Il y a retraités et retraités : mais qui sont ceux qui ont de vraies raisons de manifester ?

Atlantico : Quelles sont aujourd'hui les différentes catégories de retraités ? A quelle hauteur les métiers exercés par ces derniers dans le passé peuvent-ils expliquer les situations de ces catégories de retraités ?

Vincent Touzé : Tout d'abord, la retraite est le reflet de toute une vie, d'une histoire personnelle et professionnelle. Les pensions sont d'ailleurs calculées en fonction de cette dernière.En France, un retraité dispose d'un revenu annuel moyen de 23 590 euros. Bien sûr, tous les retraités ne bénéficient pas du même niveau de revenus, et donc du même niveau de vie. Il faut faire des distinctions entre les professions agricoles, les commerçants, les professions libérales, les anciens salariés du secteur privé ou du secteur public. Tout comme dans le monde actif, il existe des retraités moyens ou plus aisés. Les plus riches, en général les anciens cadres ou les anciennes professions libérales, en plus d'une pension plus importante, auront constitué un patrimoine tout au long de leur vie.

Quelle importance tient le patrimoine constitué par ces retraités tout au long de leur vie ?

Outre ses revenus, le retraité profite du patrimoine qu'il a pu constituer tout au long de sa vie active. Il faut ainsi différencier ceux qui peuvent compter sur un patrimoine de ceux qui ne peuvent pas car celui-ci, si le revenu du retraité baisse, peut apporter un soutien en nature non négligeable. Ainsi, un propriétaire dont la pension est de 1 500 euros vivra mieux qu'un retraité au même niveau de vie mais qui doit tous les mois payer 500 euros de loyer. On estime qu'à 60 ans, 80% des retraités sont propriétaires de leurs logement.

Les retraités sont aussi ceux qui touchent le plus d'héritages, ce qui peut augmenter leur niveau de vie. Là encore il faut distinguer ceux issus d'un milieu familial plus aisé, qui vont toucher un héritage plus important.

Comment ces différentes catégories sont-elles réparties sur le territoire ?

S'il y a plus de bénéficiaires du minimum vieillesse dans le sud de la France, il est difficile de comparer les niveaux de revenus sur le territoire car il est nécessaire de prendre en compte le coût de la vie locale. Ainsi, un retraité propriétaire d'un petit logement et d'un jardin à la campagne vivra sûrement mieux, avec 600 euros, qu'en ville.

Comment la crise a-t-elle impacté ces différentes catégories ?

La crise a pu avoir un impact net, en 2008, sur ceux qui étaient encore actifs et qui ont connu une baisse d'activité ou qui ont été forcé à partir plus tôt. Les plus gros impacts se font ressentir sur les revenus du patrimoine et les revenus financiers, mais cela ne concerne pas les retraités les plus pauvres.

Etat de santé, entourage : quels facteurs sociaux viennent jouer un rôle déterminant dans leur situation, avec quelles conséquences concrètes ?

Il est important pour les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables de conserver de bonnes relations avec leur entourage familial ou leur voisinage. Concernant leur état de santé, il est vrai qu'avec l'âge de nouveaux besoins apparaissent et que le risque de dépendance augmente. Mais les retraités ont en général une bonne couverture et peuvent conserver leurs mutuelles. Ceux qui ont de grosses pensions peuvent se payer une maison de retraite.

Constate-t-on des différences dans les situations des hommes et des femmes ?

Les inégalités entre les hommes et les femmes sont importantes chez les retraités. Dans les tranches les plus pauvres, quand une femme touchera un revenu annuel de 3850 euros, un homme pourra compter sur plus de 9000 euros. A partir d'un certain âge, ces dernières vivant plus longtemps que les hommes, les retraitées sont beaucoup plus nombreuses. Elles peuvent compenser leurs plus faibles revenus grâce à la pension de réversion de leurs maris, et grâce au patrimoine qu'ils auront constitué en commun.

Sont-ils tous concernés par les mesures gouvernementales concernant les retraites ? Qui sont les vrais oubliés du système ?

Les réformes actuelles sur le système des retraites n'ont que peu d'impact sur les retraités actuels. Ils sont très peu mis à contribution, notamment pendant la crise, où ils profitent de leurs acquis. Les retraités pourront être touchés lorsque le chômage dans le pays augmentera, et que cela obligera peut-être à des coupes dans les retraites. Mais le taux des plus pauvres est plus faible que chez les actifs, il y a moins de pauvres chez les retraités.