L’embellie économique se confirme : merci qui ?

Atlantico : Quel est, selon vous, les facteurs principaux liés à cette embellie économique ? 

Xavier Timbeau : En premier lieu, et c'est vrai dans tous les pays européens comme dans d'autres pays développés, je dirai que le mouvement de consolidation budgétaire, avec l'augmentation des impôts et la baisse des dépenses, connaît une grande pause. Cette pause se produit de façon synchronisée entre tous les pays, et c'est un élément essentiel à cette embellie, qui soutient l'activité.

Le deuxième facteur est lié à la politique monétaire.L'Europe bénéficie d'une politique monétaire accommodante, avec l'aide de la BCE. Elle est également accommodante en Europe, au moment ou cette dernière se durcit aux Etats-Unis. Ce phénomène crée un espèce de gros appel d'air, avec des taux d'intérêt très bas et un taux de change euro dollars qui se porte à l'avante de l'Europe, et qui booste nos exportations. Ce facteur bénéficie à toute la zone, et en particulier à la France. 

Je dirais que le troisième facteur serait le prix du pétrole. Le prix de l'énergie fossile a continuellement baissé en début d'année. Il s'est stabilisé à un niveau relativement bas, aux alentours de 60 dollars le baril. C'est une baisse très notable par rapport à l'année dernière, et cela constitue un stimulus pour l'économie mondiale, pas simplement européenne, en tout cas pour les pays consommateur de pétrole. Pour les pays producteurs, c'est une autre histoire. Cette baisse du prix du pétrole accompagne une baisse des tensions géopolitiques, avec l'Iran ou la Russie, qui voient ce moyen d'action diminuer. 

Enfin, un quatrième facteur est plutôt national, avec les politiques menées par l'éxécutif et la baisse de coût du travail en France, les politiques de l'offre, avec principalement le CICE et le Pacte de responsabilité (avec d'autres mesures comme la Loi Macron, etc) contribue à cette embellie, en améliorant les marges de l'entreprise, attirant les investisseurs et favorisant les investissements.

La crise de la zone euro, comme le crise grecque, représentent-elles des freins à cette embellie ? Observe t-on cette embellie à l'internationale ? Cette conjoncture internationale a t-elle impacté l'économie française ? 

La crise de la zone euro, avec son avatar actuel qui est la question grecque, pourrait renverser la situation. Nous vivons un très grand suspens actuellement. Si la zone euro connaît un scénario catastrophe comme un "Grexit", ou un défaut de paiement de la Grèce, l'avantage d'être dans la zone euro se transformera en un désavantage inédit. La question grecque, avec un point d'incertitude qui avait atteint son apogée, se radoucit : on observe cette semaine une possibilité de sortie de crise. 

La conjoncture internationale se traduit davantage par des Etats-Unis qui, malgré une croissance assez bien ancrée, subi des trous d'air régulier, et subi la hausse du dollar. Les pays émergents sont également à la peine. Ce qui profite pleinement à la France, et c'est paradoxal au vu de l'actualité, c'est qu'elle se trouve dans la zone euro. Cela se traduit par une politique monétaire extrémement extensive, une baisse du taux d'intérêt et une baisse du taux de change de l'euro par rapport au dollar, dans une zone intégrée, ce qui provoque des effets d'entrainement de la part des partenaires de la France. 

Cette embellie sera t-elle durable ? Peut-on espérer un impact sur l'emploi, avec une baisse du chômage ?

Un certain nombre de facteur va rester, et je pense que l'embellie sera durable. La pause dans les consolidations budgétaires va perdurer, la politique monétaire entre zone euro et dollar va également se poursuivre, etc. On est moins sûr pour la poursuite de la baisse du prix du pétrole. Mais plusieurs éléments s'installent, et au moins pour deux ans. A l'horizon de la fin de l'année 2016, la politique monétaire cessera son expansion. L'euro pourra remonter très vigoureusement, comme les taux d'intérêt. Mais nous n'en sommes pas encore là. Il y a un contexte très favorable pour les deux prochaines années. 

Je pense que ces facteurs seront suffisants pour faire baisser le chômage. Pour une reprise très durable, il est difficile de la prévoir. Pour l'élection présidentielle, la baisse du chômage risque de se produire avant 2017. Cette baisse du chômage sera t-elle assez forte et rapide pour que François Hollande puisse capitaliser dessus ? Pour conclure, si je dois répondre à la question "merci qui ?" pour cette embellie, je dirais que notre présence dans la zone euro est fondamentale.