté. Dans l’aérien, le chiffre d’affaires d’Air France a chuté de 60 %, autant à la SNCF, ADP – les aéroports de Paris ont perdu 60 % de leur clientèle sur Roissy et sur Orly. L’hôtellerie et les clubs de vacances, dont l’activité dépend directement de la mobilité, ont perdu une année de chiffre d’affaire.

Les autres secteurs ont limité les dégâts et s’en sont sortis avec les aides de l’Etat et leur agilité à s’adapter ou se diversifier, en profitant aussi de leurs filiales étrangères. C’est le cas pour la banque, l’agroalimentaire, le bâtiment, la grande distribution, les champions du luxe comme LVMH, Chanel, Kering, Hermès.

Les plus grosses difficultés sont concentrées dans quelques très grandes entreprises françaises emblématiques... Renault sort de l’année 2020 avec plus de 8 milliards de pertes, Air France avec 7 milliards, SNCF 5 milliards de pertes.

Toute la question va être de savoir comment ces entreprises vont s’en sortir et qui va payer. La question est très légitime, parce que ces résultats ont été creusés par le virus mais le mal les rongeait bien avant.

En gros, l’Etat est face à deux hypothèses. La première serait de laisser faire le marché en espérant que les actionnaires remettent au pot ou organisent la cessation d’activité avec d’éventuels repreneurs. Cette hypothèse est inenvisageable parce que financièrement, l’Etat est déjà très engagé dans ces entreprises et que par ailleurs, elles sont considérées comme stratégiques.

La deuxième hypothèse va donc passer par une nationalisation totale ou des aides de l’Etat. La nationalisation pure et simple ne paraît avoir aucun effet, sauf à accroitre le poids de l’administration qui est déjà trop lourd. On passera donc par des perfusions. Chez Air France, l’Etat a déjà autorisé un PGE de 4 milliards d’euros et étudie plus de 3 milliards de prêts directs. Ça ne suffira pas. Chez Renault, il va falloir couvrir les 8 milliards de pertes. Dans les deux cas, ça reviendra à transformer les prêts en actions et donc à augmenter la participation de l’Etat français. A la SNCF, il n’y aura pas débat, l’Etat apportera pour 4 milliards d’aide. Sous quelles formes et à quelles conditions ? Personne ne le sait. L’objectif est de sauver ces immenses organisations du naufrage.

Dans l’immédiat, la question du financement ne pose pas de problèmes particuliers. L’Etat français peut encore emprunter, compte tenu des taux et de l’enjeu social et politique.

A plus long terme, cette affaire n’empêchera pas une réflexion nationale sur ce qui est stratégique et ce qui ne l’est pas.

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