Haut-Karabakh : que peut la France pour aider les Arméniens au-delà des mots ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Un homme dans un cimetière militaire commémoratif à Erevan le 27 septembre 2023, marquant le troisième anniversaire du début du conflit dans la région du Haut-Karabakh.
Un homme dans un cimetière militaire commémoratif à Erevan le 27 septembre 2023, marquant le troisième anniversaire du début du conflit dans la région du Haut-Karabakh.
©KAREN MINASYAN / AFP

Diplomatie

La France va ouvrir un consulat dans la région méridionale du Syunik, une région convoitée par l'Azerbaïdjan. La France veut empêcher une invasion azérie dans le sud du pays.

François Devedjian

François Devedjian

François Devedjian est avocat. 

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Atlantico : La France a annoncé l'ouverture d'un consulat dans la région méridionale du Syunik, une région convoitée par l'Azerbaïdjan. "L'objectif c'est de renforcer la coopération de défense avec Erevan", a déclaré la ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna. Est-ce un bon début politiquement pour aider les Arméniens ?

François Devedjian : Je n'en suis pas certain, bien que je voudrais répondre par l'affirmative. Je n'ai aucun doute quant à la volonté de la France et de son gouvernement de vouloir aider l'Arménie. Cependant, la France ne peut pas agir seule. L'ouverture d'un consulat demeure un geste symbolique, alors que nous avons actuellement besoin d'une force d'interposition internationale de grande envergure. Sans cela, l'ensemble de l'Arménie est en très grave danger à très court terme.

Chacun a des intérêts politiques qui ne sont pas forcément les mêmes. Qu’est-ce qu’on peut faire pour faire avancer les choses ? 

Les clés de ce conflit sont partagées entre plusieurs puissances et l'Arménie a également un rôle à jouer. Lorsque le gouvernement arménien a reconnu l'intégrité territoriale de l'Azerbaïdjan, Haut-Karabagh compris ; cela a représenté un grand pas vers la paix. Même si ce geste a été coûteux. 

Il y a quelques jours encore, lors de l'offensive violente de l’Azerbaïdjan sur le Haut-Karabakh, le gouvernement n'a pas bougé. Je pense d’ailleurs que l’Arménie a eu raison car c’était un moyen d’éviter un prétexte pour se faire envahir. L'Arménie a fait la démonstration de sa volonté de paix avec l'Azerbaïdjan. Aujourd'hui, il est temps de passer à la vitesse supérieure en convoquant une conférence internationale où l'Arménie offre la paix, y compris avec la création d'un corridor à définir pour relier l'Azerbaïdjan au Nakhitchevan. De plus, l'Arménie devrait demander à la communauté internationale d'envoyer une force d'interposition sur son territoire. Je pense donc qu’on peut trouver des solutions

L'Azerbaïdjan pourrait refuser la paix en raison du schéma turc depuis le début du 20e siècle, c’est le panturquisme. Projet qui vise à établir une continuité territoriale turc entre le détroit du Bosphore sur la mer Noire et la mer Caspienne. Une entreprise jusqu'à présent infructueuse. De plus, au-delà de ses intérêts personnels, la Turquie s’est construite sur le sang des Arméniens et la négation d'un génocide. Le seul moyen de se débarrasser du peuple arménien est donc de détruire ce pays, comme l'a clairement déclaré Erdogan.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, l'influence russe s'effrite dans la région, tandis que l'appétit turc semble grandir. Mais quel est le véritable rôle de la Turquie dans ce conflit ?

Chacun a des intérêts parfois convergents, parfois divergents. Dans ce conflit, la Turquie voit l'occasion de se débarrasser d'un obstacle, à savoir les Arméniens. Elle cherche également à obtenir une continuité territoire du Bosphore à la Caspienne. Enfin, cette crise, y compris celle avec l’Ukraine, permet à la Turquie de réaffirmer sa place et son influence dans les enjeux mondiaux. En résumé, l'esprit impérialiste et expansionniste de la Turquie renaît, comme nous l'avons observé à Chypre, en Méditerranée orientale, en Syrie, et bien sûr au Kurdistan. C’est toute cette volonté impérialiste et expansionniste de la Turquie qui renaît. 

La France a-t-elle les moyens de fournir un soutien significatif aux Arméniens ?

Nous avons toujours les moyens de lutter contre l'ignominie. Si nous ne le faisons pas, elle finira par nous rattraper. En 1938, nous n'avions ni les moyens ni le courage de nous dresser contre le nazisme et nous en avons vu les conséquences. Aujourd'hui, nous nous trouvons dans une situation similaire, du moins en ce qui concerne les principes et les valeurs. Aujourd’hui, on a un Etat qui dit qu’il va terminer un génocide, qui le met en œuvre et personne ne bouge. Ça va au-delà des conséquences géopolitiques de cette situation. C’est la négation de nos principes et de nos valeurs. Tôt ou tard, cela se retournera contre nous.

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