L’effondrement démographique européen se poursuit et ce qu’on croyait efficace pour relancer la natalité n’y change plus rien<!-- --> | Atlantico.fr
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Des jumeaux et des triplés sont assis dans leur poussette à leur arrivée pour le Festival des jumeaux pour enfants, à Kiev, le 11 août 2018.
Des jumeaux et des triplés sont assis dans leur poussette à leur arrivée pour le Festival des jumeaux pour enfants, à Kiev, le 11 août 2018.
©SERGEI SUPINSKY / AFP

Solutions à la crise ?

La France a enregistré en mars 2023 son nombre de naissances le plus faible depuis 1994. Les Indices de Fécondité Totale (IFT) de tous les pays nordiques indiquent également une nette baisse.

Atlantico : Les Indices de Fécondité Totale (IFT) de tous les pays nordiques sont maintenant disponibles et indiquent une nette baisse. Il y a également eu une baisse en Islande après une légère augmentation en 2021. En Finlande, l'IFT a baissé de 29 % depuis 2010, ce qui représente la plus forte baisse parmi tous les pays de l'UE et de l'AELE. Dans quelle mesure assistons-nous à un effondrement démographique en Europe ? Est-ce généralisé ?

Laurent Chalard : Il faut comprendre que depuis la fin des Trente Glorieuses, la quasi-totalité des pays d'Europe occidentale a vu sa fécondité passer en dessous du seuil de remplacement des générations, c'est-à-dire 2,1 enfants par femme. Suite à l'effondrement du communisme au début des années 1990, les pays d'Europe orientale se sont également ajoutés à cette situation. Nous avons donc une démographie structurellement déclinante, due à un déficit de naissances et une faible fécondité. Ainsi, au bout de 50 ans, les volumes de naissances sont sensiblement moins importants que lors de leur pic historique. L'Europe a été précurseur dans le monde en ce qui concerne la baisse de la natalité, cette situation étant plus récente ailleurs, comme en Asie orientale. L'Europe est donc le laboratoire mondial du déclin de la natalité. Il s'agit d'une tendance générale, même si certains pays s'en sortent un peu mieux, comme la France, où nous ne sommes jamais descendus en dessous de 1,65 enfant par femme.

Dans quelle mesure les résultats des pays nordiques montrent-ils que les régimes sociétaux de genre sont le principal facteur explicatif des différences transnationales en matière de fécondité ?

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Ce qui semble être le principal facteur explicatif des différences de taux de fécondité entre les pays européens, ce sont les politiques familiales. Encore une fois, la France est le pays avec le taux de fécondité le plus élevé grâce à ces dernières. Dans les pays où il n'y a pas de politique nataliste, le taux de fécondité est beaucoup plus faible. C'est le principal facteur explicatif, du moins celui qui est clairement identifié, pour expliquer les différences de fécondité entre les différents pays européens. 

La parité hommes-femmes, l'État-providence et les services publics de garde d'enfants ne sont donc pas la solution à la crise de la fécondité ?

Il ne faut pas dire que cela ne fonctionne pas, car cela peut augmenter l'indice de fécondité, mais ces éléments ne sont pas suffisamment importants pour revenir au seuil de remplacement des générations. S'il n'y a pas de désir d'enfant, peu importe les politiques de stimulation de la natalité mises en place, le taux de fécondité restera bas. Ce désir n'est pas lié à une question de genre, mais à une question d'épanouissement personnel. 

La France a enregistré en mars 2023 son nombre de naissances le plus faible depuis 1994, en dehors des périodes de confinement. Comment expliquer cela ?

Le premier facteur explicatif est très simple. L'âge moyen de la maternité tourne autour de 30 ans. À l'heure actuelle, les femmes qui sont dans leur pic de natalité correspondent à des générations creuses, à des années où les naissances étaient plus faibles, comme en 1993/1994. Il peut donc y avoir un effet de structure par âge temporaire qui entraîne une baisse importante de la fécondité au cours des derniers mois. Il faut désormais attendre de voir ce qui se passera dans les prochaines années. Comme on sait que le nombre de femmes en âge d'avoir des enfants devrait remonter ensuite, consécutivement à la hausse de la natalité dans les années 2000, la baisse devrait en théorie se stabiliser. Si, au contraire, la natalité continuait de baisser au même rythme, nous assisterions à une évolution structurelle majeure, qui correspondrait à un alignement de la fécondité française sur la moyenne européenne. 

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Si les solutions traditionnellement envisagées ne fonctionnent pas, que pouvons-nous faire pour relever la natalité ?

C'est très compliqué. Il n'y a pas de solution miracle, il faut plutôt s'interroger sur le fait que les sociétés riches n'arrivent pas à se reproduire à long terme et se demander comment changer cela. Redonner l'envie de faire des enfants demande un véritable travail sociologique. Manifestement, nous sommes dans une société, au sein des pays développés, qui n'est pas propice à la naissance d'enfants. Notre modèle socio-économique n'est tout simplement pas soutenable démographiquement. Comment l'expliquer ? Il y a des pistes : l'hyper-individualisme, la concentration sur des biens de consommation plutôt que sur les enfants, le nihilisme... Le seul "avantage" de ce système est qu'il parvient à partiellement combler le manque d'enfants grâce à l'immigration. Pourtant, les enfants d'immigrés adoptent le même comportement que la société d'accueil, ce qui signifie que le problème est insoluble à long terme.

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